Nous vous évoquions en début de semaine la campagne participative pour financer un film sur Jeanne de Belleville, héroïne de l’histoire de Bretagne. Nous vous proposons ci-dessous l’interview du réalisateur du film, Maxime Pinchaud. De quoi vous donner assurément l’envie de soutenir un projet important.
Breizh-info.com : Pouvez vous vous présenter ainsi que votre équipe à nos lecteurs ?
Maxime Pinchaud : Je suis un auteur-réalisateur de 31 ans. J’ai réalisé plusieurs court-métrages de fiction dont « Je suis toujours là » sélectionné au festival de Voiron et une série de comédie intitulée La COPRO qui sortira cet été. Passionné d’histoire, mes fictions s’inspirent de la riche histoire de nos régions.
Le film Jeanne de Belleville rassemble une équipe de 85 professionnels du cinéma et passionnés d’histoire, tous bénévoles. Environ la moitié de l’équipe est Bretonne et l’autre vient de toute la France !
Ce film est rendu possible grâce à la participation de deux associations Bretonnes de reconstitution historique : Pont-Croix 1358 et Ar Soudarded. Ces deux associations ont pour vocation de faire revivre le quotidien des Bretons au milieu du XIVème siècle. Leurs recherches les amènent à étudier les sources archéologiques, enluminures, textes, sculptures etc. de la période allant de 1340 à 1360 afin de reproduire le plus fidèlement possible les conditions de vie et l’équipement civil et militaire de l’époque. L’association Pont-Croix 1358 est basée dans un archéo-village reconstitué par ses membres comprenant des maisons d’habitation, de marchands ainsi que les structures d’artisanat existant au milieu du XIVème siècle. L’association Ar Soudarded a construit un navire marchand qu’ils font naviguer avec les techniques de l’époque !
Les reconstitutions de ces deux associations ont servi de costumes et de décors pour le film.
Breizh-info.com : Qu’est-ce qui vous a amené à réaliser ce film sur Jeanne de Belleville ? Parlez nous de son importance dans l’histoire de Bretagne ?
Maxime Pinchaud : Des femmes et des hommes remarquables ont marqué les esprits de leurs contemporains si puissamment que leur souvenir nous est parvenu au travers des siècles. Leur souvenir nous rappelle d’où nous venons et la confrontation de nos valeurs modernes avec celles d’un autre temps nous en apprend souvent plus sur le présent que sur la passé lui-même.
Jeanne de Belleville fait partie de ces femmes qui ont marquée leur temps de manière spectaculaire et ont pourtant été largement oubliées.
Le cinéma est justement, de mon point de vue, le meilleur moyen de faire vivre au spectateur des événements dans un lieu et à une époque qui lui seraient sinon totalement inaccessibles : voilà pourquoi quand j’ai découvert l’histoire de Jeanne de Belleville, j’ai tout de suite voulu faire ce film !
Tout commence en 1330 : Fait rare pour les nobles de l’époque, Jeanne de Belleville épouse un homme dont elle est follement amoureuse : Olivier IV de Clisson. Elle devient par la même occasion l’une des comtesses les plus riches et les plus puissantes du Duché de Bretagne et du royaume de France. Olivier et Jeanne sont seigneurs des marches Bretonnes, cette zone tampon entre le royaume de France et le duché indépendant de Bretagne. En pleine guerre de cent ans, cette position stratégique les place au coeur des affrontements entre les royaumes d’Angleterre et de France qui aspirent tous deux à contrôler le duché de Bretagne. Suite à une conspiration ou à un progressif rapprochement d’Olivier de Clisson avec le Roi d’Angleterre, le Roi de France, Philippe VI de Valois fait arrêter Olivier au cours de la célébration d’un mariage royal à Paris en violation totale de la trêve de Malestroit signée entre les Anglais et les Français. Sans jugement et sous couvert de preuves douteuses le Roi fait exécuter Olivier. Une justice expéditive tout à fait inacceptable pour un noble au XIVème siècle. Désespérée par la perte d’un amour qu’elle ne connaitra plus jamais, Jeanne prend conscience que l’honneur de la maison de Clisson a été irrévocablement entaché par le Roi de France. Ses terres, ses biens, sa vie et probablement celle de ses enfants sont en danger. Acculée, Jeanne de Belleville se lance alors dans un formidable vendetta contre le Roi de France pour venger la mort d’Olivier et rétablir l’honneur de la maison de Clisson. A la tête d’une armée qui atteint plusieurs milliers de soldats elle conquiert des forteresses et anéantit des villages sur les terres des seigneurs fidèles au Roi de France. Lorsqu’elle sera acculée sur terre par les armées du Roi, elle poursuivra le combat sur les mers en devenant la première femme pirate de l’histoire de France et de Bretagne.
Breizh-info.com : A une époque où l’Histoire est de moins en moins bien enseignée, chez les plus jeunes notamment, en quoi était-ce important de réaliser ce film ?
Maxime Pinchaud : La méthode d’enseignement du professeur du film incarné par Philippe Valmont est certainement discutable mais nul ne peut nier qu’il enseigne avec passion et sait susciter l’intérêt des élèves !
