Le 29 décembre dernier, l’Afrique du Sud présentait un document de 84 pages à la Cour internationale de justice de La Haye, le principal organe judiciaire des Nations Unies, accusant l’État hébreu de procéder à « des actes de nature génocidaire » contre le peuple palestinien et de violer la Convention contre le génocide ratifiée par Tel Aviv en 1950. Jeudi 11 et vendredi 12 janvier, les avocats représentant les deux nations exposaient leurs arguments.
Pour Pretoria – soutenu par de nombreux pays musulmans et six pays d’Amérique latine -, il s’agit avant tout de faire « suspendre immédiatement ses opérations militaires » dans la bande de Gaza, mais aussi d’imposer le rétablissement de l’eau, de l’électricité, et de l’accès aux soins. Avec 23 500 morts, en majorité des femmes et des enfants, 1,9 million de personnes déplacées et la volonté clairement affichée par Netanyahu de ne pas s’arrêter aux 18.000 tonnes de bombes déjà lâchées, il aurait été pour le moins surprenant de ne pas voir Tel Aviv sur le banc des accusés d’un tribunal international. Ne pas y dénoncer les actuelles exactions d’Israël sur des millions de civils – quelle qu’en soit la cause déclenchante – aurait signifié ne pas croire en une justice internationale. À moins qu’Israël ne jouisse d’une place privilégiée sur l’échiquier international et ne soit pas soumis aux mêmes « règles » que les autres… ce que les réactions totalement hystériques, partisanes et irréfléchies à la plainte sud-africaine semblent dire.
« Procès aux victimes », « antisémitisme », »le seul pays libre du Moyen-Orient à la barre des accusés » : pour beaucoup, l’accusation est infondée puisque Tel Aviv ne ferait que répondre aux attaques terroristes du Hamas du 7 octobre dernier. Or, cette riposte israélienne, c’est un peu comme si après les attentats du 13 novembre à Paris, la police française avait débarqué dans les cités et s’était mise à tirer dans le tas, arguant que les islamo-racailles cachent leurs stocks d’armes dans les sous-sols des HLM. Après tout, pourquoi pas, mais ce que l’on ne comprend pas vraiment, c’est pourquoi l’usage de la force est légitime pour certains quand il serait nié à d’autres.
Bref, à entendre les réactions, c’est à se demander s’il n’y a pas plus de pluralisme et de liberté d’expression au sein même d’un État hébreu en guerre, de plus en plus nombreux étant les Israéliens contraires à la politique belligérante de l’administration Netanyahu.
L’hystérie et le parti-pris autour des conflits au Moyen-Orient touchent hélas tous les milieux idéologiques, et en sont la plupart du temps réduits à « la défense d’un pays occidental, contre l’obscurantisme islamique ». Mais les choses sont bien plus compliquées, l’histoire ne commençant pas le 7 octobre – aussi barbare et terrible fut-il – loin s’en faut. Si dépassionner le débat semble plus que nécessaire, force est de constater que ce serait sans effet aucun, nos nations européennes ayant renoncé à faire de la politique étrangère depuis plusieurs décennies, se contentant d’acquiescer aux décisions américaines, le plus souvent contre nos propres intérêts.
Dans le top 10 des arguments les plus absurdes, on notera celui de l’impossibilité pour Israël de commettre un génocide parce qu’il serait fondé lui-même sur le souvenir de la Shoah ; parce qu’une population ayant survécu à un génocide serait incapable d’en faire autant. Un argument sans valeur, niveau psychologie de comptoirs. Si la psychologie devait être dérangée, elle nous dirait d’ailleurs tout le contraire : qui a subi des mauvais traitements est souvent à son tour l’auteur de mauvais traitements sur autrui ! C’est dire la valeur de l’argument.
Quoi qu’il en soit, les débats qui auront lieu tourneront autour du thème de l’intention, le terme génocide étant défini comme la volonté de détruire en partie ou en totalité un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Ce qui sera étudié, c’est si l’État hébreu a eu – et a – l’intention d’éradiquer le peuple palestinien dans certains territoires. Pour les avocats sud-africains, cette intention ne se limite pas aux opérations de représailles mais à toute l’histoire d’Israël qui ne brille pas vraiment pour son respect des populations locales non-juives. C’est donc la condition des Palestiniens depuis la création d’Israël qui sera évaluée.
Quant à la légitimité de la Cour Internationale de La Haye, le journaliste Pierluigi Battista (2) qui peut difficilement être taxé d’antisémitisme, la compare à la cour de Nuremberg : « C’était une cour créée par les vainqueurs au sein desquels il y avait les soviétiques, qui ont commis toute une série de crimes tel le massacre de Katyn, où furent assassinés des milliers d’officiers polonais, massacre qui fut attribué aux nazis. C’est un parfait exemple de ce que signifie une cour qui doit répondre à des critères politiques. »
Qu’on se rassure, si la plainte est reçue et qu’un procès a lieu (la réponse devrait arriver sous une dizaine de jours), cela pourrait ne relever que du symbolique puisque la Cour de justice internationale n’a aucun moyen de faire appliquer ses décisions. C’est-là, la grande vérité de la justice internationale. Ce que l’État hébreu sait bien puisque depuis 1948, il ignore sciemment… plus de 30 résolutions de l’ONU et poursuit une colonisation illégale du point de vue du droit international.
Audrey D’Aguanno
Photo : DR
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(1) communiqué du ministère des Affaires étrangères israélien.
(2) journaliste et membre de l’association Setteottobre née pour lutter contre les préjugées antisémites. In Il Giornale du 12/01/24
4 réponses à “Israël accusé de génocide devant la Cour internationale de justice. Une plainte symbolique ?”
Donc il aurait fallu qu’ils acceptent les Pogroms ? Je trouve qu’ils font preuve de pondération et de discernement. Je ne suis pas sur que je fasse comme eux en étant à leur place.Qui a mis le Hamas au pouvoir ? Ils assument leur choix.
C’est quoi, cette nouvelle présentation ? On ne retrouve rien, c’est confus, criard, et vide. Les développeurs se sont fait plaisir, comme c’est de coutume dans ce secteur, mais cela n’a rien à voir avec l’ergonomie. Un recul nuisible considérable.
Toutes mes excuses pour le commentaire précédent. La confusion sur la présentation des articles était due à un réglage du zoom à 120%. Tout est redevenu clair en la supprimant. C’est effectivement plus aéré, plus clair qu’avant. Bonne continuation !
La cour internationale de justice une monstre mascarade humaine de civilisation qui permet de massacrer et de faire des génocides depuis l’aube de notre espèce. Alors oui bien sur on a inventé les religions pour mieux faire des holocaustes et avoir bonne conscience. L’espèce humaine est la pire de toutes les espèces puisqu’elle se tue et en supprimant le règne animal et végétal. Nous devrions être exterminés à notre tour et nous me méritons pas notre si belle planète. C’est le temps des massacres depuis 2 siècles temps imparti pour que les humains se souviennent et après on passe à autre chose. Nos deux grandes guerres ont fait 65 millions de morts et certaines cultures de croyantes se plaignent qu’elles étaient visées. Après les USA avec leur génocide de 10 millions d’Amérindiens, ont fait leurs guerres, leurs virus et leur épidémies avec 40 millions de morts pour faire tourner le business de l’armement. Et ainsi va le monde qui produit 6’000 milliards d’armes en détruisant la terre. Nous le paierons très très cher dans une imbécile humanité dont nous faisons tous partie.