Le crépuscule de l’Auld Alliance : la fin d’un pacte historique entre la France et l’Écosse

A quelques semaines du match des 6 nations entre la France et l’Ecosse, évoquons l’Auld Alliance, qui scella une alliance entre la France et l’Ecosse aux 13-16ème siècle, avant de prendre fin, du fait de changements profonds.

L’Auld Alliance, qu’est ce que c’est ?

L’Auld Alliance (ou Vieille Alliance) désigne une alliance militaire et diplomatique conclue entre le royaume de France et le royaume d’Écosse contre leur ennemi commun, l’Angleterre. Cette alliance, qui débuta en 1295 et se prolongea sous différentes formes jusqu’au XVIIIe siècle, fut l’un des traités les plus anciens de l’histoire européenne.

L’Auld Alliance naît en 1295, sous le règne de Jean Balliol, roi d’Écosse, et du roi de France Philippe IV le Bel. À cette époque, l’Angleterre d’Édouard Ier tente d’assujettir l’Écosse, ce qui pousse les Écossais à rechercher un appui auprès de la France, alors en conflit avec l’Angleterre.

Le traité de 1295 stipule que si l’un des deux royaumes est attaqué par l’Angleterre, l’autre doit intervenir militairement en soutien. Ce pacte s’inscrit dans le contexte plus large de la rivalité franco-anglaise, notamment durant la Guerre de Cent Ans (1337-1453).

L’Auld Alliance ne se limite pas à un simple accord diplomatique : Les Écossais combattent aux côtés des Français dans plusieurs conflits, notamment lors de la bataille de Baugé en 1421, où ils infligent une sévère défaite aux Anglais. Les Écossais bénéficient en France de privilèges commerciaux et d’une protection particulière, notamment par des décrets royaux qui leur permettent de s’installer et de commercer librement. En retour, des soldats français sont envoyés en Écosse lorsque celle-ci est menacée par l’Angleterre. L’alliance se renforce par des unions royales, comme le mariage de Marie Stuart, reine d’Écosse, avec François II de France en 1558.

Mais cette alliance a connu son crépuscule entre 1558 et 1561, au terme d’une période de tensions politiques et religieuses intenses. Une étude d’Éric Durot met en lumière comment les ambitions dynastiques et géopolitiques des souverains français, combinées aux mutations religieuses en Écosse, ont conduit à la dissolution progressive de cette alliance séculaire.

Une alliance sous pression

Depuis le XIVe siècle, l’Auld Alliance liait la France et l’Écosse dans une opposition commune à l’Angleterre. Cependant, au XVIe siècle, cette alliance s’est retrouvée fragilisée par les tensions religieuses et la montée de l’influence anglaise. En 1558, Marie Stuart, reine d’Écosse, épouse François, dauphin de France. Ce mariage renforce le lien entre les deux nations, mais suscite aussi l’inquiétude de l’Angleterre, car Marie Stuart revendique la couronne anglaise contre Élisabeth Iʳᵉ.

Lorsque François II monte sur le trône de France en 1559, les Guises, famille influente et fervents catholiques, prennent en main la politique étrangère du royaume. Ils cherchent à consolider l’autorité française en Écosse en soutenant Marie de Guise, la mère de Marie Stuart, alors régente d’Écosse. Cependant, cette ingérence est mal perçue par une partie de la noblesse écossaise, notamment les Lords of the Congregation, des protestants menés par John Knox, qui rejettent l’influence française et aspirent à un rapprochement avec l’Angleterre.

Une rupture politique et religieuse

Les années 1559-1560 sont marquées par une montée des tensions en Écosse. La régente Marie de Guise doit faire face à une insurrection protestante soutenue par l’Angleterre d’Élisabeth Iʳᵉ. Le conflit entre les factions catholiques pro-françaises et les protestants pro-anglais s’intensifie, poussant les troupes françaises à intervenir militairement pour défendre l’autorité de la régente.

