Dans un article publié dans les colonnes du Times, l’historien britannique Niall Ferguson, professeur à l’Université de Harvard et spécialiste des relations internationales, propose une analyse saisissante des cent premiers jours de la présidence de Donald Trump, qu’il compare audacieusement aux fameux « First 100 Days » de Franklin Delano Roosevelt (FDR) en 1933. Intitulé « Trump’s New Deal: 100 days to reverse the legacy of FDR », l’article met en lumière la volonté de Trump non seulement de gouverner par décrets mais aussi de déconstruire l’héritage même du New Deal, pierre angulaire de l’État fédéral moderne américain.
FDR et les cent jours qui ont redéfini l’Amérique
En mars 1933, au moment où les États-Unis amorcent une phase de récupération après la Grande Dépression, Franklin D. Roosevelt prend ses fonctions dans un pays encore fragile sur le plan économique et social. Son discours inaugural parle de « consécration nationale », mais il s’attèle immédiatement à une transformation radicale du rôle du gouvernement fédéral. En l’espace de cent jours, FDR fait adopter 15 lois majeures, exploitant sa large majorité parlementaire au Congrès, ce qui lui permet de mettre en œuvre rapidement son programme de réformes. Parmi ces mesures figurent l’Emergency Banking Act, visant à stabiliser le système bancaire, ainsi que la création de programmes emblématiques comme la Tennessee Valley Authority ou la Social Security Act (en 1935), ancêtre de la retraite par répartition américaine.
Ces réformes posent les fondations de l’État-providence moderne aux États-Unis, avec l’extension des agences fédérales et une intervention accrue de l’État dans l’économie. FDR a également posé les jalons d’institutions qui aujourd’hui semblent incontournables comme la Securities and Exchange Commission (SEC) et la Federal Communications Commission (FCC).
Trump 2.0 : un New Deal inversé ?
Niall Ferguson avance que Trump, lors de son deuxième mandat, apparaît animé par un objectif diamétralement opposé : démanteler l’œuvre de FDR. Loin de vouloir renforcer l’appareil fédéral, Trump cherche à le réduire drastiquement. En seulement dix jours, il a signé 64 décrets exécutifs, un record en passe de dépasser les 99 décrets de FDR sur ses cent premiers jours. Parmi ces mesures, il y a la suppression des programmes de Diversité, Équité et Inclusion (DEI), mettant fin à plus de soixante ans de politiques d’action positive. Il instaure également un gel des embauches dans la fonction publique, met fin au télétravail et réduit les régulations fédérales. De plus, Trump ne crée qu’un seul nouvel organisme, le Department of Government Efficiency (Doge), chargé de réduire la bureaucratie en favorisant la numérisation des procédures.
Trump ne se contente pas d’alléger l’administration : il entend réécrire les règles du jeu politique. Il s’attaque à la « judiciarisation » de la politique fédérale en limitant l’influence du Department of Justice dans les affaires le concernant, et en s’opposant frontalement aux médias traditionnels et aux syndicats de la fonction publique.
Parallèles et divergences historiques
Ferguson note des similitudes troublantes entre les deux présidents. Comme FDR avec ses célèbres « fireside chats » radiophoniques, Trump utilise sa plateforme Truth Social et les autres réseaux sociaux pour mobiliser directement son électorat. Tous deux ont fait face à des oppositions féroces : Roosevelt à la Cour suprême et aux républicains isolationnistes ; Trump aux tribunaux fédéraux et aux médias dominants.
Cependant, les contextes diffèrent radicalement. Roosevelt prend les rênes d’une nation en phase de récupération après la crise économique de 1929. Trump, lui, revient au pouvoir après une période de croissance post-pandémique. FDR démarre son mandat avec des majorités confortables au Congrès, ce qui facilite l’adoption de ses réformes. De son côté, Trump doit composer avec un paysage politique polarisé, mais il bénéficie d’un soutien solide au sein de son propre parti, ce qui lui permet de mener des réformes ambitieuses en dépit d’une avance en sièges très courte.
Sur le plan international, FDR était un isolé, réduisant les dépenses militaires et restant en retrait des affaires mondiales jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Trump, en revanche, adopte une posture agressive, affichant une diplomatie imprévisible, entre confrontation avec la Chine et l’Iran, et provocations à l’égard de dirigeants alliés.
Une présidence marquée par l’imprévu
Ferguson cite Henry Kissinger pour souligner que la politique étrangère américaine n’est souvent qu’une succession d’actions sans cohérence stratégique claire. De même, Trump pourrait laisser une empreinte durable non pas grâce à une vision précise, mais par les conséquences inattendues de ses décisions.
À l’image de FDR, dont l’héritage est davantage associé à son rôle pendant la Seconde Guerre mondiale qu’à l’efficacité économique du New Deal, Trump pourrait être jugé à l’aune des crises qu’il traversera plutôt qu’à ses réformes initiales. Reste à savoir si cette frénésie réformatrice conduira à un renouveau durable ou à des bouleversements aux conséquences imprévisibles.
Ce parallèle historique fascinant, dressé par Niall Ferguson, nous rappelle que la politique américaine est un éternel balancier entre construction et déconstruction. Et que l’histoire, souvent, rime avec ironie.
Balbino Katz
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5 réponses à “« Trump’s New Deal: 100 days to reverse the legacy of FDR » : quand l’histoire bouscule la politique américaine”
Une chose est sûre c’est que contrairement à Biden qui s’enfonce dans un anonymat mérité, TRUMP va marque l’Histoire de son empreinte.
Et là, nous n’en sommes même pas à son premier mois de gouvernance !
Et déjà ça tangue de tous les cotés !!!…
Gaï de Ropraz Il avait promis de s’attaquer aux terroristes, hier un drone a balance 2 missiles dans une grotte en Somalie eliminant un nombre inconnu de chefs de ISIS. Le premier missile etait a effet soufflant brulant tout sur son passage et eliminant l’oxygene et le second a ni plus ni moins fait que sceller l’entree.
Comparer Donald John Trump a FDR il faut oser… FDR etait un communiste qui avait pour conseiller prive un agent sovietique: Alger Hiss. Il a fait jeter des milliards de lait dans les rivieres pour proteger les prix. Pareil pour la volaille et pour le porc car ses donateurs etaient souvent des industriels de l’agro-alimentaire. Trump lui fait tout pour proteger son peuple.
https://www.cia.gov/resources/csi/static/alger-hiss-lookingglass-wars.pdf
Il pourrait être bien plus difficile de sortir de l’Etat-providence que d’y entrer ! L’abandon des programmes d’inclusion pourrait faire l’effet d’un barrage qui se rompt en plongeant des millions d’inadaptés dans la précarité ou l’incertitude du lendemain. Quatre ans de mandat paraissent peu pour une transition sans trop de vaisselle cassée. p
Pschitt
Regardez donc ce qu’il a accompli en 13 jours seulement. Les accidents d’avion de ces 5 derniers jours sont les consequenses de ce programme. Les operateurs de tour de controle ou les mecaniciens charges de reparation n’etait pas competent. Plus de mille controleurs plus que qualifies se sont vus refuser le travail parce que blanc (ordre d’obama en 2008). Et pour info, le president du Panama a courbe l’echine devant Trump. (Video sur X en espagnol sous-titre en analgais)
https://twitter.com/i/status/1886188707377741904