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La langue des élites contre le peuple – Ces mots pour nous faire taire (Romain Baptiste)

Cet essai de Romain Baptiste (à commander ici aux éditions du Panthéon) publié en 2021 est remarquable par sa pertinence, sa documentation, son vocabulaire et sa structure. Comme habituellement, j’ai noté les numéros des pages les plus importantes afin de rédiger cet article, mais ils sont si nombreux qu’à l’évidence tout est notable et difficilement séparable de l’ensemble du texte. Vouloir en faire un résumé serait très prétentieux, fastidieux, et pour tout dire impertinent tant l’ouvrage vaut d’être lu, fouillé, apprécié et retenu dans son message si essentiel, vital même pour l’avenir de notre nation française et de notre civilisation. C’est pourquoi je rédige cet article, afin que les gens de bon sens, ceux qui réfléchissent par eux-mêmes, les patriotes, aient envie de lire ce livre.

Sans résumer donc, voici quelques passages caractéristiques de cet essai qui est plutôt une œuvre majeure. Les citations sont faites dans l’ordre de découverte dans le texte.

Ambiance : « Toute une communauté ne jure que par l’idéologie dominante… Ce sont ceux qui sont les plus infectés qui nient la santé mentale d’autrui… Éroder la morale traditionnelle… Tous les relâchements sont autorisés… ». Pour cela, un large choix de mots dénaturés et d’expressions préfabriquées est instillé petit à petit dans le vocabulaire courant, notamment par les médias, gagne les esprits faibles et change en profondeur la perception des événements ou de leur nature même.

Exemple personnellement observé, à propos du conflit en Ukraine : les médias ne parlent pas des Russes, ou de l’armée russe, mais de Poutine. Cette appellation prétendrait nous persuader que cet homme à lui seul est le décideur, la cause unique et l’acteur solitaire de cette guerre. Aucune considération ni étude des racines anciennes de cette tragédie, les mélanges de populations, les découpages frontaliers, et bien sûr les influences et manœuvres étrangères. En utilisant le seul mot Poutine, on fausse considérablement la dimension humaine et historique de ce conflit. Le débat se trouve réduit à une personne, quel que soit ce que chacun pense de cette guerre qui, rappelons-le avec humilité, concerne le malheur et la mort d’autrui. Tout le livre de Romain Baptiste étudie avec finesse et lucidité l’utilisation volontairement inadéquate, mais pas sans effets, d’expressions sélectionnées pour rendre factice ce qu’elles sont censées représenter.

Morceaux de vocabulaire choisis : « … La tolérance est donc l’expression d’un malaise dans la civilisation, et chez les chrétiens en particulier. Pour être tolérant, il ne faut plus rien avoir à défendre… Il est assez flagrant de constater que le pouvoir se sert des valeurs de la République pour contredire la démocratie et l’abolir… Les mêmes antiennes exaltant le vive ensemble. C’est justement cet irénisme qui pousse la démocratie libérale à être un régime totalitaire, car au nom du multiculturalisme, il est bon de faire taire toute opposition et même toute réserve… L’État multiculturel, évidé de tout contenu historique, n’a que faire de la culture. La société plurielle ne saurait être intégratrice, puisqu’elle n’a aucune civilisation à transmettre, simplement un mode de vie propice à l’ordre marchand… Au nom de la discrimination positive, le législateur renie le principe d’égalité en avantageant des individus selon ces mêmes critères d’origine, de race et de religion, jusque-là oblitérés par la loi… Dénoncer le privilège blanc. Si les visages pâles sont les mieux représentés dans tous les secteurs d’importance, c’est parce qu’ils sont les plus nombreux et les mieux adaptés dans cette société qui est la leur depuis leurs ancêtres qui ont construit le pays… La multiplication de la diversité érode l’idée de concorde, et donc de peuple… »

J’observe personnellement que, petit à petit, depuis la Révolution de 1789, la France est devenue dans le parler politique courant la République française, puis la République, puis les valeurs de la République, réduite maintenant à ses simples valeurs. Ainsi oublie-t-on une nation dans toute sa réalité au profit d’un régime politique allant en se désagrégeant, abandonnant les citoyens pour en faire, dans la confusion des mots, dans la prétention d’idées aussi fuyantes et insaisissables qu’une fumée, des sujets du Nouvel Ordre mondial.