Ce court-métrage est un hommage aux professeurs et aux passionnés d’histoire qui s’investissent pour susciter l’intérêt du plus grand nombre sur des figures et des époques oubliées. Rendre l’histoire vivante est pour moi quelque chose de fondamental. L’histoire de France et de Bretagne est si riche, qu’il suffit de s’en inspirer pour créer des histoires passionnantes.
Breizh-info.com : Vous avez sorti un premier film de 2 min, et vous souhaitez produire le film de 10 minutes. Pourquoi le format court métrage ? Quels sont vos besoins ?
Maxime Pinchaud : La version 2min de Jeanne de Belleville a concouru au Nikon Film Festival est a été classé 6ème/1605 films par les votes du public et nous avons reçu un énorme soutien, ce qui nous encourage à continuer ! Le film a d’ailleurs été également sélectionné au festival Ptit clap de Levallois Perret et sera donc projeté en salle de cinéma en Juin.
Le format de court-métrage se prête parfaitement à la narration et à la chute qui se produit à la fin du film et ne serait pas possible sur un long métrage. Je n’en dis pas plus et j’invite vos lecteurs à voir le film qui est disponible gratuitement sur sur site du Nikon Film Festival.
Quant à la durée, j’ai initialement écrit un film de 10 minutes mais le manque de budget nous a contraints à nous limiter à 2 minutes qui ont déjà nécessité 5 jours de tournage.
Aujourd’hui nous souhaitons organiser un 2nd tournage afin de filmer les séquences restantes et sortir un film de 10 minutes. Mais pour cela nous devons récolter environ 5 000 €.
Pour cela nous avons lancé une campagne de crowdfunding dans laquelle chacun peut faire à don pour le film. L’ensemble des fonds récoltés sont gérés par l’association Kapellmeister Production qui soutient de jeunes cinéastes indépendants.
Breizh-info.com : Une partie du film est tourné en langue bretonne, pour quelles raisons ?
Maxime Pinchaud : A cette époque le duché de Bretagne est indépendant et les Bretons parlent tous le Breton. La plupart des nobles parlent aussi Français. Il m’a paru indispensable que les dialogues des personnages Bretons soient en langue Bretonne afin d’immerger le public dans la Bretagne du XIVème siècle. Nous avons travaillé avec l’auteur Brittophone très impliqué dans la préservation de la langue Per-Vari Kerloc’h pour les traductions.
Je pense aussi qu’il est important de faire vivre les langues locales et quel meilleur moyen de les faire vivre que par la création de contenu culturel !
Breizh-info.com : Parlez nous du casting du film, mais aussi des lieux de tournage ?
Maxime Pinchaud : Le personnage principal de Jeanne de Belleville est interprété par Cyrielle Theilliere, une jeune et talentueuse actrice que vous pouvez aussi découvrir en tournée dans la comédie musicale Grease l’originale. Le professeur est interprété par Philippe Valmont, connu pour être le voix Française de Batman (Christian Bale), Philippe est l’une des voix le plus connues des Français. Il a aussi joué dans Spider-man et d’innombrables films Disney. Il est aussi la voix de James Franco, Luke Wilson, Paddy Considine et Will Arnett. Comme tout le reste de l’équipe, il participe bénévolement au projet.
Le film a été tourné à l’archéo-village de Pont-Croix et Guissény dans le Finistère. Pour la version longue nous aimerions tourner à Fort Lalatte.
Breizh-info.com : Envisagez vous un jour, un film grand format ?
Maxime Pinchaud : Oui ! J’écris un long-métrage sur Jeanne de Belleville. Ce film nous immergera au XIVème siècle et laissera encore plus de place pour des dialogues en Breton que sur le court format de 10 minutes.
J’étais justement au festival de Cannes cette année pour promouvoir ce projet.
Breizh-info.com : Que peuvent faire nos lecteurs pour vous aider et soutenir ce projet ?
Maxime Pinchaud : Si vous souhaitez soutenir le projet vous pouvez faire un don dans notre campagne de crowdfunding afin de nous aider à financer le second tournage. Nous vous proposons des contreparties comme l’inscription de votre nom au générique de fin jusqu’à la possibilité de participer au tournage !
Pour ceux qui n’ont pas les moyens de faire un don, vous pouvez aussi partager le plus possible nos publications Facebook afin de faire parler du projet et trouver des donateurs ou mécènes potentiels.
Campagne de crowdfunding Jeanne de Belleville : https://www.helloasso.com/associations/kappelmeister-production/collectes/film-jeanne-de-belleville
Crédit photo : DR
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Une réponse à “Maxime Pinchaud : « Jeanne de Belleville fait partie de ces femmes qui ont marqué leur temps de manière spectaculaire et ont pourtant été largement oubliées » [Interview]”
Avant tout il faut faire le tri entre la légende et la réalité historique concernant mon ancêtre Jeanne de Belleville. Beaucoup d’ajouts légendaires ont été faits! Reportez-vous à au mémoire publié par une historienne de profession, Astrid de Belleville, elle aussi descendante de Jeanne.