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Député européen, un job qui nourrit bien…

Christophe Clergeau est parvenu à creuser son trou au PS. Placé en position éligible, il sera réélu en juin au Parlement européen. Comme Raphaël Glucksmann, lui aussi homme de « gauche ».

Tout va bien pour le Nantais Christophe Clergeau (PS). Non seulement il est conseiller régional des Pays de la Loire, mais encore il est député européen. Son arrivée au Parlement européen remonte à juin 2023 lorsqu’il a été amené à remplacer un socialiste du Languedoc qui démissionnait ; un mandat qui aura donc duré un an. Mais nous avons également affaire à un apparatchik puisqu’il est également secrétaire national du PS chargé de l’Europe – il  est donc proche d’Olivier Faure, le premier secrétaire. Aux élections européennes de juin, il prend du galon puisqu’il  occupe la cinquième place sur la liste d’union conduite par Raphaël Glucksmann (PS + Place publique). Sa réélection se trouve donc assurée si on considère les sondages portant sur les intentions de vote : 9 % pour la liste Glucksmann, contre 3,5 % pour celle du PCF, 8 % pour celle de LFI, 8 % pour celle des Ecologistes (Ifop-Fiducial, Le Journal du dimanche, 3 mars 2024). Avec 10 % des voix, la liste Glucksmann pourrait obtenir neuf sièges, Clergeau se trouve donc en position éligible. Les autres Bretons apparaissant sur la liste feront donc de la figuration : Frédérique Bonnard-Le Floc’h (vice-présidente de Brest Métropole), Laurence Duffaud (première secrétaire du PS en Ille-et-Vilaine), Justin Amiot (conseiller de Loïg Chesnais-Girard, président de la Région Bretagne), tous relégués dans les profondeurs du peloton.

Il paraît que « près des trois quarts des candidats éligibles [sont] parisiens intra muros. Le premier ouvrier ou employé sur la liste est situé au-delà de la 40e place ». Une situation jugée par certains cadres « inacceptable pour un parti se targuant de vouloir retrouver le peuple » (Le Monde, samedi 27 janvier 2024). Pourtant, lors de son université d’été à Blois, le Parti socialiste  avait organisé des tables rondes et des débats placés sur le thème « Retrouvons le peuple ! » Par exemple : « Le socialisme écologique au service des classes populaires »« Les classes populaires ont-elles toujours leur place dans les grandes villes ? ». Ou encore « La France périurbaine est-elle la France des beaufs ? » (Le Canard enchaîné, 23 août 2023)

Dans ces conditions, placer à la tête de la liste socialiste un bobo parisien n’a donc rien d’étonnant, un bobo multicartes car il a eu sa période « néoconservateur » et fut un supporter de Nicolas Sarkozy. Raphaël Glucksmann est en effet un pur produit du Système ; on le trouve chroniqueur à France Inter (émission « Questions politiques ») de septembre 2017 à novembre 2018 et il est marié avec la journaliste Léa Salamé (France Inter et France 2). « L’enjeu, pour lui, c’est d’essayer de concilier le vote diplômé, urbain, cadre, auquel le PS est traditionnellement identifié, au vote plus historique des terres socialistes », remarque Bernard Sananes, président de l’institut Elabe (La Tribune Dimanche, 11  février 2024). Pour cela, il a une méthode : « Il faut que nous devenions un aimant politique » (La Tribune Dimanche, 24 décembre 2023)

La Picardie n’est pas faite pour Glucksmann

Essayiste à succès, « Glucks » a fait un carton avec Les enfants du vide (Allary Editions, 2018) : 80 000 exemplaires vendus. Dans ce livre, on lit une confession formidable : « Quand on habite, comme moi, le IXe arrondissement de Paris, muni d’un capital financier et culturel qui permet de voyager et de se sentir chez soi à New York, Milan ou Berlin, la solitude est une liberté. Ne plus appartenir à un parti, une Eglise ou un syndicat peut alors être considéré comme une “émancipation“».  Ce qu’il confirme quelques pages plus loin : « Je suis né du bon côté de la barrière sociale et culturelle,  je fais partie de celles et ceux qui sont armés pour profiter du cours des choses. » Evidemment notre homme se sent mal à l’aise lorsqu’on lui  rappelle une phrase prononcée il y a cinq ans alors qu’il était venu chez Arte assurer la promotion de son livre Les enfants du vide : « Moi, je suis né du bon côté de la barrière socio-culturelle, je fais partie de l’élite française (…) Quand je vais à New York ou à Berlin, je me sens plus chez moi, a priori, culturellement, que quand je me rends en Picardie. Et c’est bien ça le problème. » (Emission “28 minutes“, Arte, 22 octobre 2018) On le sent triste d’être un bobo…  C’est évidemment le genre de personnage que François Ruffin (LFI), député d’Amiens (Picardie), n’apprécie guère ; afin que nul n’en ignore, il a adressé à Glucksmann « une longue lettre argumentée et bien sentie. Dans sa missive, le député insoumis juge Raphaël Glucksmann « déconnecté » et « hors-sol », le campe en avatar d’une élite « arrogante », énième porte-voix d’une mondialisation heureuse qui fait trinquer les ouvriers. Notant le peu d’appétence de Glucksmann pour le référendum, l’élu de “Picardie debout !“ critique sa volonté d’élargir l’Union européenne à l’Ukraine sans se soucier des conséquences sociales dans l’Hexagone. » (L’Obs, 25 janvier 2024)

