Les archéologues de l’Institut national pour les recherches archéologiques préventives (Inrap) ont mis en lumière une carrière d’extraction de schiste d’époque gallo-romaine, quand Rennes s’appelait encore Condate. Entre dépotoir et statuette de Vénus extrêmement bien conservée, les découvertes sont très prometteuses.
La carrière de Condate est un élément spécifique de la ville, son exploitation commence au Ier siècle de notre ère, quand les Romains qui occupent alors la région décident d’élever une cité à la confluence de l’Ille et de la Vilaine, probablement sur une agglomération déjà existante de la tribu celte locale des Riedones. L’extraction de la roche était utile à l’édification des soubassements de la cité. Située en périphérie à la lisière nord de la ville antique, la carrière abandonnée est ensuite transformée en dépotoir… une poubelle géante qui sera un véritable trésor pour les chercheurs.
Ainsi au milieu de nombreux débris de vaisselles, plusieurs statuettes en terre cuite, mais aussi des pièces de monnaies et des objets de la vie quotidienne des Rennais d’époque gallo-romaine ont été exhumés. Et parmi ces détritus, une splendide Vénus, divinité romaine de l’amour, de la beauté et de la séduction. Mesurant une dizaine de centimètres, elle est de très bonne facture, façonnée dans de l’argile blanche de Bourgogne. Si les opérations post-fouilles en diront plus (par exemple si la statue était polychrome), il est possible de la dater de la fin du Ier siècle ou du début du IIe siècle, grâce à sa haute coiffure à étages en vogue à l’époque flavienne. Elle aurait appartenu à un laraire, l’autel domestique où les familles vénéraient les divinités romaines du foyer, les Lares. Fidèle aux représentations anadyomènes, c’est-à-dire « sortant de l’écume de la mer », elle est nue, tient un linge dans la main gauche et porte l’autre dans ses cheveux.
«On trouve régulièrement ce genre de statuettes au cours de nos opérations de fouille, mais elles sont rarement aussi bien conservées, et aussi particulières que celle-ci. Nous n’en sommes encore qu’au début de l’histoire de cette Vénus !» explique Nicolas Ménez, responsable scientifique de l’opération archéologique.
De telles figurines en terre cuite étaient fabriquées en très grande série par les artisans gaulois, et sont autant de témoignages de dévotion populaire. Et la star des statuettes, c’est elle : Vénus anadyomène, qui est, de loin la plus représentée, suivie par les déesses mères indigènes, toutes deux étant des divinités nourricières en lien avec l’élément aquatique. Le culte des déesses mères est une constante dans tout l’espace européen et remonte au paléolithique.
Beauté, amour, fécondité, mais aussi victoire : Chez les Latins, le culte de Vénus sort du cadre de la sensualité, pour entrer dans celui de la guerre et de l’identité en ce qu’elle est la mère d’Énée, héros de la guerre de Troie au fondement de la Rome. C’est pourquoi elle y était vénérée en tant que protectrice, une sorte de déesse nationale.
L’étude du mobilier avec lequel a été ensevelie la statuette permettra d’en savoir plus sur le culte de la déesse en Bretagne.
Audrey Stéphanie
Photo : DR
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