La perte d’odorat est souvent perçue comme une simple gêne chez les personnes âgées. Pourtant, une étude suédoise récemment publiée dans JAMA Otolaryngology – Head & Neck Surgery tire la sonnette d’alarme : chez les plus de 60 ans, un affaiblissement de l’odorat serait corrélé à un risque accru de mortalité de 68 % en six ans. Un indicateur discret mais redoutablement révélateur d’une dégradation générale de l’état de santé.
Des résultats inquiétants sur plus de 2 500 personnes âgées
L’étude, fondée sur les données de la Swedish National Study on Aging and Care (SNAC-K), a suivi 2 524 participants âgés en moyenne de 72 ans, entre 2001 et 2004, puis jusqu’à 12 ans après. Les chercheurs ont évalué les capacités olfactives des participants grâce à un test d’identification de 16 odeurs courantes. Résultat : chaque mauvaise réponse augmentait le risque de décès de 6 % à six ans, et de 5 % à douze ans.
Plus concrètement, les personnes présentant une anosmie (perte totale de l’odorat) ou une altération significative de leur odorat présentaient un risque de décès majoré de près de 70 % en six ans. En douze ans, l’effet s’atténue, l’âge devenant en soi un facteur dominant de mortalité.
Un symptôme aux multiples implications
La perte de l’odorat est loin d’être anodine. Elle pourrait signaler des troubles neurologiques sous-jacents, notamment les prémices de maladies neurodégénératives comme Alzheimer ou Parkinson, explique le Dr Helen Messier, spécialiste en médecine du vieillissement. Ces pathologies touchent souvent en premier lieu le bulbe olfactif, l’une des régions cérébrales les plus sensibles aux dégradations neurologiques.
L’anosmie pourrait aussi indiquer une inflammation chronique ou un dysfonctionnement métabolique, souvent associés à des pathologies cardiovasculaires ou au diabète. Des altérations de la microcirculation (les petits vaisseaux sanguins) peuvent ainsi affecter le cerveau, le cœur… et l’odorat.
Des conséquences concrètes sur la qualité de vie
Outre son rôle de marqueur biologique, la perte de l’odorat impacte directement la sécurité et la nutrition des personnes âgées. Ne plus détecter l’odeur du gaz, d’aliments avariés, ou du feu accroît le risque d’accidents domestiques. Et la perte de l’appétit liée à l’absence d’odeurs peut entraîner carences, dénutrition, et affaiblissement du système immunitaire, favorisant la dépendance et les hospitalisations.
L’étude estime que 23 % des décès en six ans chez les patients anosmiques sont liés à la démence, 11 % à la fragilité physique, et 5 % à la malnutrition. Au bout de 12 ans, la fragilité devient le principal facteur explicatif de mortalité chez ces individus.
Bien au-delà d’un simple désagrément sensoriel, la perte d’odorat se révèle être un biomarqueur discret mais puissant du vieillissement pathologique. Mieux la dépister, mieux l’interpréter et mieux la traiter pourrait bien devenir un enjeu majeur de la médecine gériatrique moderne.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine