Un long métrage sur la guerre en Birmanie dans l’état Karenni va voir le jour

Un long métrage sur la guerre en Birmanie dans l’état Karenni va voir le jour. Le projet de film en cours sur le peuple Karenni a pour ambition de révéler au grand public une histoire méconnue : celle d’un peuple qui lutte depuis plus de 70 ans pour son autonomie face à l’oppression militaire birmane. Porté par le témoignage de ceux qui vivent ce conflit au quotidien, ce long-métrage promet d’offrir une plongée intime et réaliste dans la guerre civile qui déchire la Birmanie, aujourd’hui appelée Myanmar. Le réalisateur souhaite non seulement rendre hommage à ces combattants de l’ombre, mais aussi sensibiliser le monde à une lutte qui, pour la première fois en 70 ans, semble voir la lumière au bout du tunnel.

Une histoire vraie : le retour de Baw Reh

Le film s’articule autour d’une histoire profondément humaine, celle de Baw Reh, un jeune Karenni qui, après des années d’exil, décide de retourner dans son pays en apprenant que son père est toujours en vie. Ce retour au pays, prétexte à un voyage initiatique et bouleversant, permet au spectateur de découvrir les réalités du conflit à travers plusieurs personnages réels, incarnés par eux-mêmes. Combattants de la guérilla, infirmières de terrain, professeurs restés auprès de la communauté malgré les bombardements, tous viennent illustrer les multiples facettes de la résistance Karenni.

Le film adopte deux points de vue complémentaires : d’un côté, un regard omniscient, un fil narratif romancé permettant d’explorer les différentes dimensions de ce conflit. De l’autre, le point de vue subjectif d’un reporter qui accompagne Baw Reh dans sa quête personnelle. Cet observateur extérieur devient un porte-parole pour le spectateur, découvrant l’ampleur de la guerre au fur et à mesure que le film progresse.

Les Karenni : un peuple en lutte depuis 70 ans

Pour comprendre l’importance de ce projet cinématographique, il est essentiel de se pencher sur l’histoire du peuple Karenni. Originaires de l’État Karenni (rebaptisé arbitrairement État Kayah par le gouvernement central), ils mènent une guerre de résistance contre la junte militaire birmane depuis l’indépendance de la Birmanie en 1948. À cette époque, il était initialement prévu que les États Karenni, Karen et Shan obtiennent leur autonomie. Cependant, un coup d’État militaire sous le général Ne Win annula ces promesses, plongeant le pays dans un long conflit civil.

Depuis, les Karenni luttent avec des moyens dérisoires contre une armée birmane, le Tatmadaw, suréquipée et connue pour ses méthodes brutales. Violations des droits de l’homme, assassinats, viols et bombardements d’écoles et d’hôpitaux font partie de la stratégie de terreur menée par le Tatmadaw. En revanche, l’armée Karenni et le KNPP (Karenni National Progressive Party) se distinguent par leur refus de participer au commerce de l’opium, une activité souvent utilisée par d’autres groupes rebelles pour financer leurs opérations.

Un message d’espoir pour un peuple en quête de paix

Pour la première fois depuis des décennies, les Karenni et d’autres minorités de Birmanie entrevoient une lueur d’espoir. Suite à une période de paix relative entre 2012 et 2021, le coup d’État militaire de 2021 a réveillé une nouvelle détermination parmi les jeunes générations. Ces derniers ont rejoint les rangs de la guérilla, convaincus qu’il est temps de mettre fin à ce régime oppressif. La coalition de plusieurs ethnies, renforcée par des recrues bamar (l’ethnie majoritaire en Birmanie), a permis aux forces de la guérilla d’enregistrer des victoires contre l’armée birmane.

Le film, bien qu’il traite d’une guerre de longue haleine, cherche avant tout à véhiculer un message optimiste. « Les minorités de Birmanie sont en train de gagner la guerre », déclare le réalisateur, qui souhaite mettre en avant la résilience et la détermination de ces combattants. C’est un peuple dont la lutte ne vise pas à prendre le pouvoir ni à envahir des territoires voisins, mais simplement à retrouver la liberté et l’autonomie qui leur ont été promises il y a des décennies.

Un tournage en immersion pour plus de réalisme

Afin de capturer l’essence de ce conflit et de rendre justice à la réalité des Karenni, le film a été tourné en langues locales : karenni, birman, et anglais lorsque cela est possible. Une équipe d’interprètes a accompagné la production pour s’assurer de la justesse des dialogues et du respect de la culture locale. Le réalisateur, en collaboration avec le reporter de guerre Siegfried Modola, s’appuie sur des mois de repérages et de travail sur le terrain pour garantir l’authenticité des scènes. Modola, qui a remporté le Prix Bayeux en 2023 pour un reportage sur la guerre civile en Birmanie, apporte son expertise en tant qu’observateur du conflit.

Le tournage s’est déroulé dans la région frontalière de Mae Hong Son en Thaïlande, où de nombreux Karenni ont trouvé refuge. Cette région, aux paysages et à la culture identiques à ceux de l’État Karenni, offre un cadre idéal pour reconstituer l’environnement des combattants. Le film bénéficiera également du soutien de Karenni TV, une chaîne YouTube locale, pour les décors et l’assistance sur le terrain.

Un appel à la solidarité

Le financement de ce film est un élément crucial pour donner vie à cette histoire. L’équipe de production cherche à lever 25 000 euros pour rémunérer les personnes locales participant au projet. La majorité des membres de l’équipe de tournage sont en situation de précarité, certains ayant été blessés au front. Cet argent permettra non seulement de soutenir ces individus et leurs familles, mais aussi de partager leur lutte et leur espoir avec le reste du monde.

L’association Village Karenni a aidé en tant que conseil pour l’écriture et la réalisation. Ce film peut être un fabuleux moyen de faire connaître cette cause à un plus grand nombre de personnes !

Vous pouvez contribuer au succès de ce projet et en découvrir plus en vous rendant sur ce lienVous aurez la possibilité de précommander le film, de réserver une place pour son avant première, ou de soutenir le projet par un simple don !

Crédit photo : DR
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