L’application de messagerie cryptée Telegram connait des heures difficiles. Bloquée par les autorités russes, les fournisseurs d’accès Internet ont commencé à faire de même. Décryptage d’un cryptage qui a fait grincer des dents.
Clés refusées
À l’origine de la polémique, l’injonction faite par les autorités russes aux patrons de Telegram de leur fournir les clés de cryptage afin de déchiffrer certaines communications au motif de la lutte anti-terroriste. Face au refus de la société, l’exécutif en place à Moscou a décidé de faire bloquer l’application dès le lundi 16 avril.
Vendredi 13 avril, un tribunal russe avait précédemment ordonné le blocage de Telegram dans tout le pays. Alors que le FSB (services spéciaux russes) avait fait une demande auprès de l’application afin de pouvoir lire des messages, il s’était vu adresser une fin de non-recevoir. C’est une loi antiterroriste promulguée en 2016 qui a permis la décision du tribunal russe. Le texte contraint en effet les sociétés basées sur le territoire de la Russie à stocker les informations relatives aux utilisateurs nationaux dans le pays.
Service instable
L’exécution de la décision de justice n’a donc pas traîné et Telegram a donc dû prévenir ses utilisateurs russes des désagréments en cours. « Les autorités russes ont commencé à bloquer Telegram. Le service peut être instable sans VPN. Nous vous tiendrons informés des développements à venir », précise ainsi une notification de l’application.
De leur côté, les fournisseurs russes d’accès Internet ont aussi procédé au blocage de Telegram. Une action intimée par l’agence russe de régulation des télécoms Roskomnadzor qui leur a demandé de suivre la décision du tribunal de Taganski.
Réaction du fondateur
En réaction, les dirigeants de Telegram ont riposté par la communication. Le fondateur de l’application Pavel Dourov estime alors qu’il est révélateur « que les gouvernements autoritaires (par exemple la Russie) essaient de bloquer Telegram pour son cryptage mais sont plus souples quand il s’agit d’autres messageries cryptées ». Sans nommer ces dernières par ailleurs.
It is telling that authoritarian governments (e.g. Russia) are trying to block Telegram over encryption, but are more relaxed when it comes to other encrypted messaging apps.
— Pavel Durov (@durov) 16 avril 2018
Ce blocage, pour l’instant sans incidence sur les utilisateurs des autres pays, vient toutefois ternir l’image de Telegram. Tandis que l’application joue la carte de l’indépendance et de l’intégrité en se refusant à livrer ses clés de cryptage, il n’est pas impossible que d’autres États, plus démocratiques sur le papier, emboîtent le pas de la Russie.
Telegram est utilisée par plus de 200 millions de personnes à travers le monde et est devenue la plus célèbre des messageries cryptées, notamment via son usage par des membres de Daesh. Mais la détermination de ses fondateurs à préserver le secret des communications face aux pressions politiques ne doit pas faire oublier que le système de cryptage de Telegram a déjà connu des failles à plusieurs reprises.
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