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La conspiration de Pontcallec : Un pan méconnu de l’histoire bretonne ressuscité par Hubert Allanic

Dans son nouvel ouvrage, « Les lendemains de la conspiration du marquis de Pontcallec » aux éditions du Panthéon, Hubert Allanic, ancien chef du service d’endocrinologie et diabétologie au CHU de Rennes, explore l’une des révoltes les plus marquantes et pourtant oubliées de la Bretagne : la conspiration du marquis de Pontcallec. Son livre, richement documenté, plonge dans les années 1718-1720, période où la noblesse bretonne, confrontée à une pression fiscale écrasante, se soulève contre le pouvoir royal. Motivé par un attachement personnel à l’histoire bretonne, Allanic nous éclaire sur les acteurs, les motivations et les conséquences de cette rébellion, souvent réduite à une simple anecdote historique.

Hubert Allanic va au-delà de la simple narration historique pour mettre en lumière les répercussions de la révolte bretonne sur les familles et le patrimoine des acteurs de cette insurrection. Allanic, dont rien ne prédestinait à l’écriture historique, raconte que son intérêt pour le sujet est né d’une découverte personnelle : en explorant l’histoire d’un manoir breton acquis par ses grands-parents, il découvre que l’un de ses anciens propriétaires était lié à la conspiration de Pontcallec. Ce lien familial et régional donne au livre un caractère profondément enraciné dans l’histoire de la Bretagne, qu’Allanic souhaite raviver.

L’auteur dresse un portrait précis de figures souvent négligées dans les ouvrages traditionnels. « L’histoire a totalement oublié les trois chefs d’état-major de Pontcallec, qui ont pourtant sacrifié leurs biens et leur honneur pour défendre leur province », explique-t-il. Son ouvrage cherche à redonner une place à ces hommes, soulignant l’injustice d’une mémoire collective souvent biaisée qui a laissé ces noms dans l’ombre​

Une analyse historique et critique de la figure de Pontcallec

Hubert Allanic adopte une approche critique de la figure de Pontcallec, déconstruisant le mythe qui entoure ce dernier. Il montre comment les chants populaires et le nationalisme breton ont contribué à idéaliser le marquis, le comparant à un martyr de l’identité bretonne, un « Christ portant sa croix » au moment de son exécution. Cependant, en s’appuyant sur des travaux d’historiens comme La Borderie, Allanic révèle un portrait moins flatteur : « Ce pseudo-héros, célébré par la culture populaire, était en réalité un chef autoritaire, parfois même détesté pour son attitude tyrannique envers ses propres employés. » Par cette analyse, l’auteur démontre que la mémoire bretonne est aussi une construction politique et culturelle, influencée par des figures contemporaines et des événements récents

Contexte d’une Bretagne sous pression

La Bretagne, bien que rattachée au royaume de France depuis 1532, conservait certains privilèges et un parlement autonome. Mais sous le règne de Louis XIV, les guerres coûteuses et la construction de Versailles ont poussé le roi à imposer une fiscalité excessive. Cette politique financière, aggravée par des taxes nouvelles comme celle du papier timbré, déclencha déjà en 1678 la révolte des Bonnets rouges, brutalement réprimée. Moins de quarante ans plus tard, c’est la noblesse, autrefois exempte de nombreux impôts, qui s’insurge. Hubert Allanic rappelle que « l’augmentation continue des taxes, comme le dizième et la capitation, finit par susciter une grogne générale, menant inexorablement à la conspiration du marquis de Pontcallec »​

L’origine de la conspiration : l’acte d’union des nobles bretons

Face à cette oppression, les nobles bretons se rassemblent en 1718 pour rédiger un « acte d’union ». Ce document, qualifié de « cadre de voies justes et légitimes » pour défendre les droits bretons, marque le début de l’insurrection. Hubert Allanic explique : « La réunion des Landes de Lanvaux en 1719, prétextant une chasse, est en réalité le premier acte concret de l’organisation de la rébellion. C’est lors de cette rencontre que l’idée d’un appel à l’Espagne pour soutenir le mouvement est évoquée, une décision qui transforma ce mécontentement en une véritable conspiration »

Les conspirateurs et leur fin tragique

Parmi les figures emblématiques de cette révolte se trouve Clément Chrysogome de Guer, marquis de Pontcallec. Ancien mousquetaire du roi, il est désigné chef de cette armée improvisée, entouré de fidèles comme François du Couëdic, Lemoyne de Talhouët et Thomas Siméon de Montlouis, tous anciens militaires. Pourtant, malgré leur détermination, ils seront arrêtés fin 1719 et jugés sans droit à une véritable défense. « Le 26 mars 1720, la sentence est prononcée : Pontcallec et ses compagnons sont condamnés pour lèse-majesté et exécutés quelques heures plus tard, sur la place du Bouffay à Nantes », raconte Allanic, soulignant le caractère expéditif de la justice royale​

La légende de Pontcallec et la mémoire bretonne

La mémoire de Pontcallec reste vive en Bretagne, notamment à travers les chants populaires ou « Gwerz », qui célèbrent le marquis en héros de l’identité bretonne. Toutefois, Hubert Allanic apporte un regard nuancé : « Si une partie de la Bretagne conserve de Pontcallec l’image d’un martyr, des analyses historiques le décrivent aussi comme un chef incompétent et tyrannique. » De nos jours, la figure du marquis résonne encore dans la culture bretonne, évoquée par des artistes comme Gilles Servat et Alan Stivell, mais aussi dans le cinéma avec Que la fête commence de Bertrand Tavernier​.

Hubert Allanic, par son ouvrage, invite à une redécouverte de cette conspiration à travers une analyse détaillée et documentée, rendant justice aux oubliés de l’histoire bretonne et soulignant l’importance de la transmission de la mémoire locale.

Crédit photo : DR

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Une réponse à “La conspiration de Pontcallec : Un pan méconnu de l’histoire bretonne ressuscité par Hubert Allanic”

  1. Raymond Neveu dit :

    « Tu périras par la mer » lui aurait prédit une Termaji de l’époque ou une Rome d’aujourd’hui et son bourreau se serait nommé Lamer ou l’Amer. On parle du papier timbré mais il y a aussi la vaisselle d’étain qui remplace le bois. Quant au marquis ses fermiers et métayers ne l’aimaient guères , dit-on!

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