La Chambre régionale des comptes de Bretagne a récemment publié un rapport détaillé sur la gestion de la commune de Morlaix, couvrant les exercices 2018 à 2022. Ce document met en lumière les défis majeurs auxquels la ville fait face, notamment en termes de gouvernance, de gestion patrimoniale et de finances publiques. Retour sur les principaux points d’un constat préoccupant.
Une ville au patrimoine riche mais sous pression
Morlaix, connue pour son patrimoine historique remarquable, possède 23 monuments inscrits ou classés, témoins de son passé prestigieux. Toutefois, cette richesse patrimoniale impose des contraintes financières et réglementaires importantes, notamment pour les biens situés en zone inondable. Malgré des efforts pour valoriser ces atouts, la ville peine à transformer ce potentiel en levier touristique et économique durable.
Le programme « Action cœur de ville », initié en 2018, visait à revitaliser le centre historique de Morlaix. Bien que certaines opérations aient avancé, comme la réhabilitation du musée des Jacobins, le rapport souligne des dépassements de coûts significatifs et une gestion parfois hasardeuse. À titre d’exemple, le projet de la plateforme culturelle La Virgule a vu son budget exploser de 1 à 1,56 million d’euros, sans anticipation des charges de fonctionnement.
Une situation financière inquiétante
Le rapport met en évidence une dégradation continue des finances municipales. Entre la stagnation des ressources fiscales, l’augmentation des charges de gestion et une politique d’endettement intensive pour financer les investissements, Morlaix se retrouve dans une situation budgétaire critique. En 2022, l’endettement communal atteignait des niveaux proches de l’insoutenable.
La commune a également supporté des charges de centralité élevées pendant des années, assumant des équipements et services qui bénéficient à l’ensemble de l’agglomération. Ce n’est qu’en 2023 que le transfert de certains équipements, tels que le musée des Jacobins et le théâtre, à la communauté d’agglomération a été acté. La Chambre déplore ce retard, qui aurait pu alléger plus tôt le fardeau financier de Morlaix.
Gouvernance et gestion des associations sous surveillance
Sur le plan de la gouvernance, le rapport souligne des manquements dans la publicité des délibérations et la gestion des délégations de pouvoir. Ces irrégularités fragilisent juridiquement certaines décisions municipales.
Les relations avec les associations ont également attiré l’attention des magistrats financiers. Des subventions importantes sont attribuées sans règles d’attribution formalisées, et les contributions en nature ne sont pas systématiquement valorisées dans les comptes. En particulier, la gestion de l’association La Récré, impliquée dans un service public, pose question quant au respect des règles de la commande publique.
Recommandations pour un avenir soutenable
Pour remédier à ces failles, la Chambre régionale des comptes formule plusieurs recommandations, parmi lesquelles :
- Définir une stratégie claire de gestion du patrimoine bâti pour optimiser les investissements et prioriser les rénovations.
- Renforcer la transparence et la légalité des relations avec les associations, notamment en sécurisant les conventions.
- Adopter une trajectoire budgétaire réaliste, en maîtrisant les dépenses et en définissant un plafond d’endettement soutenable.
Une ville à la croisée des chemins
Le rapport met en lumière le paradoxe de Morlaix : une ville riche de son histoire et de son patrimoine, mais entravée par des choix de gestion discutables et des finances publiques fragilisées. Alors que le transfert d’équipements à l’agglomération pourrait offrir un répit, la commune doit impérativement repenser ses priorités et sa gouvernance pour retrouver une stabilité financière et préserver son attractivité.
Morlaix, emblématique de ces villes moyennes en quête de renouveau, est à la croisée des chemins. Sa capacité à transformer ses défis en opportunités sera déterminante pour son avenir
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