Cependant, le soutien de la France s’affaiblit avec la mort de François II en décembre 1560. Marie Stuart, désormais veuve, doit retourner en Écosse en 1561. Privée de son soutien français et confrontée à une noblesse écossaise largement acquise au protestantisme, elle est contrainte d’accepter la Réforme écossaise et la domination des Lords of the Congregation. Ce basculement marque la fin de l’Auld Alliance : l’Écosse se détourne de la France pour s’aligner progressivement sur l’Angleterre.

Un tournant géopolitique en Europe

La dissolution de l’Auld Alliance s’inscrit dans un contexte plus large de transformations géopolitiques. La paix du Cateau-Cambrésis signée en 1559 entre la France et l’Angleterre met fin aux guerres entre ces deux puissances et affaiblit la position française en Écosse. Dans le même temps, la Réforme protestante bouleverse les équilibres religieux et politiques en Europe, accentuant l’opposition entre catholiques et protestants.

Le renversement d’alliance de l’Écosse illustre ainsi une évolution majeure du XVIe siècle : la fin de l’unité chrétienne et le début d’un monde où les rivalités religieuses s’entremêlent aux ambitions politiques.

Le crépuscule de l’Auld Alliance symbolise la fin d’un modèle médiéval d’alliances fondées sur l’opposition traditionnelle entre France et Angleterre. Désormais, les dynamiques géopolitiques s’articulent autour de la division religieuse et de la montée en puissance des États-nations modernes. La France perd son influence en Écosse, tandis que l’Angleterre assoit progressivement son hégémonie sur l’île britannique.

Marie Stuart, figure tragique de cette période, incarne cet échec : après avoir tenté de préserver l’héritage franco-écossais, elle finit emprisonnée puis exécutée en 1587 sur ordre d’Élisabeth Iʳᵉ. Le rêve d’une Écosse catholique alliée à la France s’éteint, laissant place à une nouvelle ère politique dominée par la montée du protestantisme et l’affirmation de l’Angleterre comme puissance dominante en Grande-Bretagne.

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches rédigée par la rédaction de breizh-info.com, parfois avec l’aide d’une Intelligence artificielle (correction, mise en forme). Dépêche libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

Cet article vous a plu, intrigué, ou révolté ?

PARTAGEZ L'ARTICLE POUR SOUTENIR BREIZH INFO

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

ARTICLES EN LIEN OU SIMILAIRES

Sociétal

Arrogance et virulence de l’Algérie vis à vis de la France : Vers une remise en question des accords de 1968 ? [La Conférence de presse de Bayrou]

Découvrir l'article

Economie, Santé, Social

Protection sociale en France : un système contesté et un besoin de réforme exprimé par les Français

Découvrir l'article

International

Michael Collins et l’Écosse : un lien méconnu mais stratégique

Découvrir l'article

Rugby, Sport

Tournoi des 6 Nations : l’Irlande en route vers le Grand Chelem, l’Angleterre renverse l’Écosse, la France écrase l’Italie

Découvrir l'article

Animaux

Chiens dits dangereux : quelles règles en France ?

Découvrir l'article

Rugby, Sport

Tournoi des Six Nations : L’Irlande pour confirmer, le choc entre l’Angleterre et l’Ecosse…La présentation de la troisième journée [+ Pronostics]

Découvrir l'article

Crypto, Economie

Cryptomonnaies : la France en pleine révolution numérique avec une hausse de 125 % des détenteurs en cinq ans

Découvrir l'article

Sociétal

L’intelligence artificielle en France : adoption, usages et inquiétudes

Découvrir l'article

Sociétal, Tribune libre

« La France aux Français » : La fumisterie du droit du sol et l’imposture de l’assimilation

Découvrir l'article

A La Une, Economie

Expatriation et fiscalité : « J’ai fui le racket français pour retrouver ma liberté aux États-Unis ». Un ancien entrepreneur témoigne

Découvrir l'article

PARTICIPEZ AU COMBAT POUR LA RÉINFORMATION !

Faites un don et soutenez la diversité journalistique.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur Breizh Info. Si vous continuez à utiliser le site, nous supposerons que vous êtes d'accord.

Clicky