Nathalie Appéré et Bruno Retailleau sont d’accord pour la « mobilisation générale »

Trafic de drogue et fusillades appartiennent au décor du quartier de Maurepas, à Rennes. Les politiques font de belles phrases mais ne peuvent rien y changer. Même avec des moyens humains et matériels supplémentaires, la situation ne pourra pas s’améliorer faute de disposer d’une loi “anti-drogue“ qui neutralisera les juristes et les avocats. Mais qui, surtout, sera capable de s’attaquer à la question de l’offre, c’est-à-dire aux consommateurs ; puisque ce sont eux qui créent le trafic…

Habituellement, le personnel politique de gauche et celui de droite n’ont pas la même approche lorsqu’il est question de sécurité en général et de drogue en particulier. Le premier cultive volontiers la culture de l’excuse, tandis que le second dénonce le « laxisme judiciaire ». On en était là jusqu’à ce que la situation dans le quartier de Maurepas, à Rennes, amène Nathalie Appéré (PS), la maire, et Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur, à entonner la même chanson. Mme Appéré se met à parler comme un chef flic : « Mon état d’esprit est vraiment celui de la mobilisation générale. La police fait son travail, la justice fait son travail. Tout le monde est particulièrement investi ; ça nécessite en effet de se serrer les coudes et d’agir dans le même sens » (Ouest-France, Rennes, mardi 5 novembre 2024). Vendredi 1er novembre, quelques heures avant de rejoindre la Bretagne, le ministre avait donné son avis sur les fusillades : « Il ne faut pas découvrir le problème. On ne le découvre pas. Moi, je pense qu’on est à un point de bascule. » Et de dénoncer les auteurs de ces violences : « Aujourd’hui, les narcoracailles n’ont plus de limites ! »  Bruno Retailleau pointe l’heure du choix, selon lui, entre la « mobilisation générale » et la « mexicanisation ». Pour lui, nous avons affaire à « un combat qui prendra des années » (BFMTV-RMC, vendredi 1er novembre 2024). Donc, si on comprend bien, la « mobilisation générale » est à la mode

Evidemment, cette « mobilisation générale » ne peut pas dépasser le stade des paroles verbales. En effet, s’attaquer au trafic de drogue signifie s’attaquer à la question de l’immigration. Vaste programme ! En premier lieu, une modification de la Constitution s’imposerait – Jean-Luc Mélenchon n’y verrait pas d’inconvénient, lui qui prêche en faveur d’une VIe République. En effet, depuis la Décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 (n° 71-44 DC), la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (26 août 1789) et le préambule de la constitution de la IVe République (27 octobre 1946) ont valeur constitutionnelle. « Vu la Constitution et notamment son Préambule », déclare alors le Conseil constitutionnel. A partir de là, au fil des ans, une jurisprudence établie par ce dernier fait la part belle aux immigrés. Un exemple : la Décision du 6 juillet 2028 (n°2018-7017/718 QPC) qui affirme pour la première fois la valeur constitutionnelle du principe de fraternité issu des articles 2, 72-3 et du Préambule de la Constitution. Il en déduit l’existence de la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national. Bien entendu, la « mobilisation générale » exigerait ensuite le vote d’une loi d’exception afin de lutter efficacement contre les dealers petits et grands. Mais le Parlement n’acceptera jamais d’accoucher d’un texte contraire aux « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ». Quant au Conseil constitutionnel, il s’empresserait de censurer une loi qu’il jugerait frappée d’inconstitutionnalité – il estimera qu’elle porte atteinte à la « dignité de la personne ».

Retailleau est un spécialiste des « mesures fortes »