Pour autant, « Glucks » apparaît comme la locomotive idéale pour conduire la liste « socialiste ». C’est ce que pense certainement Jean-Claude Michéa si l’on se réfère à ses ouvrages et à ses déclarations. Ainsi : « Il est donc  normal que la gauche “citoyenne“ (celle qui a rompu avec toute sensibilité populaire et socialiste) apparaisse aujourd’hui comme le lieu politique privilégié où sont élaborées toutes les transformations civilisationnelles et juridiques requises par le marché mondial. Elle n’est plus, en somme, que le poisson-pilote du capitalisme sans frontière ou, si l’on préfère, l’avant-garde militante de la droite libérale. » (Entretien avec Elisabeth Lévy, Le Magazine littéraire, décembre 2009). Analyse que partage Alain de Benoist pour qui « les “valeurs“ de la gauche ne sont plus des valeurs socialistes, mais des valeurs  “progressistes“ (…) Ce dont on ne parle plus, c’est du capitalisme ou de la lutte des classes, pour ne rien dire de la révolution, cette vieillerie. » (Le Moment populiste, droite-gauche c’est fini !, Pierre-Guillaume de Roux, janvier 2017. Toutes les conditions sont réunies pour que « Glucks » et le PS soient  sur la même longueur d’ondes…

L’abstention va gagner ces élections européennes

Il n’est pas inutile de se reporter aux résultats des élections européennes de 2019 en Bretagne (5). La liste macroniste (LREM-Nathalie Loiseau) était arrivée en tête : 458 542 suffrages (25,62 %), suivie par celle des écologistes (EELV-Yannick Jadot) : 303 498 suffrages (16,96 %). On trouvait ensuite celle du Rassemblement national (Jordan Bardella) : 296 793 suffrages (16,59 %), puis celle de la droite (LR-François-Xavier Bellamy) : 139 261 suffrages (7,78 %). Arrivait ensuite celle du PS (Raphaël Glucksmann) : 138 180 suffrages (7,72 %), qui devance la liste des insoumis (LFI-Manon Aubry) : 101 165 suffrages (5,65 %). Bien entendu, dans nos cinq départements, l’abstention était florissante : 45,83 % (1 585 939 abstentionnistes sur 3 460 043 inscrits). Quant à « Glucks », il obtient évidemment ses meilleurs résultats dans les métropoles : 8,98 % (3 591 suffrages) à Brest, 9,42 % (9 222 suffrages) à Nantes et 10,91 % (6 594 suffrages) à Rennes. En juin 2024, la situation se présente sous de meilleurs auspices car il ne subira pas la concurrence de Benoît Hamon ; en effet, il y a cinq ans, « Ben de Saint-Renan » présentait une liste (Générations.s) qui obtint 85 384 voix (4,77 %) en Bretagne (5). Voilà des électeurs faciles à récupérer.

« Je fais le pari d’une Europe comme outil de justice sociale et de solidarité », affirme Christophe Clergeau ; il souligne aussi sa volonté de « faire changer les politiques agricoles » (Ouest-France, Pays de la Loire, vendredi 2 février 2024). Nous lui souhaitons bien du plaisir.

Bernard Morvan

Crédit photo : Ralf Roletschek – Fahrradtechnik und Fotografie/ Wikimedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2024, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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2 réponses à “Député européen, un job qui nourrit bien…”

  1. René dit :

    Bonjour, d’abord pour voter le 9 juin prochain, il convient de s’inscrire tout d’abord sur les listes électorales ou de le vérifier. Ensuite, à nous électeurs de faire le choix de ce PS ou pas ; quant à moi, j’irai voter contre la macronie et les partis qui soutiennent la commission européenne actuelle c’est-à-dire le PPE. Et votera pour des partis qui veulent libérer notre pauvre France et en aucun cas pour Glucksmann, Clergeau et sa clique. Mais ce n’est que mon avis ; salut et courage et merci a Breizh infos de nous aider à faire un choix éclairé.

  2. mouchet dit :

    100% avec vous bravo. Toute cette gauche caviar qui s’en fout royalement de la classe laborieuse et avoir ainsi des salaires de 12’000 euros mensuels. Se prendre pour une élite de la nation pardonnez du peu mais ce Gluskmann quelques chose, à le don d’énerver tout le monde avec sa suffisance et ses paroles toutes droites sorties des livres l’école. Je n’irais pas voter pour ces boboïstes parisiens qui ne pensent qu’à leur porte monnaie en allant nul part ne connaissant rien en économie du pays, en sortant de leurs universités sociologiques ou philosophiques de salons.

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