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Elections municipales à Nantes : les écologistes ne font pas le poids

26/09/2013 – 11h00 – Nantes (Breizh-info.com) – A Nantes, l’alliance socialistes/écologistes avait du bon pour les deux partenaires : la liste dirigée par Jean-Marc Ayrault aux élections municipales de 2008 a été élue dès le premier tour avec 55,71% des suffrages. Le prix à payer pour le « super boss » : une délégation pour François de Rugy (transports) et une autre pour Ronan Dantec (environnement). Pour les tenir définitivement attachés au char Ayrault, on fit ensuite du premier un député et du second un sénateur. Ainsi tranquillité assurée sur le front écologiste pour le député-maire et assurances que les prochaines élections ne constitueraient qu’une simple formalité – vu l’inexistence de la droite locale.
Mais c’était compter sans le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, la grande affaire de monsieur Ayrault. Opération à laquelle les écologistes se doivent de s’opposer. Même si de Rugy et Dantec ne font pas preuve sur ce dossier d’un zèle excessif. Service minimum, pourrait-on dire. Un exemple : au « rassemblement festif » des 3 et 4 août, ils auraient pu animer le débat organisé sous le grand chapiteau ; c’était la moindre des choses pour les deux leaders écolos que d’épauler Julien Durand et Christophe Dougé. On dit qu’« ils sont passés »…
Notre-Dame-des-Landes donne l’occasion de vérifier que le contrat qui unissait socialistes et écologistes n’allait pas au-delà de l’alliance de circonstances, reposant sur un simple objectif électoral. Car, sur l’essentiel, le désaccord est total entre les deux familles. Jean-Marc Ayrault résume fort bien la chose : « Nous avons choisi notre destin. Nous ne nous laisserons p)as dicter une vision du monde qui n’est pas la nôtre » (Paris-Match, 22/11/12). L’union régionale du Parti socialiste enfonce le clou dans une brochure intitulée « 10 vérités bonnes à dire, 10 mensonges à démentir ». Après la dénonciation d’ « une bien mauvaise cause : la décroissance», on passe à ce que tout électeur de gauche devrait savoir : « Ce qui se joue à Notre-Dame-des-Landes, c’est un combat politique et idéologique entre deux visions de la société. »
Dans ces conditions, les adhérents nantais d’Europe Ecologie-Les Verts ont donc fait preuve de logique en décidant – le 2 juillet dernier – à une très large majorité de faire cavalier seul aux élections municipales de mars 2014. « Où est-il écrit que, quand on appartient à des partis différents, on doit être dans le rassemblement partout ?souligne Jean-Philippe Magnen, conseiller régional et conseiller municipal de Nantes. Nous ne sommes pas les supplétifs du PS. » (Le Monde, 06/07/13). Ce qui ne va pas vraiment dans le sens souhaité par François Hollande qui invitait « la majorité à s’organiser pour les prochains scrutins, notamment municipaux, pour partir rassemblés » (Ouest-France, 01/07/13).
Conséquence immédiate de ce divorce : la liste de gauche (PS, PCF et divers) sera contrainte de subir l’épreuve humiliante (?!) du second tour. D’autant plus que cette dernière ne sera pas conduite par le TGV Ayrault mais par le TER Johanna Rolland (PS), première adjointe de l’actuel maire, Patrick Rimbert. Héritière que François de Rugy s’empresse de tacler : « Johanna Rolland a un problème de notoriété. Si elle avait été désignée dans le cadre d’une primaire ouverte, elle aurait eu une légitimité beaucoup plus grande. » (Le Monde, 16-17/06/13).
Pourtant les Verts gagneraient à aborder cette épreuve électorale ave prudence et modestie. En effet, au premier tour de l’élection présidentielle, Eva Joly n’avait obtenu que 4,61% dans la ville de Nantes (22 avril 2012), résultat certes supérieur à celui obtenu à l’échelon national (2,27%), mais qui ne permet ni de triompher, ni d’entrevoir un avenir radieux, tant le rapport de force avec l’équipe Ayrault semble défavorable aux écolos. Mais il leur reste un pouvoir de nuisance…
Dans la circonscription de Nantes 2, l’écologiste Pascale Chiron avait fait mieux avec 7,66%, tandis que, à Nantes 3, Jean-François Tallio (EELV) avait obtenu 6,18% lors du premier tour des législatives (10 juin 2012). L’exploit de François de Rugy à Nantes 1- 47,83% au premier tour – tenait à sa double casquette (socialiste et écologiste). Par conséquent, franchir la barre des 5% des suffrages exprimés à Nantes semble difficile pour une liste présentée par EELV. D’autant que les « écolos » n’apparaissent pas au mieux de leur forme.
Les pourcentages obtenus par les deux seuls vrais candidats écologistes à Nantes (Chiron et Tallio) méritent d’être relativisés car, au premier tour de la présidentielle, l’abstention atteignait seulement 19,18% dans la cité des ducs de Bretagne, tandis qu’au tour correspondant des législatives le taux montait à 41,60% chez la première et à 42,03% chez le second. Sans doute trouve-t-on là l’explication d’un score plus flatteur que celui obtenu par Eva Joly : il suffit de disposer d’un électorat faisant preuve de davantage de motivation que celui des clientèles concurrentes (PS, UMP, FN). Même observation pour François de Rugy (PS+EELV) dont les 47,83% des suffrages exprimés au premier tour s’accompagnent également d’un niveau d’abstention important (39,56%). Ce qui affaiblit la performance.