La droite rennaise commente la visite de Retailleau en se félicitant que le ministre se soit déplacé dans le quartier de Maurepas « pour écouter les Rennais et annoncer des mesures fortes en matière de lutte contre le narcotrafic » (Ouest-France, Rennes, mercredi 6 novembre 2024). Effectivement, Bruno Retailleau entend « mener une guerre totale contre le trafic et les narco-racailles » (Ouest-France, Ille-et-Vilaine) Pour ce faire, il annonce l’arrivée en décembre de cinq policiers qui seront affectés à la brigade spécialisée de terrain (BST) de Maurepas, afin d’être sept jours sur sept sur le terrain. Dans le genre « mesures fortes », difficile de faire mieux ! « Nous sommes très loin du compte. Nous sommes conscients que dans le cadre de restriction budgétaire, on sera très loin des soixante-dix policiers supplémentaires que nous réclamons », indique David Leveau, secrétaire régional du syndicat Unité (ex SGP-FO) qui souligne que le service stup de la division criminelle territoriale ne compte que trois policiers (Ouest-France, 2-3 novembre 2024). Bien sûr, le ministre annonce que la CRS 82, déployée à Maurepas, va être relayée par la CRS 40  afin de « rétablir l’ordre » ; cette unité de police mobile « restera le temps qu’il faudra » (Ouest-France, Ille-et-Vilaine, 2-3 novembre 2024) Tout le monde comprend que les dealers vont être dérangés dans leur business pendant quelques semaines et qu’ensuite, les affaires reprendront normalement. Les habitants en sont persuadés… « Il y a entre 30 et 35 points de deal sur Rennes. Les points sont mobiles, ils s’adaptent à la situation. Si on les harcèle, ils vont 300 m plus loin », rappelle David Leveau (Le Mensuel de Rennes, novembre 2024).

Rappelons que la loi de finances 2024 accordait, en crédits de paiement, 12,9 milliards d’euros à la Police nationale et 10,3 milliards d’euros à la Gendarmerie nationale. « Si le projet de budget 2025 envisage une hausse de près de 600 millions des crédits alloués à la sécurité, police et gendarmerie doivent déjà s’accommoder de finances très tendues. Ainsi, la gendarmerie ne verse plus les loyers de plusieurs brigades aux collectivités propriétaires des casernes, ses ressources ayant été plombées par la mobilisation durant les Jeux olympiques. » (Le Monde, dimanche 3-lundi 4 nombre 2024) C’est le cas pour la nouvelle caserne de Saint-Brévin-les-Pins, pour Bouguenais, Basse-Goulaine, Plouaret…

 Un « changement de doctrine » qui ne changera pas grand-chose

Revenons à la droite rennaise qui évoque la visite du ministre. « Nous sommes pleinement à ses côtés, pour améliorer la situation dans notre ville », explique Thomas Rousseau, secrétaire départemental des Républicains et président de « Rennes à droite ». Il souhaite « un réel changement de doctrine » de la part de la municipalité de Rennes avec « l’armement de la police municipale, le renforcement des effectifs, la mise en place de la vidéoprotection » (Ouest-France, Rennes, mercredi 6 novembre 2024) Lors du conseil municipal du 14 octobre, Nathalie Appéré avait déjà répondu à la question : « On peut choisir de réduire le spectre du débat. On peut considérer que la solution serait unique et simple : équiper les policiers municipaux d’armes létales. Nous revendiquons une approche parfaitement lucide et pragmatique : adapter les moyens municipaux aux missions de leurs agents dans le cadre des lois de notre République. Et si ce cadre devait évoluer, alors la question de leur équipement se poserait à nouveau. » (Le Mensuel de Rennes, novembre 2024) Quant aux caméras, Rennes devrait en avoir 125 hors transports en commun à la fin 2024, puis 155 en 2025. Il faut être naïf pour croire qu’en équipant les policiers municipaux d’ « armes létales », on pouvait régler la question du trafic de drogue. Seule une loi “sur mesure“ donnera les moyens à la police et à la justice de faire le ménage – comme la loi anti-mafia en Italie. Mais Retailleau n’est pas en mesure d’obtenir la modification du cadre juridique… Trop d’obstacles existent.

Bernard Morvan

Illustration : DR
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8 réponses à “Nathalie Appéré et Bruno Retailleau sont d’accord pour la « mobilisation générale »”

  1. Bert dit :

    Déchéance de nationalité française pour les binationaux délinquants.
    Comme on a fait pour les binationaux terroristes

  2. Per Manac'h dit :

    La maire de Rennes…. c’est vraiment l’hôpital qui se fout de la charité !!! Après avoir soutenu pendant des années et des années avec ses amis socialo-écolo-communiste et autres idiots utiles l’invasion migratoire dans cette belle ville de Rennes, elle vire de bord sans aucun scrupule : c’est en fait le véritable visage de la gauche et de sa branche extrême ! Quant aux belles mesures du nouveau ministre de l’intérieur français.. du vent et et de la fumée !!!