Considérations révélatrices de faits sociaux : « … La déchristianisation n’a pas seulement aboli le lien spirituel qui unissait les hommes à travers une foi commune, elle a également amené à ce que se défasse le lien patriotique entre citoyens… La déchristianisation continue son œuvre de sape en ôtant encore aux peuples qui ont perdu la foi en Dieu, leur foi en eux-mêmes. Ce phénomène historique… leur a surtout arraché une partie constitutive d’eux-mêmes sans la remplacer… Les bons pasteurs… se sont résolus à ne pas défendre la primauté des chrétiens en Europe… Cet espoir les a quittés et ils voudraient nous faire croire à l’Espérance ? Mais y croient-ils encore eux-mêmes ? Ils manifestent davantage leur confiance dans la régénération de nos sociétés par l’enrichissement culturel… Le vocabulaire courant s’avère si dépendant de l’idéologie que parler et prêcher deviennent une seule et même activité… La langue totalitaire est l’outil de répression le plus redoutable : il n’empêche pas de penser, il nous fait oublier qu’il existe une pensée en dehors des mots admis par la doxa. Changer le sens des mots, ce n’est donc plus faire de la propagande, c’est empêcher de revenir à une vérité autre que celle donnée par le régime… L’image du matraquage médiatique a ceci de bénéfique qu’elle rappelle quelle violence s’exerce sur l’auditoire – une violence psychologique, qui ne laisse d’autre séquelle que la disparition de l’esprit critique…

La propagande suggère les opinions que doit adopter le sujet. Cette approche – suggestive, rend moins impérieuse la nécessaire adhésion aux thèses du régime… » Ne nous étonnons donc pas de voir disparaître le bon sens et le patriotisme ! Observons que si beaucoup de Français se résignent, ou même se réjouissent de l’Union européenne, c’est précisément parce qu’ils ont perdu la foi en eux-mêmes, en leur capacité à être un grand peuple et faire de la France un grand pays.

Reprenons le texte : l’utilisation fréquente du trope illocutoire (acte de langage destiné à cacher le vrai sens d’un terme) rend la stratégie orale particulièrement pernicieuse. Ainsi en est-il de l’expression devoir de mémoire, laquelle, sous l’apparence d’une évidente morale autrefois reconnue et pratiquée ordinairement, est en fait une injonction doublée du soupçon que l’individu pourrait en être dépourvu. Si l’on pratique le devoir de mémoire selon les critères sélectionnés par le pouvoir, l’on démontre une capacité à compatir en vertu de la doxa. Toute réserve ou ouverture de débat sur le sujet démontre une déviance que la loi punit : ainsi en est-il des crimes nazis lors de la Seconde Guerre mondiale, au sujet desquels le législateur s’investit à la place des historiens ou chercheurs, à qui il est interdit de contrarier l’histoire officielle, sous peine d’accusation de négationnisme. Notons à ce sujet que l’Histoire étant écrite par les vainqueurs, aucun tribunal n’a jugé les USA pour les deux bombardements nucléaires de villes japonaises, qui n’étaient pas des objectifs militaires.

Joseph Goebbels, ministre nazi de la Propagande, affirmait « Plus le mensonge est gros, mieux il passe. » Aujourd’hui, les manipulateurs invisibles de la pensée unique avec leur novlangue présentée comme indispensable pourraient dire : « Plus le trope illocutoire est utilisé, mieux il est assimilé. » Nul besoin d’en démontrer le bien-fondé, la répétition seule est suffisante. Il en est ainsi pour les promesses illusoires diffusées par les médias, telles que l’immigration est une chance pour la Francela diversité est source d’enrichissement, etc. Les réseaux sociaux sont devenus le lieu de toutes les dénonciations, puisqu’il suffit qu’un participant signale un contenu non conforme à la doxa pour déclencher une avalanche de sanctions, sociétales ou judiciaires, même pour le simple motif d’utilisation linguistique non conforme à la doxa. Ainsi d’innombrables individus sont devenus les auto-gardiens de la morale hors de laquelle il ne serait point de salut, tandis que d’autres, encore capables de réfléchir par eux-mêmes, ne peuvent exprimer leur pensée et ouvrir un débat. Une assurance à long terme pour le pouvoir en place ! Vous pensez : « Comment le peuple de Goethe a-t-il pu devenir nazi avec autant d’enthousiasme ? La réponse est dans ce qui précède.

On voit les effets de ces manipulations jusque dans les publicités. Être en accord avec le progressisme ambiant devient une assurance-gains aussi considérable qu’indispensable : présenter un produit ou un service en y introduisant la diversité raciale ou sexuelle confirme la moralité du producteur et touche l’esprit du client potentiel en le confortant dans les usages du temps et leur libéralisme social. La qualité ou l’opportunité du produit ou du service proposé sont reléguées au second plan. On veut vous vendre un plat infect ? Peu importe, s’il est produit par un couple non hétérosexuel, non binaire, goûté avec succès par un autre couple composé de la diversité raciale omniprésente et occultant le peuple de souche blanc, chrétien et hétérosexuel.

