Le secteur agricole britannique se prépare à une grève nationale sans précédent, prévue pour débuter le 17 novembre, en signe de protestation contre une politique fiscale du gouvernement travailliste. Les agriculteurs dénoncent une hausse de l’impôt sur les successions, qu’ils jugent dangereuse pour les exploitations familiales et pour la sécurité alimentaire du pays.
Le groupe d’activistes gallois Enough is Enough mène cette mobilisation, appelant à un arrêt d’une semaine des livraisons de produits agricoles pour montrer l’impact de cette hausse controversée sur les exploitations valorisées à plus d’un million de livres sterling, selon The Times.
Introduite par la chancelière Rachel Reeves, cette réforme prévoit une taxe de 20 % sur les fermes qualifiées, avec pour objectif de générer 520 millions de livres par an d’ici 2029. Le Trésor britannique affirme que cette mesure vise principalement les grandes exploitations, touchant un quart des fermes. Cependant, l’Union nationale des agriculteurs (NFU) estime que l’impact pourrait être bien plus important, affectant jusqu’à deux tiers des exploitations. Face à ces nouvelles exigences fiscales, de nombreux agriculteurs craignent de devoir vendre des terres, voire de fermer leurs portes.
La grève ciblera principalement les produits non périssables : viande et certaines récoltes seront retirées des rayons des supermarchés, tandis que les produits laitiers seront exemptés pour éviter le gaspillage de lait et d’œufs, rapporte Business Matters.
Tim Taylor, organisateur de la grève, explique que l’objectif est de « perturber sans pénaliser excessivement les rayons des supermarchés », cherchant ainsi à mobiliser le soutien du public sans provoquer de difficultés majeures.
En parallèle, plus de 10 000 agriculteurs se réuniront à Londres le 19 novembre pour un rassemblement et un lobbying de grande ampleur, coordonné par la NFU. Près de 2 000 agriculteurs rencontreront des députés pour exprimer leurs préoccupations.
Cette mobilisation survient dans un climat de colère, exacerbé par les propos d’un ancien conseiller du Parti travailliste. John McTernan, ex-conseiller de Tony Blair, a suggéré que les agriculteurs pourraient être traités comme les mineurs lors des grèves des années 1980 sous Margaret Thatcher. Le Premier ministre Keir Starmer a dû se distancer de ces commentaires, affirmant être en désaccord total avec McTernan.
Ce mouvement s’inscrit dans un mécontentement croissant au sein de la communauté agricole, qui se sent fragilisée par les politiques gouvernementales. En février dernier, des milliers d’agriculteurs gallois ont manifesté à Cardiff contre le Sustainable Farming Scheme (SFS) proposé par le gouvernement gallois, qui aurait imposé une conversion de 20 % de leurs terres en zones naturelles pour obtenir des subventions. Cette pression avait conduit à reporter le déploiement du SFS jusqu’en 2026.
Pourtant, Enough is Enough affirme que les nouvelles politiques du gouvernement Labour au Royaume-Uni et au pays de Galles menacent de manière continue le secteur. De nombreux agriculteurs, possédant des actifs mais disposant de peu de liquidités, risquent de ne pas pouvoir payer les taxes sans céder des terres, ce qui met en péril des traditions agricoles familiales remontant parfois à plusieurs siècles.
Gareth Wyn Jones, agriculteur gallois et participant à la grève, a confié à Business Matters que cette nouvelle politique fiscale pourrait détruire la ferme familiale qu’il exploite depuis 375 ans.
La santé mentale des agriculteurs souffre également de ces mesures, les lignes d’assistance rapportant une hausse des appels depuis l’annonce de la hausse fiscale. Une famille dans le South Yorkshire a révélé que l’un de leurs proches s’était suicidé avant l’annonce du budget pour épargner à ses enfants la charge financière de cette taxe.
Un porte-parole du gouvernement Labour a défendu la réforme, invoquant un déficit de 22 milliards de livres et affirmant que cette politique est équilibrée, permettant à la plupart des fermes de transmettre des actifs importants sans impôt. Cependant, à l’approche de l’événement organisé par la NFU le 19 novembre et des manifestations à Londres, les tensions entre les agriculteurs britanniques et le gouvernement ne montrent aucun signe d’apaisement.
Les agriculteurs se mobilisent dans ce qu’ils considèrent être un combat pour leur survie – non seulement pour leurs exploitations, mais aussi pour la sécurité alimentaire et le mode de vie rural au Royaume-Uni.
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