Citoyens français, tremblez : les médias se droitisent ! Les conclusions d’une enquête du quotidien Le Monde sont pour le moins effrayantes, rendez-vous compte : la majorité des étudiants sortis de l’Institut Libre Du Journalisme (ILDJ) « expose ouvertement sa foi catholique ou s’affiche avec des associations catholiques. » De quoi faire frémir des générations de bobos et autres papis soixante-huitards, qui depuis des décennies pouvaient se complaire dans un pluralisme journalistique variant de l’extrême gauche à la gauche caviar.
L’enquête vidéo ouvre par le plus terrifiant des sujets : une femme expose son opposition à l’avortement. Le spectre le plu réac’ du moment est agité, histoire de bien faire prendre la mesure du danger qui nous guette. (Et puis tant pis si l’avortement ne s’est jamais aussi bien porté en France, enregistrant le record de 243 623 interruptions de grossesse en 2023 !)
Si vous n’avez pas encore eu peur, attendez un peu. Le lexique, la musique, le graphisme modalité « enquête à sensation » s’en chargeront :
« Bien plus qu’une simple école, il s’agit d’un réseau au service de la conquête médiatique par la droite de la droite. »
« Selon notre analyse, au total au moins 30% des étudiants de l’ILDJ militent activement pour des causes conservatrices à droite ou à l’extrême droite. »
Les mêmes qui nous assènent que l’accès à l’information des citoyens et le pluralisme politique sont autant de fondements de la démocratie moderne s’offusquent quand ceux qui ne pensent pas comme eux investissent les médias. Et ils nous disent très sérieusement que les médias sont neutres. Heureusement que nos concitoyens ne sont pas si faciles à leurrer ! La preuve en est le succès des médias qui dépendent de leurs lecteurs et non de subventions étatiques. Hein, Le Monde, c’est combien déjà pour vous les subventions ? En 2023, 19 millions d’euros pour le groupe, soit la plus grosse perfusion étatique du pays. Pardon, j’exagère, c’est 18,99 millions d’euros (je voyais déjà la mise en demeure arriver). L’univers Bolloré, lui a perçu 6,52 millions d’euros.
Mais revenons à notre enquête. Après nous avoir foutu les jetons avec la droitisation du paysage médiatique – qui, soit dit en passant, n’est pas due aux manigances de quelque milliardaire conservateur mais bien à la « droitisation » d’une société qui ne peut que constater le caractère défaillant des idées de gauche – Le Monde révèle que l’Institut Libre Du Journalisme a constitué une sorte de réseau par la mise en oeuvre de partenariats avec des groupes médiatiques « à l’agenda très politique » et que ses étudiants trouvent souvent un emploi auprès d’eux : CNews, LE Figaro, Valeurs Actuelles, RCF radio, Boulevard Voltaire. On aimerait demander à Le Monde et à leurs confrères de répondre à une question très simple : un jeune journaliste de droite aurait-il la minime chance d’être recruté chez vous ?
Évidement que non. Et on dirait presque que la voix off de la vidéo le sait lorsqu’elle relate que des étudiants de l’ILDJ ont ensuite intégré d’autres écoles de journalisme « au prix d’un petit coup d’effaceur« . Ne suggère-t-elle pas que pour y être admis, il faut que cacher son credo politique ? Mais les médias sont neutres, n’est-ce pas ? Neutres, comme leur traitement des informations ou leurs indignations à géométrie variable. Neutres, comme leur couverture de chaque élection. Neutres, comme le « Fonds d’Indépendance pour la Presse » (FIP) qui contient Médiapart, Libération et Le Monde. Pas à gauche du tout, n’est-ce pas ?
Et de nous faire frémir avec Vincent Bolloré, le milliardaire qui tirerait les ficelles des tous les médias de droite… comme si Le Monde n’avait pas le sien avec Xavier Niel, actionnaire majoritaire de L’Obs, Télérama, l’Huffpost, Le courrier International etc. Mais nuançons, comme l’a fait justement l’AFP : »Le milliardaire français Xavier Niel a cédé la quasi-totalité de ses parts dans le groupe Le Monde à un « Fonds pour l’Indépendance de la Presse » ». Oui, sauf que… le président du FIP est Jules Niel, le fils de Xavier Niel ! Ce que l’AFP « oublie ». Il faudra l’Observatoire du Journalisme. pour nous en avertir : « Notons au passage qu’il n’avait que vingt ans lorsqu’il accéda à ce poste prestigieux, et que cela ne semble pas choquer outre mesure des médias pourtant prompts à fustiger les héritiers. »
Voilà, voilà.
Audrey D’Aguanno
Crédit photo : Capture d’écran Le Monde
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