En Catalogne Nord, cinq communes du département des Pyrénées-Orientales ont été jugées en début de semaine devant le tribunal administratif de Montpellier pour avoir inscrit au règlement du conseil municipal le droit pour les élus de lire les délibérations en catalan traduites immédiatement et intégralement en français.
Assignées en justice pour usage du catalan
À Montpellier, les professionnels de la justice ont déjà de quoi s’occuper avec la délinquance locale. Mais ce serait oublier qu’aux yeux de la République française, les langues régionales représentent également une menace pour l’« intégrité nationale ». Ou quelque chose de ce genre…
Bref, toujours est-il que le tribunal administratif de Montpellier devait examiner un dossier de la plus haute importance mardi 18 avril : cinq communes du département des Pyrénées-Orientales, représentées par leur maire, étaient assignées à la barre par le préfet, « à la suite de la modification du règlement intérieur de leur conseil municipal permettant de s’exprimer et de délibérer en catalan », a précisé le même jour le quotidien local L’Indépendant.
Les cinq municipalités visées sont Saint-André, Elne, Tarerach, Amélie-les-Bains et Port- Vendres. Outre les élus concernés, des militants catalanistes des Pyrénées-Orientales s’étaient également rassemblés devant le tribunal de Montpellier mardi matin. Par ailleurs, Lluis Puig, ancien ministre de la Généralitat chargé de la culture aujourd’hui en exil, Laura Borras, l’ex-présidente du parlement de Catalogne et Oriol Junqueras président de l’ERC, député du parlement catalan emprisonné durant 4 ans, ont également apporté leur soutien aux maires de Catalogne Nord.
Cami del tribunal administratiu de Montpeller on a la demanda del estat frances els nostres municipis seran jutjats per parlar català en aquest espai públic que es un ple. Tranquils perquè passi lo que passi ja em guanyat, em obert la portà! @VilaWeb @RadioArrels pic.twitter.com/sx0hw53uIf
— Nicolas GARCIA (@GarciaNicolas66) April 18, 2023
Une liberté qui agace le préfet des Pyrénées-Orientales
Pour le président du tribunal administratif de Montpellier et ses deux assesseurs, il était donc question de déterminer si la langue catalane pouvait être utilisée en supplément du français dans une assemblée délibérante de la République française.
Il est reproché aux cinq communes incriminées d’avoir, depuis plusieurs mois, agrémenté les débats de conseils municipaux de locutions en catalan et ce, comme le précise le quotidien Le Parisien, « pour évoquer quelques affaires concernant la vie quotidienne de ces villages ».
Seulement voilà, dans les Pyrénées-Orientales comme tous les autres départements, tribunal administratifs langues régionales français, il y a un préfet, chargé par l’exécutif de garantir la « continuité de l’État ». Et Rodrigue Furcy, en poste à Perpignan, n’a guère apprécié cette prise d’initiative de ces quelques municipalités.
Aussi, il a demandé à ces dernières de modifier à nouveau leur règlement intérieur « pour se remettre en conformité avec les lois constitutionnelles », selon la même source. Des lois qui affirment que « la langue française est la langue de la nation que ce soit, pour le travail, l’enseignement et les différents usages de la République ». On connaît la chanson…
Le catalan « automatiquement suivi par une traduction en français »…
Il faut également souligner que ce « coup de pression » du préfet est parvenu à intimider plusieurs élus locaux. En effet, de nombreuses communes des Pyrénées-Orientales avaient également tenté l’expérience de modifier leur règlement intérieur afin de pouvoir s’exprimer et délibérer en catalan. Elles sont finalement rentrées dans le rang en se rangeant à l’avis de la préfecture et seuls les cinq conseils municipaux précités ont choisi de faire de la résistance. Ce qui leur a valu d’être cités en justice par le préfet, lequel a réclamé l’annulation des délibérations modifiant les règlements intérieurs des conseils municipaux.
Au cours des débats du 18 avril devant le tribunal administratif de Montpellier, le rapporteur de la République et le porte-parole du préfet ont rappelé les textes de lois. Du côté des communes mises en cause, leurs avocats ont répondu qu’il y avait une place pour « une sorte d’audace linguistique sans pour autant négliger la langue française ».
Malauradament, tornem a ser davant d’un jutjat, en aquest cas a Montpeller, per defensar la nostra llengua.
Malauradament tampoc aquí el català es veu com una riquesa cultural i econòmica, sinó com una nosa que cal combatre des de l’administració. pic.twitter.com/pCo0BH2ZGs
— Laura Borràs 🎗 (@LauraBorras) April 18, 2023
À la sortie de l’audience, Nicolas Garcia, le maire d’Elne, synthétisait l’esprit des élus locaux présents à la barre : « Il ne s’agit pas d’exclure le français mais d’inclure le catalan. Car dans notre système, la présentation en catalan est automatiquement suivie par une traduction en langue française. L’intérêt pédagogique pour l’apprentissage de notre langue est alors indéniable. »
Reste à savoir si le président du tribunal administratif de Montpellier aura été convaincu. La décision a été mise en délibéré et doit être rendue le 9 mai prochain.
Crédit photo : capture Twitter Nicolas Garcia (photo d’illustration)
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4 réponses à “Pyrénées-Orientales. Bien que toujours traduit en français, l’usage du catalan en conseil municipal agace le préfet : 5 communes assignées en justice”
Ces gens ont parfaitement raison de continuer à parler le catalan, ils peuvent même en être fières en démontrant ainsi que la France est bien multiculturelle puisque sa majesté le souhaite! Quant au préfet s’il lui reste un peu d’intelligence il peut apprendre le catalan il sera un peu moins c…
Un lorrain
Toujours le jacobinisme triomphant bien servi en région par préfets, sous-préfets et autres suppo(r)ts du pouvoir central…
Les Catalans sont dans leur droit et cela ne nuit à personne puisqu’il y a traduction. Il y a bien longtemps que les conseils municipaux bretons ont abandonné la langue, la République continue le travail commencé en 1789. Ce pays n’est pas mur, les langues régionales n’ont pas tué les états où le régionalisme est fort et les langues vernaculaires vivaces. Le peul, le swazili et autres sont sans doute moins dangereux pour la répiblisque
Quand on argumente par : » assurer la continuité de l’ Etat » par le Préfet, on se retient de rire……si seulement vous assuriez l ‘ autorité de votre Etat sans cesse bafoué, attaqué de partout, insulté et jamais vraiment respecté, vous sauriez que le fait d’utiliser en binôme le Catalan est beaucoup moins risqué pour votre » continuité » que d’autres choses que je ne saurais citer ici mais que tous les gens qui réfléchissent connaissent déjà ….