  3. Ronan dit :

    Demat, La décision n° 2018-717/718 QPC a eu lieu le 6 juillet 2018 et non en 2028 ; d’ici là, M. RETAILLEAU sera où ? L’histoire le dira mais il ne pourra, effectivement et hélas, rien faire face à un Conseil Constitutionnel dirigé par un certain Laurent Fabius responsable mais pas coupable lors de l’affaire du sang contaminé (cette affaire du sang contaminé est un scandale sanitaire, politique et financier ayant touché plusieurs pays dans les années 1980 et 1990 à la suite d’infections par transfusion sanguine). Je confirme s’il en est qu’il faudra un immense courage et beaucoup d’abnégation pour changer tout cela. Kenavo

  4. gautier dit :

    y’a de quoi se pisser dessus !! décidément Trump commence à faire trembler meme les maires de France !! attention Retailleau, elle pourrait bien demander son admission aux LR avec ce genre femmes ! tout est bon !

  5. Francesco dit :

    Faire confiance à une maire socialiste ? Autant penser que l’on pourra vider la Méditerranée avec une paille recyclable!

  6. kaélig dit :

    La Bonne-soeur Appéré serait-t’elle déniaisée face à la catastrophe insécuritaire de sa ville ?

  7. Morin dit :

    Mexicanisation ? Les trafiquants et criminels doivent être des asteques. Nos dirigeants ont la trouille de nommer les choses. Ce sont des maghrébins, mais nos élus ont la trouille de le dire.

  8. anonyme dit :

    Halte à la guerre !
    « La guerre, un massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas. » Paul Valéry.

    Aux actualités militaires télévisées les nouvelles sont mauvaises d’où qu’elles viennent. Elles nous présentent des gens ordinaires qui se font massacrer et pour ceux qui ne sont pas morts viennent de perdre définitivement tout ce qui faisait leur vie matérielle.
    Des reporters de guerre font de l’image, de l’image et encore de l’image,
    images tellement réussies qu’elles finissent par rendre la guerre, virtuelle, esthétique ou pire encore belle.
    Cette façon de présenter la guerre laisse une sensation désagréable, insupportable où il manque
    le fracas épouvantable des bombardements qui obligent les bombardés à se terrer, les hurlements des blessés, les gémissements et les râles des mourants, le mutisme des enfants survivants terrorisés et traumatisés à vie,
    le constat de la perte de toute dignité humaine quand l’odeur, le goût de la mer.., de la pi…, du sang et de la mort se mêlent et oppressent les pauvres créatures que sont devenues les gens normaux
    le toucher, quand dans l’obscurité les poils se hérissent, le sang se glace et les corps ne sont plus que tremblements
    les souffrances physiques et morales de pauvres êtres sans défense à qui il ne reste d’autre échappatoire que la folie.
    Oui, c’est tout cela qui manque. Tout ce qui ferait haïr la guerre.Toutes ces horreurs que les victimes n’oublieront plus, qui hanteront leurs nuits à jamais et dont elles ne parleront pas tant elles sont incompréhensibles pour ceux qui ne les ont pas vécues ;
    voila ce que les va-t-en-guerre bonimenteurs, bercés de l’illusion que parce qu’élites il ne leur arrivera rien de désagréable quoiqu’il se passe, se gardent bien de promettre et c’est pourtant le devenir ceux qui les croient.
    Aux actualités du Moyen-Orient, le nombre de chefs dégommés par l’autre camp alors qu’ils étaient bien planqués et en sécurité interpelle. Les lois de la guerre auraient-elles changé ? Les qui ne sont rien, qui n’ont aucun exil doré où aller ne seraient-ils plus les seuls à payer ?

    Une dédicace au belliciste ex époux d’Eka Zgouladze qui se voit en Président de le République grand chef de guerre ainsi qu’à celui qui signe un traité de paix et s’amuse ensuite à raconter dans la presse qu’il n’a jamais eu l’intention de le respecter. Il s’agissait simplement de faire gagner du temps à l’un des belligérants pour s’armer.
    La complainte du Roi Renaud par Yves Montand.

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