Le naufrage d’Eva Joly à l’élection présidentielle et la participation des écologistes au gouvernement ont considérablement altéré l’image de ces derniers. Leur entrée officielle dans le Système ne pouvait que les affaiblir politiquement. Dans l’opposition leur discours et leur action bénéficiaient d’un coefficient de sympathie indéniable auprès de celles et de ceux qui ont l’esprit quelque peu contestataire. Mais une fois les leaders d’EELV à la gamelle, le désenchantement à saisi leurs partisans – militants et électeurs. Il faut donc s’attendre à payer la facture en 2014 : « Je ne sais pas si on va le payer aux municipales ou aux européennes. Mais on va le payer, ça, c’est clair », prévoit Noël Mamère, député-maire de Bègles (Le Monde, 22/08/13). Pour toutes ces raisons, parvenir à franchir la barre des 5% des suffrages exprimés ressemblera fort à mission impossible pour la liste écologiste nantaise. Risque qui mérite réflexion une fois lu les articles L. 242 et L. 243 du Code électoral. Il apparait en effet que les dépenses concernant le coût du papier, l’impression des bulletins de vote, affiches et circulaires ainsi que les frais d’affichage « ne sont remboursés qu’aux listes (…) qui ont obtenu au moins 5% des suffrages exprimés ». Dans une grande ville comme Nantes (180.800 inscrits en 2012), cela représente une jolie facture.
Au cas où les écologistes iraient au combat, bannière au vent, il leur resterait la possibilité de fusionner avec la liste patronnée par Ayrault au second tour. En effet pour se maintenir, on doit obtenir au premier « un nombre de suffrages au moins égal à 10% du total des suffrages exprimés » (Article L. 264 du Code électoral). Objectif, bien sûr, impossible à atteindre par les écologistes nantais. Mais s’ils obtenaient 5%, ou plus, ils pourraient négocier avec Johanna Rolland des places sur la liste conduite par celle-ci. Car les listes pouvant se maintenir le second dimanche possèdent la faculté d’ « être modifiées dans leur composition pour comprendre des candidats ayant figuré au premier tour sur d’autres listes sous réserve que celles-ci ne se présentent pas au second tour et qu’elles aient obtenu au premier tour au moins 5% des suffrages exprimés » (L. 264).
Finalement des Verts prennent de gros risques à vouloir jouer à plus forts qu’ils ne sont. Une liste autonome ne franchissant pas la barre des 5%, cela signifierait leur disparition du paysage municipal nantais : adieu adjoints, adieu conseillers municipaux, adieu à ces indemnités qui favorisent la professionnalisation des « chefs » ! Sans oublier le fiasco financier. Bien entendu, pour l’instant on joue à « Arrêtez-moi où je fais un malheur ! » En décembre arrivera l’heure de vérité : les sondages indiqueront alors aux écolos s’ils peuvent poursuivre dans la voie de l’autonomie ou si rentrer dans le rang s’impose. Une bonne négociation et une bonne transaction permettront alors aux frères ennemis de sauver l’essentiel : les places et tout ce qui va avec.
Bien sûr, pour la direction nationale, le discours reste ferme quant aux listes autonomes. Ainsi, Jean-Vincent Placé, président du groupe EELV au Sénat, « n’excluait pas quelques listes d’union Verts-PS de premier tour, mais seulement où la gauche risque de se retrouver troisième derrière l’UMP et le FN et face à une droite très unie ». Où ? A EELV on évoque deux hypothèses, Reims et Marseille. » (Le Nouvel observateur, 22/08/13). Mais on sent chez certains la volonté d’entamer un rétropédalage qui pourrait se révéler bien utile dans quelques mois. C’est le cas de Ronan Dantec lors des journées d’été des écolos à Marseille. Animant une table ronde consacrée aux élections municipales (« Speed dating municipales » en langage techno-écolo), il s’est fait sérieusement allumer par des militants de base. D’où l’urgence de botter en touche : « On a une vraie culture de pouvoir et on l’a eue en créant un rapport de force ». Une militante s’esclaffe : « Un rapport de force, tu parles ! On est dans les mains du PS, c’est tout. » Dantec répond : « On n’est pas d’accord sur tout avec eux, mais on a des relations de confiance avec Jean-Marc ». Le « Jean-Marc » provoque des ricanements. « Pourquoi pas JM pendant que tu y es ! ». C’est la fin de la séance, Dantec se lève, soulagé, et s’éclipse rapidement (Le Canard enchaîné, 28/08/13).
Voilà qui devrait rassurer Jean-Marc Ayrault : Ronan Dantec est un bon petit soldat avec lequel il serait possible de s’arranger le moment venu.

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Les écologistes nantais pourraient faire grise mine aux municipales 2014

Crédit photo : Adam Bishop/Wikimedia (cc) hôtel de ville de Nantes
FDR François de Rugy/Wikimedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2013, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine

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