La rentrée scolaire 2021-2022 s’est déroulée dans des conditions dramatiques pour les élèves : port du masque obligatoire dès le CP, temps perdu en propagande vaccinale énoncée par des professeurs et des encadrants qui ne sont ni médecin, ni scientifiques, mais simples relais des décisions gouvernementales…
Mais aussi par ailleurs, avec le spectre de la loi dite « sur le séparatisme », qui contient une véritable déclaration de guerre faite aux écoles hors contrat en France. Ainsi qu’aux familles qui souhaitent instruire leurs enfants en dehors des mains de l’Education nationale, que beaucoup de parents d’élèves voient maintenant comme une machine à formater, à uniformiser, et de moins en moins comme une institution qui instruit.
Pour faire le point sur cette rentrée et sur l’avenir des écoles hors contrat notamment (mais pas que), nous avons interrogé Hervé Rolland, président de la Fondation pour l’école.
Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Hervé Rolland (Fondation pour l’école) : Pour Breizh-info, je ne peux évidemment que commencer par évoquer l’origine doublement finistérienne de ma famille paternelle : ‘Ar Vro Rouzig’, plus précisément Dineault (ou Dineol), sur les bords de l’Aulne, près de Châteaulin pour mon grand-père et Quimper pour ma grand-mère.
Je suis ingénieur de formation, jeune retraité ayant exercé des responsabilités de direction générale dans le secteur informatique. Je préside désormais la FPE, Fondation pour l’école, d’utilité publique et abritant dix autres fondations éducatives.
Notre but est triple :
- Aider juridiquement et financièrement à créer et développer les écoles indépendantes (dites ‘hors-contrat’),
- Former des Maîtres pour ces écoles par notre ILFM, institut libre de formation des Maîtres, dont le diplôme est reconnu officiellement par l’État,
- Aider à préparer l’école de demain. Celle dont la France et les Français ont besoin.
Par ailleurs, j’ai présidé plusieurs années Notre-Dame de Chrétienté, qui organise le ‘pélé’ de Chartres de Pentecôte, association dont je suis toujours vice-président.
Breizh-info.com : Comment s’annonce la rentrée 2021 de la Fondation pour l’école ? Quels changements et perspectives ?
Hervé Rolland (Fondation pour l’école) : Notre rentrée est déjà très active, avec l’attrait qu’exercent les écoles indépendantes, compte-tenu de la baisse de plus en plus inquiétante du niveau scolaire. Les parents veulent une éducation de qualité pour leurs enfants, ils veulent sortir du nivellement par le bas que l’on constate depuis de trop nombreuses années.
Ainsi, au lieu de deux formations à la création d’écoles habituellement, nous en avons organisé cinq. Et la suppression programmée de l’IEF (Instruction en famille), à la suite de l’invraisemblable décision récente du Conseil constitutionnel, va accroître encore le nombre de création d’écoles indépendantes : nous avons du pain sur la planche !
Notre ILFM tourne à plein régime et les demandes de conseils juridiques se multiplient : plus de 50% par rapport à une année habituelle.
Breizh-info.com : Malgré la menace des autorités, il semblerait que l’appétit pour le hors contrat ne faiblisse pas si l’on regarde le nombre d’ouverture d’écoles. Peut-on dire que cela risque de relever du parcours du combattant demain ?
La situation de l’école en France en général est mauvaise, inutile de tourner autour du pot. C’est Jean-Michel Blanquer le premier à le dire et tous les livres ont été écrits pour décrire les maux de l’Éducation nationale. Il n’empêche : rien ne bouge et rien ne bougera tant que la vision idéologique de l’école et la mainmise des ‘pédagogistes’, qui prévalent depuis trop longtemps, ne seront pas remises vraiment en question.
Alors, les parents réagissent et, oui, l’appétit ne faiblit pas : 122 écoles créées pour cette rentrée 2021(dont 45% ont été aidées par la Fondation pour l’école), 60 projets repoussés à l’an prochain, pour lequel 150 autres projets sont en cours. Sans compter « l’effet IEF » qu’il est trop tôt de quantifier.
Quant au parcours du combattant : oui, c’est difficile, cela demande des efforts, de l’organisation, une équipe forte et soudée si l’on veut tenir dans la durée. La multiplication d’écoles indépendantes signe le constat de faillite du modèle étatique, ce qui ne fait guère plaisir à ses représentants. Les contraintes se multiplient : alors que la loi Gatel de 2018 a considérablement renforcé les contrôles, un nouveau tour de vis a encore été opéré.
Mais, soyons honnêtes. Il s’agit d’éducation d’enfants, le sujet est très sérieux : l’amateurisme n’y a pas sa place. La bonne volonté ne suffit pas. Et il faut aussi s’assurer qu’il n’y a pas là un danger d’écoles hors-contrôle, en particulier coraniques.
Breizh-info.com : Quelles sont les raisons qui ont poussé à la fermeture de 55 écoles l’an passé ?
Hervé Rolland (Fondation pour l’école) : Une seule et unique raison : les difficultés financières. Pas un centime ne leur est versé par l’État ou les collectivités et, pourtant, leurs parents paient des impôts ! J’en profite pour lancer un appel à tous ceux qui peuvent, même modestement, nous aider : tous ces dons repartent vers les écoles.
