Le retour du printemps n’a pas que des avantages. Il marque aussi le début de la saison du frelon asiatique. Ce redoutable prédateur pour la biodiversité et les abeilles fait notamment l’objet de campagnes de piégeage. En 2023, les opérations menées dans les Côtes-d’Armor ont permis de capturer plus de 100 000 reines fondatrices.
En 2024, le groupement de défense sanitaire des abeilles (GDSA) du département réitère l’initiative afin de lutter contre l’infestation du frelon asiatique. À savoir qu’un seul nid de frelons asiatiques représente la prédation en une saison de 150 000 insectes de 300 espèces différentes. « Soit l’équivalent de 11,5 kg de nourriture potentielle perdue pour les oiseaux », résumait au mois de février dernier le président du GDSA des Côtes-d’Armor.
Frelon asiatique : vers un piégeage plus sélectif ?
C’est en 2004 que le frelon asiatique a fait son apparition en France. Il s’établissait quelques années plus tard dans l’ouest du pays, attiré par des étés garantissant ressources en nourriture et en eau ainsi que par des hivers relativement doux.
Toutefois, quand vient le temps de sortir pour les fondatrices de nids afin de refonder une colonie au printemps, certains remettent en cause l’efficacité du piégeage de ce nuisible faisant peser des risques de santé publique en raison du risque mortel des piqûres. Par ailleurs, le frelon asiatique représente également une menace pour les apiculteurs de voir leurs abeilles dévorées.
Auprès de France bleu Armorique le 20 mars dernier, et tandis que le plan de lutte nationale contre le frelon recommande également de piéger les frelons asiatiques, Jean-Yves Sénéchal, président du GDSA d’Ille-et-Vilaine, préconise pour sa part l’utilisation de pièges « sélectifs ».
Il est nécessaire, selon lui, que les insectes « qui n’ont pas à y rester doivent pouvoir en sortir et qu’on ne garde que les fondatrices ». Un caractère sélectif que n’ont pas, par exemple, les pièges bouteilles, lesquels ont une fâcheuse tendance à piéger « énormément d’insectes utiles. Notamment des futurs reproducteurs ou des insectes qui vont faire de la lutte dans les champs ou dans votre jardin », a expliqué ainsi Jean-Yves Sénéchal.
Laisser les fondatrices s’entretuer
De son côté, Cyrille Lejas, directeur de la Fédération des Groupements de Défense contre les Organismes Nuisibles d’Ille-et-Vilaine (FGDON 35) va même plus loin en estimant que ce piégeage des fondatrices serait « une fausse bonne idée ». Il en a expliqué la raison à France bleu Armorique :
« Nous l’avons testé à grande échelle de 2014 à 2018. (…) Après des phases comparatives entre territoires piégés et non piégés, les résultats escomptés n’ont jamais été probants et le piégeage a été abandonné progressivement ».
À Betton, commune d’Ille-et-Vilaine une campagne de piégeage de grande envergure avait permis la capture de 1 600 potentielles reines en mars et en avril 2023, « une progression inexpliquée et inexplicable d’environ 30 % du nombre de foyers » y a été observée, a indiqué Cyrille Lejas. Un constat qui pose des questions quand, dans le même temps, ce nombre de foyers demeurait stable dans les communes limitrophes n’ayant pas organisé de piégeages massifs.
Le directeur du FGDON 35 semble avoir une explication sur cette curieuse situation : « On s’est aperçu qu’au pied d’un nid primaire, en début de saison, on pouvait trouver entre dix et vingt reines de mortes la même semaine, ce qui était bien le signe de l’affrontement. Quelques fois dans le nid qu’on va avoir au mois de juin, c’est peut-être la vingtième reine et non la première qui l’a commencé ». En résumé, il s’agit de laisser les fondatrices se livrer à une concurrence les poussant à s’entretuer.
Cependant, ces divergences de points de vue sur l’utilité des piégeage massifs n’ont plus cours une fois les nids de frelons asiatiques installés à partir de la fin du mois de mai. Ne restera alors qu’une seule solution : la destruction de ces nids.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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