Un scandale éclabousse le Democratic Unionist Party (DUP) en Irlande du Nord. Ian McLaughlin, conseiller municipal à Belfast, se retrouve sous le feu des projecteurs après la révélation de son ancienne co-propriété d’un club social, le Heather Street Club, situé dans le quartier loyaliste de Shankill. Fermé en 2018 après une descente de police, ce club servait de repère pour la vente de drogues par l’Ulster Defence Association (UDA) et abritait des réunions clandestines de la bande criminelle.
Si McLaughlin clame avoir rompu tout lien avec l’établissement dès 2017, son nom figure toujours sur le registre foncier. Une situation qui, bien que ne l’impliquant pas directement dans des activités illégales, fait tache pour un élu membre du partenariat de sécurité publique de Belfast, en lien direct avec la police locale.
Un club sous influence paramilitaire
L’affaire met en lumière les liens troubles entre certains cercles loyalistes et des réseaux criminels. Le Heather Street Club, géré par plusieurs figures de l’UDA de Belfast-Ouest, était un véritable empire de la drogue où se revendaient cocaïne et ecstasy à des centaines de clients lors de raves illégales.
Les chiffres donnent le vertige : près de 40 000 £ de revenus mensuels, un club qui ouvrait du vendredi 13h au lundi matin 6h, sans interruption. L’impunité totale avec laquelle l’établissement fonctionnait a fini par précipiter sa chute. En 2018, la Paramilitary Crime Task Force (PCTF), chargée de lutter contre le crime organisé en Irlande du Nord, perquisitionne les lieux à deux reprises en quatre mois. Résultat : saisie de plus de 8 000 £ en liquide, arrestations et fermeture définitive du club sur ordre de la Haute Cour.
Parmi les hommes-clés de ce réseau, on retrouve notamment Stevie McLaughlin (sans lien avec Ian McLaughlin), DJ du club et trafiquant notoire, qui empochait 1 000 £ par week-end pour la vente de drogue. Condamné à un an de prison en 2018, il incarnait la facette la plus visible d’un système lucratif aux ramifications multiples.
Un conseiller DUP pris dans la tourmente
Si aucune preuve ne relie Ian McLaughlin à ces activités criminelles, la découverte de son nom sur les documents officiels de propriété du club suscite un malaise, notamment au sein de la communauté loyaliste.
De son côté, McLaughlin affirme qu’il avait résilié ses liens avec l’établissement en 2017 et que son nom aurait dû être retiré du registre foncier à cette époque. Il assure aujourd’hui avoir demandé à son avocat de corriger cette « erreur administrative ».
Mais son passé refait également surface. Avant son engagement politique avec le DUP, McLaughlin était lié à l’Ulster Political Research Group (UPRG), ex-branche politique de l’UDA. Ce groupe, désormais dissous, avait été épinglé pour ses propos injurieux et attaques en ligne sur les réseaux sociaux, notamment via un compte Twitter aujourd’hui disparu.
Heather Street : un club à la réputation sulfureuse
Le Heather Street Club ne se limitait pas à la vente de drogue. Il était un bastion de l’UDA, un lieu de réunions clandestines où se prenaient des décisions stratégiques pour l’organisation paramilitaire. Jim Spence, ancien chef de la B Company de l’UDA, en était le « gérant officiel », même s’il ne servait jamais les clients. Une manœuvre évidente pour blanchir des sommes d’argent conséquentes.
Mais la violence n’était jamais loin. Le club servait également de tribunal interne pour les « punitions » infligées à ceux qui enfreignaient le code criminel de l’UDA. Des passages à tabac y étaient régulièrement pratiqués, à l’image de l’attaque brutale en 2015 contre un survivant d’abus sexuels, venu réclamer justice auprès de l’UDA.
L’établissement est également tristement célèbre pour son lien avec l’un des meurtres les plus odieux des Troubles nord-irlandais. En 1994, Sean Monaghan, un jeune catholique de 20 ans, est enlevé et torturé avant d’être exécuté à bout portant par des hommes de l’UDA, après avoir été signalé au Heather Street Club.
La révélation de l’implication indirecte d’un élu DUP dans ce scandale soulève plusieurs interrogations. Même s’il ne fait l’objet d’aucune accusation, ce dossier rappelle combien les ramifications entre politique, crime organisé et paramilitarisme restent un sujet sensible en Irlande du Nord.