Après des mois d’incertitude, le tribunal de commerce de Rennes a validé ce 25 avril 2025 la reprise de la Fonderie de Bretagne par le groupe landais Europlasma. Une décision marquant un tournant radical pour cette ancienne filiale de Renault, qui délaissera progressivement l’automobile pour produire… des obus.
Une reconversion industrielle soutenue par l’État
En redressement judiciaire depuis janvier, le site de Caudan a vu son unique offre de reprise acceptée. Europlasma, désormais propriétaire, s’est engagé à maintenir 266 emplois sur les 286 actuels, sans départ contraint. Un investissement de 15 millions d’euros est prévu sur trois ans, assorti d’un appui financier public conséquent : 7 millions d’euros répartis entre l’État (5,5 M€), la région Bretagne et l’agglomération de Lorient.
L’objectif est clair : produire dès 2025 jusqu’à 250 000 corps creux d’obus de 120 mm, avec un doublement des cadences espéré en 2026. Cette reconversion s’inscrit dans un contexte d’économie de guerre larvée, face aux tensions géopolitiques internationales et à l’accroissement des besoins de l’industrie de Défense.
Une transition contrainte mais saluée
Si l’idée d’une reconversion militaire n’était pas l’option initialement souhaitée par les salariés, elle est désormais perçue comme un soulagement. Malgré son opposition historique à la fabrication d’armes (les obus produiront serviront à priori plus à tuer des hommes et des femmes dans le monde qu’à fabriquer des statues), la CGT ferme les yeux au nom de l’emploi.
Le directeur du site, Jérôme Dupont, voit dans cette réorientation un levier de survie
Un repreneur controversé
Malgré le soulagement affiché, certains restent prudents. Europlasma, côté en bourse, traîne une réputation sulfureuse. Spécialisé initialement dans la dépollution des déchets industriels, le groupe s’est récemment tourné vers l’armement avec le rachat des Forges de Tarbes, et tente de relancer Valdunes, fabricant historique de roues ferroviaires.
Des pannes à répétition, des retards dans les investissements et une gouvernance financière controversée — notamment via des fonds basés aux îles Caïmans — suscitent l’inquiétude.
Fondée en 1966, la Fonderie de Bretagne s’inscrit dans une tradition industrielle lourde héritée des Forges d’Hennebont. Longtemps liée au constructeur Renault, elle a souffert de la transition vers l’électrique, entraînant un effondrement des commandes et des ventes.
Le revirement vers la Défense nationale lui offre une nouvelle opportunité de survie économique.
La relance de la Fonderie de Bretagne dans un secteur stratégique pourrait annoncer un repositionnement plus large de l’industrie bretonne dans le champ de la souveraineté nationale. Reste à voir si Europlasma saura tenir ses promesses, et si cette reconversion s’inscrira durablement dans le tissu économique local.
Illustration : DR
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