L’Organisation de Producteurs Les Pêcheurs de Bretagne (LPDB) a récemment tiré la sonnette d’alarme à l’approche du Conseil des Ministres européens (9-10 décembre) qui définira les Totaux Admissibles de Capture (TAC) et les quotas pour 2025. Dans un communiqué de presse, l’organisation met en lumière les dangers que ces politiques actuelles font peser non seulement sur la filière pêche, mais également sur la biodiversité.
Des quotas sous-utilisés : une réalité trompeuse
Un argument souvent avancé par les détracteurs des révisions des quotas est que certains restent inexploités. Cependant, LPDB précise que cette sous-utilisation résulte de plusieurs facteurs :
- Non-rentabilité économique : Certaines espèces, bien que disponibles, ne sont pas rentables à commercialiser.
- Manque de capacités : Certaines pêcheries, comme les chalutiers hauturiers ciblant la lotte, ne disposent plus des moyens matériels suffisants.
- Réglementations restrictives : Des quotas abondants pour des espèces profondes restent inaccessibles en raison de réglementations strictes.
- Interaction des pêcheries mixtes : Dans ces cas, la capture limitée de certaines espèces impacte l’exploitation d’autres quotas pourtant disponibles.
- Préparation aux baisses futures : La conservation de quotas sous-utilisés peut servir de tampon en cas de réductions drastiques les années suivantes.
Des politiques basées sur des analyses biaisées
LPDB dénonce un système de fixation des quotas reposant principalement sur des avis scientifiques, souvent entachés d’incertitudes. Un exemple marquant est celui du chinchard, dont le TAC a chuté de 75 % en 2023, pour ensuite être jugé exagéré par les scientifiques deux ans plus tard. Cette approche punitive et précautionneuse, selon l’organisation, ne tient pas compte de la réalité économique des entreprises.
Les pêcheurs bretons pointent également du doigt l’iniquité de ces mesures. Alors que la pêche française est parmi les plus durables au monde, elle subit une pression croissante qui met en péril tout un secteur.
Révision nécessaire des méthodologies de gestion
LPDB propose une révision pragmatique des modalités de gestion des quotas, articulée autour de trois axes majeurs :
- Révision des méthodologies : La prise en compte des marges d’incertitudes scientifiques et des réalités du terrain est indispensable. Par exemple, le retour du thon rouge sur les zones de pêche pourrait permettre des prises accessoires, réduisant ainsi la pression sur d’autres espèces.
- Souplesse réglementaire : Les quotas doivent pouvoir s’adapter aux variations des stocks et à leur répartition géographique, souvent influencées par des facteurs tels que le réchauffement climatique et l’acidification des océans.
- Planification à long terme : Les décisions prises à la dernière minute, souvent drastiques, empêchent toute projection économique et découragent les jeunes générations de s’engager dans ce métier.
Un système en crise : la voix des professionnels
Yves Foëzon, directeur de LPDB, appelle à une gestion plus équilibrée et durable : « Les pêcheurs veulent pouvoir pratiquer leur métier dans des conditions justes et cesser d’être la variable d’ajustement des politiques environnementales. »
La mise en œuvre des quotas dans un cadre trop rigide freine le dynamisme de la filière. Cette situation est aggravée par les baisses drastiques imposées d’une année sur l’autre, qui réduisent les marges de manœuvre des entreprises.
LPDB demande aux autorités françaises et européennes de repenser le système actuel de TACs et quotas pour préserver la pêche bretonne et les écosystèmes marins. L’organisation insiste sur la nécessité d’un équilibre entre durabilité écologique et viabilité économique. Faute de quoi, c’est l’avenir même de ce secteur stratégique pour la Bretagne qui est en jeu. Cet appel à l’action résonne comme une urgence, à quelques jours des décisions cruciales qui pourraient redéfinir l’avenir de la pêche bretonne.
Illustration : DR
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