La novlangue n’est pas destinée à décrire une réalité présente, mais à habituer les individus malléables à des changements en cours ou projetés dans le futur proche. Afin de bien imprégner les esprits, comme souvent en politique, les émotions suscitées prennent le pas sur la raison, valeur archaïque du passé patriarcal que certains voudraient faire disparaître, tout comme le devoir au profit du seul droit, et aussi le réel au profit de l’utopie. Mais le pouvoir des mots se limite à la crédulité des individus, aux prétentions des idéologies, il n’influe pas la réalité de la vraie vie.

Le régime soviétique avait instauré ses propres expressions, notamment pour disqualifier les opposants : suppôts du capitalismerévisionnistescontre-révolutionnairesennemis du peupleennemis des travailleurs…les désignant ainsi à la vindicte populaire à laquelle chacun était tenu de participer, leur fermant les portes de la vie sociale, quand elles ne les envoyaient pas directement au goulag. Les mondialistes pratiquent de même. Dans une société se croyant libérée de tout autoritarisme politique issu des errances totalitaires du XXe siècle, le recours au langage prédéterminé réduit les citoyens à l’état de partisans du parti unique, tout comme dans les survivances communistes pas tant anachroniques que sont Cuba et la Chine. Toute participation à des activités réprouvées par la tendance gauchiste-écologiste-mondialiste amène l’individu concerné à l’opprobre, voire à la mort sociale, comme on sait si bien le faire dans le monde communiste Ainsi en est-il des chasseurs, pêcheurs, survivalistes, tireurs sportifs et autres climato-sceptiques ou covido-sceptiques, ces deux derniers étant qualifiés du sobriquet suprême : complotistes !

Les expressions dévoyées telles que minoritésradicalisésincivilitésstigmatiserdiscriminer, sont présentées en détails dans l’ouvrage. Il en est de même pour l’usage grandissant des termes médicaux pour psychiatriser les discours dissidents -comme en URSS. De plus en plus de politiciens ou de journaleux expriment leurs doutes quant à la santé mentale de gens lucides avertissant des dangers que beaucoup ne veulent pas voir. Ainsi la médecine psychiatrique devrait-elle s’occuper en exclusivité des lanceurs d’alerte. Je pense à ce sujet que certaines qualifications médico-judiciaires pour justifier le non-jugement de terroristes sont des subterfuges afin de renoncer à rendre une vraie justice envers ceux qui sont victimes de francocides, pour utiliser un terme de patriote, par définition non issu du vocabulaire gaucho-mondialiste. Parmi les expressions banales, on retiendra faire le jeu du Rassemblement national qui, par définition, est toujours en embuscade. Et aussi blessures au cou plutôt qu’égorgement. Et aussi accommodement raisonnable plutôt que capitulation. J’ajoute personnellement que transition démographique remplace Grand Remplacement, tout comme transition écologique ou transition énergétique remplacent l’abandon de plus d’un siècle de progrès techniques, industriels, agricoles et même sociaux, au profit d’une idéologie destructrice et anti-sociale.

Ajoutons en plus de ce grave sujet l’invasion de la langue française par les anglicismes, le parler des banlieues copié par de jeunes écervelés éparpillant ce mode, l’écriture inclusive imposée par les gauchistes jusque dans nos universités… Alors il n’est pas difficile de comprendre que la langue de nos ancêtres est sur la pente raide conduisant à la dictature des mots et antiphrases préfabriqués et obligatoires, exprimés dans un langage de pauvres d’esprit difficile à comprendre et n’appartenant plus aux Français, à la France et à notre glorieux héritage.

Mais toutes ces considérations existent peut-être simplement parce que je suis un complotiste

Daniel Pollett

Crédit photo : DR

[cc] Breizh-info.com, 2023, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

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8 réponses à “La langue des élites contre le peuple – Ces mots pour nous faire taire (Romain Baptiste)”

  1. Brounahans l'Alsaco dit :

    On pourra discourir tant que l’on veut, expliquer tout et son contraire, argumenter à l’infini … pour arriver à ce que ma mère résumait dans sa langue maternelle « Que peut-on demander de plus à un boeuf que sa viande ?  » Quand, par manque de connexions cérébrales, 95% de la population n’arrive pas à réfléchir il n’y a pas grand-chose à espérer. La société actuelle le démontre à l’infini.

