Souvenez-vous : en mai 2017, Jean-Pierre Denis, le patron d’Arkéa, justifiait ses velléités de départ de la Confédération nationale du Crédit Mutuel par cette phrase : « Arkéa refuse toute forme de centralisation ».
Un an plus tard, le schéma d’indépendance proposé par la banque bretonne repose pourtant sur une centralisation des activités bancaires au sein d’Arkéa et une perte d’agrément pour les caisses locales. Plus c’est gros, plus ça passe…
Pour convaincre les caisses locales de voter pour l’indépendance d’Arkéa, Jean-Pierre Denis n’a cessé d’agiter le chiffon rouge de la centralisation et de la perte d’autonomie. « Soit nous acceptons une intégration dans un groupe bancaire centralisé en devenant l’une de ses composantes. Soit, nous conservons notre autonomie et notre liberté d’entreprendre qui sont au cœur de notre modèle économique », confiait ainsi le président de l’entité bretonne en janvier dernier.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette stratégie a été efficace : en avril, 216 caisses locales sur 221 votaient en faveur de l’indépendance, soit 97,7 %. Succès retentissant pour Jean-Pierre Denis, qui jusque-là avait promis à ses ouailles qu’une fois indépendant, Arkéa resterait « une banque mutualiste et coopérative de plein exercice dont le capital restera détenu par l’ensemble des caisses locales. Comme c’est le cas actuellement, les caisses devraient rester financièrement solidaires entre elles ».
Problème : le nouveau schéma proposé par Arkéa — le premier ayant été retoqué par la Banque centrale européenne et la Banque de France en raison de sa « validité juridique douteuse » — est bien loin de celui que vendait Jean-Pierre Denis durant sa campagne pour convaincre du bien-fondé de son projet d’indépendance.
Perte de l’agrément et centralisation des activités bancaires au sein d’Arkéa — qui conserverait pour sa part son statut de société anonyme coopérative — c’est ce qu’offre Jean-Pierre Denis aux caisses locales qui souhaitent le suivre dans son projet. Voilà qui ressemble à s’y méprendre à « une intégration dans un groupe bancaire centralisé en devenant l’une de ses composantes »…
Mais Jean-Pierre Denis sait trouver les mots pour rassurer ses caisses locales auxquelles il promet qu’elles continueront à participer « à la détermination et la mise en œuvre des orientations stratégiques du groupe ». Et celui-ci a tout intérêt à se montrer convaincant : « le modèle proposé — certes coopératif — va demander aux caisses locales d’apporter leurs actifs à des structures « miroir » filiales du groupe », précise en effet Les Echos.
Jean-Pierre Denis arrivera-t-il à faire passer la pilule auprès des caisses locales d’Arkéa qui — dans un projet que le président considère en phase avec « l’identité coopérative, mutualiste et territoriale du groupe » — seront reléguées au second plan ? Rien n’est moins sûr. Celles-ci doivent en effet repasser par les urnes pour entériner une fois pour toutes le projet d’indépendance du patron d’Arkéa et — cette fois-ci — elles seraient bien avisées de réfléchir à deux fois avant de se prononcer.
Pierre-Yves Bruant, retraité.
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