Il fut un temps où le football était un sport de passion, d’émotions brutes, de rivalités sans filtres. Un temps où les tribunes chantaient, criaient, se moquaient, agressaient verbalement les joueurs qui prenaient les insultes comme elles venaient – et où personne ne versait une larme.
Mais aujourd’hui, la moindre invective déclenche des vagues d’indignation, des appels à la répression, aux poursuites juridiques, des prises de position solennelles de consultants en mal de vertu. L’affaire Rabiot en est la parfaite illustration : un joueur millionnaire, ancien du PSG, ayant trahi son club pour l’ennemi ,conspué et insulté par ses anciens supporters (oui, aussi surprenant que cela puisse paraitre pour ceux qui ont mondialisé et déraciné le sport, pour beaucoup de fans, on ne change pas de club comme de slip), et voilà que l’on crie au scandale. Sa mère est également visée dans des chants et aussitôt, les tribunaux médiatiques se mettent en branle .
L’hystérie collective face à des chants de supporters
Que s’est-il passé dimanche soir au Parc des Princes ? Rien de plus que ce qui a toujours existé dans un stade. Des chants moqueurs, des banderoles acides, un public qui règle ses comptes avec un joueur parti sous d’autres cieux, chez l’ennemi, pour de l’argent, et qui trahi, dans l’esprit des supporteurs, le club en allant chez le rival. Du folklore, du chambrage, du très mauvais goût même (sur le père de Rabiot, décédé en 2019 – ce que réfutent d’ailleurs les auteurs de la banderole) ce qui fait du football un spectacle vivant et non une messe aseptisée. Mais en 2025, ce qui aurait été une anecdote il y a vingt ans devient presque une affaire d’État.
Christophe Dugarry, qui s’insurge contre cette supposée « mal-éducation » des tribunes, devrait se souvenir de l’époque où il jouait. À cette époque, des joueurs comme lui n’étaient pas épargnés. Cantona, Ginola, Barthez, Deschamps et tant d’autres ont tous été conspués dans un stade sans que cela ne déclenche un tsunami médiatique. Les joueurs eux mêmes se cartonnaient parfois entre eux (On parle des PSG-OM des grands soirs avec les Moser, Di Meco, Sassus, Germain, qui ne venaient pas sur la pelouse pour se faire des calins ?)Les supporters de l’OM insultaient ceux du PSG, ceux du PSG répondaient, et ainsi de suite. Il y avait même parfois quelques gifles, et quelques coups. Personne n’a jamais dit qu’un ultra, qu’un supporteur de football, était intelligent, surtout en meute, lorsqu’il pénètre dans une enceinte sportive. Mais personne ne jouait les vierges effarouchées.
Mais aujourd’hui, le processus est bien rôdé : une minorité s’indigne, les médias en font leurs gros titres, les clubs et les instances paniquent, puis viennent les sanctions, les lois et les condamnations. C’est ainsi que l’on est passés de simples provocations de stade à des matchs interrompus pour « chants homophobes » et bientôt, peut-être, à des tribunes sous surveillance totale, où chaque supporter devra signer un code de bonne conduite avant d’entrer.
Un football aseptisé chez les pros, une anarchie dans l’amateurisme
Et pendant que les élites du football s’émeuvent des méchancetés balancées dans les stades, que se passe-t-il dans le football amateur ? Là où les vrais problèmes existent ? Où des jeunes arbitres se font tabasser sur des terrains de banlieue, où des matchs dégénèrent en bagarres générales, où les éducateurs se font insulter et menacer ?
Là, curieusement, les instances se montrent bien plus silencieuses. Le ministre des Sports ne sort pas un communiqué chaque semaine pour dénoncer l’état catastrophique du football amateur, où les agressions et les violences physiques sont en augmentation. Ce ne serait sans doute pas politiquement correct d’enquêter sur les responsables. Non, on préfère s’attaquer aux supporters, à ceux qui, dans leur passion excessive, font vivre le football professionnel.
On supprime le traditionnel « Ho hisse enculé » des dégagements de gardiens, on interdit l’alcool dans les travées des stades de football selon les matchs, ou dans les vestiaires de l’équipe de France de rugby après une victoire, on multiplie les contrôles et les sanctions sur les joueurs, comme si le sport devait devenir une institution monastique. Mais dans le même temps, on ferme les yeux sur des comportements autrement plus graves sur les terrains amateurs.
Vers quelle société allons-nous ?
L’indignation permanente, la traque obsessionnelle de la moindre parole jugée « offensante », la volonté de tout normer, tout réguler, tout aseptiser, nous conduisent vers un football sans âme, un sport professionnel déconnecté du réel où désormais, ne comptent plus que le fric, la performance sportive, et l’influence de pays qui font de la géopolitique sportive. Adrien Rabiot et sa mère n’ont subi rien d’autre que ce qu’ont toujours vécu des milliers de joueurs avant eux. Si un chant peut les traumatiser, alors peut-être ont-ils choisi le mauvais métier.
Et puis, arrêtons les faux-semblants : le football, c’est aussi la ferveur, l’excès, la rivalité. Ce ne sont pas les chants ni les insultes ou quelques bagarres d’ivrognes qui tuent le football, c’est l’uniformisation, la police de la pensée, la fin des stades champêtre. Ce sont les millions du Qatar ou des Emirats, la prise de contrôle des clubs et des instances du football par des milliardaires sans attache avec les clubs. Ce sont les tarifs prohibitifs qui ont chassé les classes populaires des enceintes. Les horaires de match scandaleux pour les fans. La multiplication des compétitions par appât du gain. Les interdictions de stade pour rien. Les supporteurs, les amoureux de leurs clubs, traités comme des animaux à chaque rencontre.
Si l’on veut un sport lisse, sans bruit, sans cris, sans passion, alors autant programmer des matchs à huis clos et remplacer les supporters par des hologrammes.
Le football ne doit pas devenir une zone aseptisée où la moindre critique déclenche une cellule psychologique. Il doit rester ce qu’il a toujours été : un espace de liberté, d’excès, de passion. Et tant pis si cela déplaît aux chantres du politiquement correct.
YV
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2 réponses à “Affaire Rabiot (OM-PSG) : le sport professionnel est-il devenu un monde aseptisé de fragiles ?”
Désolé, je ne vous suis pas : qu’on m’insulte moi, c’est une chose, qu’on s’en prenne à ma famille, là, le sang coule. Pas besoin des tribunaux.
Parole de corse.
Désolé aussi mais là les pseudos parisiens ont été trop loin pour le famille de Rabiot . Sur le reste je suis d’ accord . Merci .