La question de l’entretien des ponts en France est devenue une priorité. Un récent rapport du Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) dresse un constat préoccupant : un quart des 63 180 ponts étudiés sont en mauvais état, et 5 % nécessitent des interventions d’urgence pour éviter des drames similaires.
Des infrastructures vieillissantes sous-financées
Le vieillissement des ouvrages et un entretien insuffisant sont à l’origine de cette dégradation. Le Cerema estime qu’environ 10 000 ponts communaux nécessitent une remise en état. Parmi eux, 400 ponts ont déjà été fermés et 1 500 autres ont vu leur tonnage limité. Cependant, ces mesures ponctuelles ne suffisent pas à résoudre un problème qui concerne de nombreuses petites communes souvent mal équipées pour gérer leurs infrastructures.
Le coût estimé pour remettre ces ponts en état s’élève à 3,3 milliards d’euros, dont 740 millions pour des actions immédiates. Mais les moyens financiers engagés par l’État restent largement en deçà des besoins, comme le souligne Hervé Maurey, coauteur du rapport sénatorial de 2019 intitulé « Sécurité des ponts : éviter un drame ». Ce dernier déplore l’absence d’un véritable plan Marshall pour les ponts, malgré l’urgence de la situation.
Des préconisations souvent ignorées
Le Programme national ponts (PNP), lancé en 2020, a permis d’auditer des milliers de ponts. Toutefois, de nombreuses recommandations émises par les experts restent non contraignantes et ne sont pas toujours suivies. Par exemple, sur une liste de 24 ponts jugés dangereux, sept étaient encore ouverts à la circulation en octobre 2024, malgré des risques avérés. Les maires invoquent souvent des contraintes financières ou la nécessité de maintenir les connexions locales comme justification.
Les petites communes, particulièrement celles de moins de 10 000 habitants, sont les plus touchées. Le Cerema a distribué un « carnet de santé » à ces collectivités pour les aider à suivre l’état de leurs ponts, mais beaucoup peinent à mettre en œuvre les mesures nécessaires. À cela s’ajoutent des difficultés administratives pour accéder aux financements du PNP.
Face à l’ampleur des besoins, les moyens actuels semblent insuffisants pour garantir la sécurité des usagers. En attendant une mobilisation politique et budgétaire à la hauteur des enjeux, les ponts français restent exposés à des risques potentiellement tragiques.
Faut-il attendre un drame pour que ça bouge ?
Illustration : DR
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