Comme je viens de le dire, engager un projet d’école doit se faire dans la durée et certaines écoles sont trop fragiles financièrement. Il n’y a pas que les compétences éducatives, il faut un minimum de capacité de gestion. Je vous avoue être très circonspect quand une école nous indique benoîtement n’avoir pas de budget prévisionnel ! Sans aller jusqu’à un exercice comptable approfondi, il faut a minima prévoir 3 ans de budget.
Soyons clairs : la Fondation pour l’école fait tout pour aider à la création d’écoles, toutefois nous refusons d’aider financièrement celles qui n’ont pas la maturité minimale requise.
Breizh-info.com : Concrètement, avec la loi sur le séparatisme, que va-t-il advenir des écoles hors contrat ? Qu’est-ce qui va changer ? Et pour l’instruction en famille ?
Hervé Rolland (Fondation pour l’école) : Rappelons que la récente position du Conseil constitutionnel contredit formellement la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 énonce, dans son article 26 : ‘Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants.’
C’est assez inouï pour des défenseurs des ‘valeurs de la République’…
Pour l’instant c’est l’instruction en famille qui est visée, ce qui, une fois de plus, n’est pas le sujet. Le séparatisme islamique, pour appeler les choses par leur nom, n’a rien à y voir. Idem pour les écoles dites hors-contrat, qui sont toutes déclarées et inspectées chaque année, dont certaines, environ 2%, sont musulmanes.
Le séparatisme islamique, ce sont des écoles clandestines, non-déclarées. Les maires savent parfaitement les identifier : que les pouvoirs publics fassent leur travail. Aujourd’hui, 62 000 enfants sont formés pas l’IEF, dont les parents devront justifier le besoin de continuer. Nombre d’entre eux vont probablement faire rejoindre à leurs enfants les écoles indépendantes actuelles ou en créer de nouvelles.
Breizh-info.com : Pourquoi selon vous les autorités se sont-elles attaquées ainsi de front à ces milliers de familles qui entendent instruire leurs enfants autrement ? On a la sensation désagréable que la République française veut contrôler l’ensemble de la vie de nos enfants….
Il est impossible d’ignorer le mouvement de centralisme extrême des autorités. La situation sanitaire et les décisions sur les ‘pass’ en sont la plus parfaite démonstration : l’État se montre de plus en plus jacobin et autoritaire. Il veut tout contrôler, ce qui provoque l’inévitable réaction de rejet. On le comprendrait si les résultats étaient probants mais la faillite de l’Éducation nationale devrait faire réfléchir. Il n’y a pas qu’un seul type d’enfant, il ne peut pas y avoir un seul type d’école.
Le plus surprenant, c’est le déni. Charles Péguy a écrit : ‘Il faut toujours dire ce que l’on voit, il faut surtout, toujours voir ce que l’on voit’. La faillite de l’idéologie des ‘pédagogistes’ est manifeste, les politiques font semblant de ne pas voir ce qu’ils voient. Une bonne partie des enfants de France sont en perdition dès le primaire et… les responsables regardent à côté. Sans compter ceux qui osent affirmer : tout va très bien, etc. Et les autorités multiplient les contrôles de ce qui marche (avec des moyens très limités), sans doute parce que ces succès les agacent.
Breizh-info.com : Pouvez-vous nous parler enfin des formations et des accompagnements que vous proposez pour ceux qui voudraient se lancer dans l’aventure de l’école hors contrat ? Quel diplôme minimum faut-il ? Quel bagage ? Quel budget ?
Hervé Rolland (Fondation pour l’école) : Tout dépend du poste que vous souhaitez occuper dans votre future école. Pour ouvrir une école et en assurer la gestion, il n’y a pas de condition de diplôme ou d’expérience minimum à avoir. En revanche, et c’est très important, les conditions pour en assurer la direction sont strictes : pour être directeur d’école hors contrat, il faut avoir un minimum de 5 ans d’expérience dans « l’enseignement, la surveillance ou la direction d’un établissement d’enseignement ».
Selon les établissements, le directeur de l’école et le créateur de l’école ne sont pas toujours la même personne ; ainsi il n’est pas rare que le directeur soit recruté par l’équipe qui a créé l’école une fois le projet presque finalisé.
Nos formations à la création d’établissement scolaire coûtent 100 euros au candidat. Ce n’est évidemment pas le coût réel de ces formations qui sont assurées par différents professionnels, mais la générosité de nos bienfaiteurs nous permet d’en financer les 4 cinquièmes restants. Nous sommes là pleinement dans notre rôle de soutien à la liberté d’entreprendre pour l’école.
J’en profite : notre prochaine formation se déroule le 9 octobre, et encore « en distanciel », tant que les conditions sanitaires ne sont pas encore réunies pour le faire dans nos locaux, c’est donc assez facile d’y participer si vous avez un projet en cours. Consultez notre site fondationpourlecole.org si vous souhaitez en savoir plus.
Propos recueillis par YV
Photo d’illustration : DR
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