Après la reprise des expulsions jeudi dans le bois de Rohanne et aux environs, elles ont continué ce vendredi aux extrémités ouest, est et nord de la ZAD : trois maisons en dur squattées ont été murées, quatre détruits, deux ont brûlé. Dans la soirée, Gérard Collomb a annoncé la fin de l’intervention sur la ZAD, mais elle se poursuit encore ce samedi et au début de la semaine prochaine, avec des effectifs plus limités il est vrai.
« Les squats expulsés et déconstruits par les forces de l’ordre ne s’inscrivent dans aucun des projets agricoles déposés en préfecture. Leurs occupants refusent toute discussion et rejettent l’idée d’occuper ces terres de façon légale. Cette situation n’est pas acceptable dans un État de droit, pas plus que ne le sont le climat d’insécurité, les actes de vandalisme et les actions d’obstruction », a réagi le Ministère de l’Intérieur dans un communiqué.
Cette fois encore, il y a eu relativement peu de résistance de la part de zadistes « irréductibles » démobilisés et divisés, dont une partie des forces vives était d’ailleurs à Nantes pour bloquer – avec succès – les partiels de lettres, langues et sciences humaines. Et être déjà sur place alors qu’une manifestation en soutien à la ZAD est prévue ce samedi après-midi à Nantes avec comme objectif affiché de reproduire l’émeute du 14 avril. Difficile cependant de prévoir son affluence alors que celle du 17 mai a été un échec avec à peine 250 personnes dans le cortège.
Cette fois encore, les forces de l’ordre étaient pré-positionnées très tôt le matin, passant la barricade de la Maison Rose (extrémité ouest de la ZAD) à 6h, expulsant la Freuzière – un corps de ferme en dur partiellement incendié il y a quelques mois suite aux règlements de comptes entre zadistes – à 6h20, les domaines libérés – en dur aussi – à 7 h. Une inspection a été menée à la ferme de Saint-Jean du Tertre (Willem, lait bio) pour retrouver un zadiste de la Freusière. Le Pré Failly a brûlé entre 6 et 9h, tout à l’ouest, pour des raisons inconnues. Juste à côté, la Tarte a été expulsée et détruite.
A l’est, Ker-Terre et la gare ont été expulsés dans la matinée ; les squats ont été détruits, ainsi qu’une caravane à Ker Terre. Pendant la matinée et le début de l’après-midi, des affrontements entre gendarmes et zadistes « irréductibles » ont eu lieu en divers lieux, notamment à la Saulce et la Pruche (entrée centre-sud de la ZAD sur la RD81) avec des barricades faiblardes, souvent en bois vert (tant pis pour l’écologie). D’autres ont préféré viser nominativement des journalistes de la presse mainstream sur les réseaux sociaux, accusés de « filmer pour les flics ».
Des barricades sont érigées carrefour de la saulce et des affrontements en ce moment. #zad #nddl #resistance pic.twitter.com/4bqtyBpYSM
— Zone À Défendre (@ZAD_NDDL) 18 mai 2018
Avec l’incendie de la cabane Ker Stank, située au milieu d’un étang et abandonnée, il ne reste plus à l’est que la Grée (squattée), les Fosses Noires (boulangeries existantes, projet déposé en Préfecture) et la Noé Verte (conserverie, projet déposé en Préfecture mais installée sur des terres spoliées aux agriculteurs riverains). La police scientifique s’est aussi invitée à l’Isolette – qui appartient à Guy Lamisse et a été squattée et vandalisée à plusieurs reprises par des zadistes. Aux Ardilières, la maison en dur de Phoenix, abandonnée, est murée.
Neuf personnes ont été arrêtées ce 18 mai – dont une à la Freuzière, une autre aux Domaines Libérés – autre bâtiment en dur aussi appelé Maison des Chats – pour refus de donner son identité ; deux ont été relâchées « dont une pour vice de forme » selon les zadistes. La veille, deux personnes arrêtées dont une relâchée. Ils déclarent aussi avoir 1 blessé le 17 par grenade de désencerclement et 18 blessés le 18 « dont 10 par grenade de désencerclement […] une personne évacuée devant des signes d’atteinte nerveuse en aval d’un éclat ». Le soir du vendredi, Gérard Collomb annonçait la fin de l’intervention sur la ZAD.
Une intervention qui n’est encore pas terminée
Ce n’est pourtant pas fini. Les zadistes ont tenté de réoccuper Phoenix (les Ardilières) qu’ils ont démuré ainsi que les Domaines libérés, à deux reprises au moins. Les deux maisons étant situées sur la RD81, elles ont un intérêt stratégique. Après des tentatives de réoccupation, les autorités ont annoncé qu’elles seront démolies la semaine prochaine, d’autant qu’elles sont quasiment inhabitables.
Je ne sais pas pourquoi, mais là, j’ai comme le sentiment qu’en fait, c’est le ciment #Zadiste qui se délite. Pas vous ? #ZAD #NDDL #LeCommencementDeLaFin https://t.co/hdd684uUYB
— Franc Aller (@Franc_Aller) 19 mai 2018
Ce samedi matin 700 gendarmes étaient à nouveau sur la ZAD pour déblayer ce qui restait de Ker Terre et vérifier qu’il n’y avait pas de réoccupation des squats en dur murés. Pendant ce temps les zadistes « irréductibles » récupéraient les débris de la Châtaigne, installaient des barricades dans le chemin de Suez et des (petites) chicanes sur la RD81 – avec des pneus qui deviennent subitement écologiques lorsqu’ils sont utilisés par les zadistes. Des contrôles routiers sont aussi faits à Notre-Dame des Landes et au débouché de la 2×2 voies à Héric de 7 à 19h ce samedi.
Des barricades sont érigées carrefour de la saulce et des affrontements en ce moment. #zad #nddl #resistance pic.twitter.com/4bqtyBpYSM
— Zone À Défendre (@ZAD_NDDL) 18 mai 2018
Un rassemblement de reconstruction de la ZAD est prévu ce dimanche à partir de 12h à Bellevue – les gendarmes ont prévu d’empêcher les zadistes de jouer aux kaplas, ou plutôt de faire des « assemblages de charpentes pour que la ZAD se reconstruise ». Le parking de la salle Cassiopée de Notre-Dame des Landes qui leur servait de camp de base ce jeudi et ce vendredi leur est d’ailleurs réservé pour ce week-end.
Cependant le soutien aux zadistes a faibli de façon notable. Un militant tente une explication : « peut-être que si une partie des gens visés par l’opération de ces derniers jours n’avaient pas passé leur temps à cracher sur les 9/10 des soutiens potentiels, il y aura plus de monde sur la zad et dans les rassemblements en ville… quant au 1/10 qui reste, il faut croire que [ce sont] principalement des radicaux de posture qui se la jouent sur internet mais qui ne représentent rien sur le terrain ». Même s’il reste encore plusieurs dizaines de lieux de vie habités, la fin de la ZAD ressemble en effet à une longue agonie…
Louis Moulin
Crédit photo : DR
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