Nous sommes nombreux à regretter le départ de Frédéric Pinheiro en 2017. Durant une décennie, il s’était hissé au rang de grand chef. Ici même, nous avions stigmatisé les contraintes financières, fiscales et administratives qui brident la restauration de qualité.
Mathieu Corbineau, 30 ans, a eu le courage de prendre la suite. Avec son épouse, ils ont un peu rafraîchi le cadre et lui ont donné encore plus de sérénité. La difficulté pour Corbineau était d’égaler en niveau, tout en se singularisant, la cuisine de son prédécesseur.
Au bout de quelques mois, la clientèle est toujours là. Ce qui est bon signe. Nous avons testé le menu du jour, trois services, 20 euros.
Sommes-nous mal tombés ? Étions-nous trop imprégnés encore de la cuisine de Pinheiro qui nous a régalés tant de fois ? C’est bien possible.
Une seule entrée : filet de lisette posé sur un fond crémeux qui a toutes les allures d’une purée. Saveurs fines mais trop peu soutenue. Pour le plat, le choix entre un pavé de saumon et un filet mignon. Les cuissons sont exactes dans les deux cas mais l’accompagnement semble interchangeable, toujours ce fond mi- crème, mi- purée. Très joli dessert, fruits frais, glace, très bien conduit. Côté vin, un chinon rouge, sans intérêt.
Alors ? Conseiller le chef ? C’est toujours prétentieux mais après tout… Peut-être revenir, en les interprétant ou pas, aux classiques de la cuisine des bords de Loire et de Nantes. Je cite ce que Gault et Millau avaient noté en leur temps,saucisses au muscadet, lard nantais (fabuleux, allez chez Viaud à Talensac), écrevisses, escargots, morue au four, hareng à la moutarde avec sa laitance, rôti de veau à la nantaise, curé, crémet, bottereaux, gâteaux nantais…De toute manière, se refuser à l’alignement gustatif qui vit de copié, coupé, collé. Comme le disait Georges Danton à l’Assemblée : « De l’audace ! Encore de l’audace ! » A ce jeune chef de relever le défi.
J.H.
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