La commémoration des événements historiques n’est pas une tâche aisée à l’ère de l’instantanéité. Dans un monde où tout va vite, où l’on consomme informations et expériences à la chaîne, prendre le temps de se souvenir peut sembler anachronique. Pourtant, certains moments du passé méritent que l’on s’y attarde, car ils portent en eux des leçons intemporelles. La Révolution hongroise de 1956 est l’un de ces jalons historiques qui, 68 ans plus tard, continue d’inspirer et de rappeler l’importance de la liberté.
Un soulèvement national pour la liberté
Le 23 octobre 1956, le peuple hongrois s’est uni dans un élan sans précédent. Jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, ouvriers, intellectuels, paysans et soldats partageaient un même désir : la liberté pour la Hongrie. Après des années de répression sous le joug soviétique et le régime communiste local, la nation s’est levée pour réclamer son indépendance et mettre fin à la terreur.
Ces jeunes, qui avaient vécu les horreurs de la Seconde Guerre mondiale, les bombardements, les exactions, et la destruction de Budapest, espéraient enfin un avenir meilleur. Mais l’espoir né en 1945 fut rapidement étouffé par l’installation d’un État policier contrôlé par l’URSS et ses alliés hongrois. Entre 1945 et 1956, près de 400 personnes furent exécutées pour des raisons politiques, et un tiers de la population adulte subit des poursuites officielles.
Le déclenchement de la Révolution
Tout commença par une manifestation étudiante prévue pour quelques centaines de personnes. Le 23 octobre, les étudiants de l’Université technique furent rejoints par ceux des universités agricoles et horticoles, puis par des étudiants militaires et médicaux. Rapidement, des milliers, puis des centaines de milliers de Hongrois se joignirent au cortège, arrêtant même le trafic des tramways de Budapest.
Contrairement aux soulèvements de Berlin en 1953 ou de Poznań en 1956, les Hongrois ne protestaient pas seulement contre des abus ou des privations. Ils rejetaient le système communiste lui-même et l’occupation étrangère qui avait volé leur liberté. Leur soulèvement était spontané, audacieux et animé par un désir profond de liberté nationale.
Une répression brutale mais un héritage durable
Le 4 novembre 1956, l’armée soviétique lança une offensive massive contre la Hongrie, déployant 2 500 chars, 800 véhicules blindés et 600 canons anti-aériens. Bien que la résistance armée ait duré une semaine supplémentaire, la révolte fut écrasée. Les pertes furent lourdes : près de 20 000 insurgés blessés, environ 2 700 morts et 200 000 personnes forcées à l’exil.
Cependant, la brutalité de la répression ne put effacer l’impact mondial de la Révolution hongroise. Elle révéla au monde le véritable visage du communisme soviétique et inspira des mouvements de liberté à travers le globe. Comme l’a dit Milovan Djilas, « La Révolution hongroise fut le début de la fin du communisme. »
L’unité d’une nation face à l’oppression
Pendant ces 13 jours de liberté, le peuple hongrois montra au monde ce que signifiait l’unité nationale. Sans distinction de religion, de classe ou d’opinion politique, tous se levèrent contre un ennemi commun. Ils étaient fatigués des promesses utopiques non tenues, de la terreur omniprésente, et des attaques incessantes contre leur identité nationale et culturelle.
Les jeunes insurgés, souvent à peine capables de porter un fusil, combattirent avec une détermination farouche. Des figures comme Erika Szeles, une jeune fille de 15 ans tuée au combat, devinrent des symboles de ce courage. Leur lutte n’était pas seulement pour eux-mêmes, mais pour la dignité humaine et la survie de leur nation.
Un message pour les générations futures
Aujourd’hui, alors que le monde est confronté à de nouveaux défis, l’héritage de la Révolution hongroise de 1956 reste pertinent. Elle nous rappelle que la quête de liberté et d’indépendance est universelle et intemporelle. Elle souligne l’importance de l’unité nationale face à l’oppression et la nécessité de défendre nos valeurs fondamentales. Elle témoigne de l’horreur du communisme dont certains se réclament aujourd’hui encore en Occident.
En commémorant ces événements, nous honorons non seulement ceux qui ont sacrifié leur vie, mais nous renforçons également notre propre engagement envers la liberté. Comme l’a écrit le poète hongrois Sándor Petőfi :
Hongrois, le nom de notre nation
Glorifiera son antique renommée ;
Alors nous effacerons toute trace
Des siècles de notre disgrâce !
La Révolution hongroise de 1956 n’a duré que quelques jours, mais son impact a été immense. Elle a démontré que même une petite nation peut défier une superpuissance lorsqu’elle est unie dans sa quête de liberté. En nous souvenant de ces événements, nous puisons dans une source inépuisable de courage et d’inspiration. Il est essentiel, dans notre monde en constante évolution, de prendre le temps de réfléchir à de tels moments historiques qui transcendent le temps et continuent de façonner notre identité collective.
Bibliographie récente :
- Kovács, M. (2021). La Révolution hongroise de 1956 : Un combat pour la liberté. Éditions du Danube.
- Nagy, I. (2019). Mémoires d’une nation en révolte. Presses de Budapest.
- Tóth, A. (2022). Les héros anonymes de 1956. Historica.
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2024, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine
2 réponses à “1956-2024 : L’héritage intemporel de la Révolution hongroise et son message pour le monde d’aujourd’hui”
Indispensable hommage aux héros de 1956 ! Hélas, le révisionnisme est à l’oeuvre et vient de haut : voir « Quand la droite hongroise saborde la mémoire de la révolution de 1956 » (Le Figaro, 23 octobre). « Quand on y réfléchit », a dit Viktor Orban, « nous ne nous sommes pas battus en 1956 parce que nous pensions que nous allions vaincre l’Union soviétique. Nous nous sommes engagés dans une révolution et un combat pour la liberté afin d’imposer un cessez-le-feu et un accord de paix. » Soit ce qu’il préconise pour l’Ukraine ! Mais l’idée du « cessez-le-feu » hongrois est absurde : le but des insurgés de 1956 n’était pas la paix (qui régnait alors en Hongrie !) mais le départ de l’armée rouge.
Comme son attitude envers l’Ukraine est en contradiction avec les valeurs de 1956, Viktor Orban a entrepris de réécrire 1956 !
Addition à mon commentaire précédent :
Heureusement, Breizh-Info s’inscrit en faux contre le révisionnisme orbanesque en écrivant : « Le 23 octobre 1956, le peuple hongrois s’est uni dans un élan sans précédent. Jeunes et moins jeunes, hommes et femmes, ouvriers, intellectuels, paysans et soldats partageaient un même désir : la liberté pour la Hongrie. Après des années de répression sous le joug soviétique et le régime communiste local, la nation s’est levée pour réclamer son indépendance et mettre fin à la terreur. » C’est l’exact inverse de ce que dit à présent Orban !