Une proposition de loi visant à « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur », déposée par les sénateurs Laurent Duplomb et Franck Menonville, suscite une vive opposition. En cause, le possible retour des néonicotinoïdes, insecticides interdits pour leur impact désastreux sur les pollinisateurs. L’Union Nationale de l’Apiculture Française (UNAF) a exprimé une opposition catégorique à ce texte, dénonçant une régression législative aux conséquences environnementales et sanitaires graves.
Les néonicotinoïdes, une menace avérée
Les néonicotinoïdes, bannis en France depuis six ans, sont accusés de nuire gravement à la biodiversité. Selon l’UNAF, leur très haute toxicité est établie par des décennies de recherche scientifique. La Task Force on Systemic Pesticides (TFSP), un groupe d’experts indépendants, a analysé plus d’un millier d’études confirmant leurs effets délétères sur les abeilles. Ces insecticides agissent à des doses infinitésimales, perturbant le système nerveux des pollinisateurs et compromettant leur survie à long terme.
Malgré ces preuves, les sénateurs à l’origine de la proposition justifient leur démarche en dénonçant une « surtransposition » des règles européennes. Une affirmation réfutée par l’UNAF, qui rappelle que le droit européen exige le retrait de tout pesticide n’ayant pas démontré son innocuité sur les abeilles.
Une régression au bénéfice de l’agro-industrie ?
Le président de l’UNAF, Christian Pons, s’interroge : « La France est-elle prête à sacrifier la santé et l’environnement pour apaiser l’agro-industrie ? ». En effet, ce retour en arrière ne semble répondre qu’à des intérêts économiques à court terme, en contradiction avec les engagements européens visant à réduire l’usage des pesticides.
Ce texte ne se limite pas au retour des néonicotinoïdes. Il prévoit également :
- L’abolition de la séparation entre commerce et conseil en pesticides, augmentant les conflits d’intérêts.
- La réintroduction des remises commerciales, incitant à une utilisation accrue de ces produits.
- La suppression du caractère obligatoire du conseil stratégique phytosanitaire, pourtant crucial pour promouvoir des pratiques durables.
- Le transfert de pouvoir à l’exécutif pour suspendre les décisions de l’Anses, remettant en question l’indépendance de l’évaluation scientifique.
Des drones pour pulvériser les pesticides : un danger supplémentaire
La proposition de loi inclut également l’autorisation des drones pour pulvériser des pesticides. Selon l’UNAF, cette méthode, en l’absence d’étude d’impact, augmenterait les risques de dérive des produits, contaminant sols et cours d’eau. Les pollinisateurs seraient directement affectés, aggravant leur déclin.
Alors que les abeilles jouent un rôle vital dans la pollinisation et la sécurité alimentaire, ce texte pourrait anéantir des années de progrès législatif. L’UNAF appelle le Sénat à rejeter cette proposition, qu’elle qualifie de régressive et incompatible avec les enjeux environnementaux actuels.
Illustration : DR
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