    • Denis BIGEARD dit :

      Analyse brutale mais parfaite. La Boétie l’a bien expliqué depuis 1548, les 3/4 des humains sont « suiveurs » de nos dirigeants par flemme, lâcheté et stupidité…. le covid l’a parfaitement illustré.!! D.B. (« nivoyousnisoumis »)

  2. domper catalan français dit :

    Ce bouquin, je vais l’acheter……l’esprit critique, le raisonnement, le libre arbitre, l’analyse intelligente sont les ennemis de la novlangue et de l’immédiateté des réactions préfabriquées par une dictature médiatique qui s’affiche de plus en plus sans complexes. La baisse ( volontaire ) du niveau scolaire et la propagande dans les universités envahies par un ultra gauchisme qui collabore au wokisme et à la déconstruction identitaire du pays et donc de la Nation ! Entre ceux qui votent pour le mondialisme macroniste et les gauchistes irresponsables….on est mal barrés !

  3. Bruno dit :

    La propagande qui vise à faire de chaque citoyen un bœuf sans cervelle touche une immense partie de la population. Seuls y échapperont ceux qui auront la volonté profonde de s’instruire, d’emprunter d’autres voies d’information que celles tracées par nos décideurs dont le but est de mener par l’oreille un troupeau bien docile. Le refus du conformisme et de l’abêtissement intellectuel range les personnes dissidentes au rang méprisant de « complotistes », « ennemis de la République », « fascistes », « nazis », « racistes » et même « psychopathes ». Tout le vocabulaire péjoratif pour les discréditer est utilisé sans retenue par les défenseurs d’un système qui a tracé une fois pour toutes les frontières entre le camp du bien et celui du mal, qui a décidé une fois pour toutes de ce qu’il convient de réprimer pour sauvegarder la morale et la civilisation.
    Ainsi, tous les dépossédés de la culture, fabriqués par le système dont l’école est le premier et grand pourvoyeur, pourront-ils applaudir avec enthousiasme leurs directeurs de conscience.

  4. Maurice Anton dit :

    Oh ! DJADA !…
    Oh ! Djada, toi le mec lambda, mon pote, mon frère, sais-tu que quand on parle d’acculturation on est en plein dans le mille.
    Les adorateurs de la novlangue, seraient-ils comme le furent Ronsard ou du Bellay au XVI eme siècle, les ambassadeurs de la langue française?
    On pourrait le croire puisque le député LREM Rémy Rebeyrotte, ancien professeur d’économie, a fait l’éloge de la chanteuse Aya Nakamura, la présentant comme l’ambassadrice de la Langue française dans le monde.
    Selon ce député «Aya Nakamura est en train de porter au niveau international de nouvelles expressions et évolutions de la langue. Et ça, ce sont des choses extrêmement fortes.»
    Oui, ça c’est fort de café et c’est dit par un professeur d’université qui décide d’une certaine façon de ce qu’il convient de faire ou ne pas faire, de dire ou ne pas dire.
    Alors, on est en droit de s’inquiéter sérieusement du pourcentage de bœufs et d’acculturés en France dont beaucoup de députés font partie.
    Pas étonnant que nous marchions sur la tête et que les Français soient menés allègrement par le nez !

  5. René-Pierre Alié dit :

    Tocqueville, déjà : « Ce que j’appelle l’esprit littéraire en politique consiste à voir ce qui est ingénieux et neuf plus que ce qui est vrai, à aimer un tableau intéressant plus que ce qui sert, à se montrer très sensible au bien jouer et au bien dire des acteurs, indépendamment des conséquences de la pièce, à se décider enfin par des impressions plutôt que par des raisons. » (« Souvenirs »)
    On a bien avancé depuis. Les mots ont ensuite servi à l’inaction. Du temps de Guizot, les politiques était persuadés d’avoir agi quand ils avaient parlé.
    Maintenant, les mots servent carrément à cacher la vérité.

    • Bruno dit :

      Tout à fait juste. Platon écrivait déjà : « La perversion de la Cité, commence par la fraude des mots ».
      Si la pensée ne peut s’exprimer sans les mots il est clair qu’un vocabulaire bien choisi peut conférer au mensonge et au raisonnement tordu. C’est pourquoi il faut être extrêmement méfiant à l’égard des paroles du politiquement correct qui ne nomme pas clairement les choses pour nous persuader que 2+2 font 5.

  6. Henri dit :

    Lénine était ce qu’il était, bref, mais tout n’est pas à jeter, par exemple : « La culture dominante est celle de la classe dominante ». Ça ressemble à un oxymore, mais si on s’y penche attentivement, ça explique pas mal de choses, même cent-vingt ans après.

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