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« Le sursaut corse » de Nicolas Battini fera-t-il école ?

Avec « Le Sursaut corse, l’identité plutôt que l’indépendance » (1), Nicolas Battini nous présente un livre qui oscille entre autobiographie et essai, son parcours personnel devant expliquer son évolution idéologique. Très jeune militant nationaliste, indépendantiste, Nicolas Battini fut condamné à huit ans de prison pour ses activités. Son incarcération provoqua ses premiers questionnements identitaires lorsqu’il fut confronté au réveil matinal de ses codétenus musulmans avec l’appel à la prière jusqu’aux cris de joie lors de l’attaque du Bataclan, en passant par l’attentat de Borgo où, en 2018, et au cri de « Halla’hou Akbar », Morad Akaouch porta vingt-quatre coups de couteau à deux gardiens de la prison où il était incarcéré, Gino Orsatti et Antoine Orsini.

Majoritaire chez les nationalistes corses, le logiciel tiers-mondiste qui avait forgé ses propres certitudes en prenait un sacré coup. Comment être proche de détenus censés être des camarades de lutte, car eux-mêmes anciens colonisés et victimes de l’Etat français, alors que ceux-ci ne souhaitaient que la mort des kouffars et exprimaient bruyamment leur joie dans ce massacre ?!

Une révolution au sein du mouvement nationaliste

Libéré au bout de six années, il gravit ensuite les échelons au sein du parti autonomiste de Gilles Simeoni (2), Femu a Corsica. Attaché parlementaire puis membre de l’exécutif , les positions de ses amis prônant le wokisme (écriture inclusive, rapports non-genrés etc) et le mutisme, si ce n’est la négation de la question de l’islamisme lors de l’assassinat d’Yvan Colonna, l’éloignèrent de cette frange politique et achevèrent sa mutation idéologique, l’amenant à privilégier la préservation de l’identité et donc la reconquête culturelle avant l’indépendance. Autrement dit la défense de son peuple historique avant les questions institutionnelles.

Petit retour en arrière au cours du XXème siècle pour comprendre cette révolution au sein du mouvement nationaliste corse. Hormis les militants autonomistes et bientôt irrédentistes regroupés autour de la revue A Muvra pendant l’entre-deux-guerres (3), quasiment toutes les autres initiatives autonomistes et indépendantistes furent basées sur une idéologie anticolonialiste et tiers-mondiste. Du F.R.C (Front Régionaliste de la Corse) à l’A.R.C (Action Régionaliste Corse) en 1970, en passant évidemment par le F.L.N.C (Front de Libération Nationale de la Corse) dès 1976 et ses multiples variantes et scissions à partir de 1990, tous ces mouvements furent irrigués par une atmosphère humaniste, progressiste, en un mot gauchiste comme le dit lui-même l’auteur. D’une extrême-gauche propre aux années 60-70 et ses alliances avec l’IRA et l’ETA notamment à une dérive sociétale wokiste, à l’image, en fait, de la gauche continentale. Propos à mesurer toutefois : quelques leaders furent aussi marqués à l’extrême-droite car rien n’est simple sur l’Ile de Beauté… Pour l’anecdote, dans les années 1970, Edmond Siméoni, pourtant considéré comme l’un des « pères du nationalisme corse », était un familier de l’imprimerie de l’hebdomadaire Rivarol, passage des Marais.

La première partie du livre de Nicolas Battini décrit donc le milieu sociologique, géographique et politique de sa famille. Au-delà de son propre parcours militant, il nous relate l’histoire d’une génération.

Il évoque ensuite son incarcération et en profite pour régler quelques comptes. Il insiste enfin sur l’alliance contre nature entre ce peuple corse traditionnellement conservateur, réactionnaire et cette idéologie de gauche matérialiste puis sociétale qui ne devait pas être remise en question par ses anciens amis afin de garder l’espoir d’éventuelles avancées institutionnelles vers l’autonomie…

Un marché de dupes que Nicolas Battini a décidé de rompre courageusement avec sa démission de Femu a Corsica puis le développement de son association Palatinu. Espérons juste qu’il ne prendra pas l’attitude inverse de ses anciens associés politiques par pur rejet viscéral. Le tiers-mondisme pro-palestinien n’a pas vocation à se transformer en occidentalisme pro-sioniste et l’indépendantisme en copinage effréné avec un parti, certes anti-islamiste, mais français et en grande partie jacobin au risque de désorienter sa base militante.

Une troisième voie semble envisageable, nécessaire même, et promise à de grands succès.

Bona furtuna Niculaiu !

Benoît LOEUILLET.

Livre à commander chez Europa Diffusion 

Crédit photo : DR

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5 réponses à “« Le sursaut corse » de Nicolas Battini fera-t-il école ?”

  1. Gaï de Ropraz dit :

    Ouais, la Corse et les Corses… On laisse faire et c’est toujours, et encore, une épine (Et de taille !) dans le pied de la Nation.

  2. Toussaint Andreani dit :

    Le seul commentaire rédigé est assez pitoyable. Encore un jacobin…

  3. Mado68 dit :

    Les Corses se défendent et defendent leur terre et il ont raison, vivent les Corses.

  4. Gaï de Ropraz dit :

    Toussaint, qui de par son seul prénom est probablement Corse, se rebiffe.
    Mais ce qu’il n’est pas capable -mais alors pas du tout- comme du reste toute la « nation » Corse, de faire ou de produire, c’est donner un semblant d’allant economique à l’île. Or, en dehors des aides de la France, la Corse se noit. Pour bien préciser les choses, en un seul mot, autant dire que les Corses sont totalement incapables de survivre à eux-même. Ils ont un besoin urgent de la France, ou de tout autre pays qui viendra à leurs secours. Bref, les Corses, en dehors de leurs espaces en vélégiatures concernant les touristes de passage, personne n’en a besoin. Point barre !!!

  5. Hervé Brétuny dit :

    Si Monsieur « de Ropraz » , les Corses ont besoin de la Corse. ça s’appelle la liberté des peuples à disposer d’eux mêmes .

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