Nous avons récemment évoqué la sortie d’une magnifique édition des Eddas, ces textes fondamentaux de la Civilisation européenne en ce sens qu’ils sont notre source principale de connaissance de l’univers mental nordique. Une édition signée des éditions Kontre Kulture, dans le cadre de la collection « imaginaire européen », et dans la foulée des superbes Iliade, puis Odyssée.
Pour évoquer la sortie de l’ouvrage, nous nous sommes entretenus avec David, des éditions Kontre Kulture.
Breizh-info.com : Qu’est-ce qui a amené Kontre Kulture à vouloir rééditer les Eddas ?
David (Kontre Kulture): Ce nouvel opus au sein de la collection « imaginaire européen » s’inscrit dans le prolongement des deux précédentes rééditions que sont l’Iliade et l’Odyssée d’Homère. Cette collection se caractérise tout d’abord par la volonté d’aller à la racine de notre civilisation, de proposer des textes qui au cours des siècles, ont été comme des repères pour la plupart des peuples européens en façonnant leurs différentes représentations. Textes majeurs de la littérature médiévale et du patrimoine scandinave, les Eddas ont donc ici toutes leur place.
Avec cette édition de prestige, Kontre Kulture fait également le pari platonicien du beau, du vrai et du bien. Nous avons ici un objet de qualité, qui traverse l’épreuve du temps mais que l’on peut également offrir ou transmettre, un bel objet qui redonne une certaine forme de noblesse au livre, trop souvent considéré comme simple produit consommable.
Breizh-info.com : Que sont les Eddas ? Quelle est leur importance dans la mythologie européenne ?
David (Kontre Kulture): Rédigées toutes deux en vieux norrois au XIIIe siècle, les Eddas sont d’origine bien différente. Les chants et poèmes qui composent l’Edda poétique, appelée également « ancienne Edda » ou « Edda de Saemund », en référence à Sæmundr Sigfússon dit Saemund le Sage, prêtre et historien islandais qui coucha la plupart de ces textes sur le papier sous le nom de Codex Regius, datent, pour les plus vieux, du VIIe siècle. Transmis oralement, ils narrent les hauts faits de la mythologie scandinave et relatent les épopées de ses héros.
La seconde Edda, l’Edda de Snorre a été écrite par un diplomate, historien et poète islandais, Snorre Sturlason. Source principale de notre connaissance de la cosmogonie nordique, que Snorre relie à la Genèse biblique et au monde romain à travers Énée, Troyen fondateur de Rome, elle nous permet, en nous présentant de manière structurée la mythologie scandinave, de mieux entrer dans le monde de l’Edda poétique, placée ici à sa suite.
Ce sont deux textes précieux sur le plan historique car sans eux nous saurions en réalité peu de choses de cette mythologie primitive, constitutive de la civilisation de l’Europe ancienne.
Breizh-info.com : Que nous disent les Eddas aujourd’hui ? Y’a-t-il des messages que l’on pourrait qualifier d’intemporels ?
David (Kontre Kulture): Les Eddas sont bien plus qu’un simple recueil de textes relatant les histoires de dieux ou de héros. Il y a aussi et avant tout une sagesse nordique, une éthique qui incite le lecteur à se questionner sur les notions de destin, de courage et de valeur. Nous y trouvons toute une série de préceptes sur l’art et la manière de bien conduire sa vie – mais aussi de bien mourir – en faisant de la tempérance des passions et de l’amitié, des vertus cardinales ; la pensée antique en général et Aristote en particulier n’affirmaient pas autre chose. Sans vouloir rentrer dans des considérations philosophiques il est néanmoins possible de détecter une filiation entre la mythologie grecque et la mythologie nordique qui par leurs richesses ne peuvent que donner de la matière à tout Européen qui, dans ce monde nihiliste, désire se construire moralement.
Breizh-info.com : À l’heure où la mythologie nordique est parfois dévoyée, notamment via certaines superproductions américaines, en quoi était-il important de permettre l’accès aux sources de cette mythologie, à tous ?
David (Kontre Kulture): Regarder le film Troie avec Brad Pitt déguisé en Achille ne peut se substituer à la lecture de l’Iliade car ces deux activités sont radicalement différentes. Il y a d’un côté un spectacle qui tient lieu de divertissement et oblige à la passivité et de l’autre une activité qui, si elle est conscientisée – car on peut très bien lire sans comprendre – laisse le champ libre à une appropriation.
D’un côté une activité qui dure deux heures et qui laisse très peu de traces ; de l’autre une activité qui dure pour la plupart plusieurs jours, qui demande une certaine forme de digestion intellectuelle mais qui peut donner lieu à une plus-value qualitative : le lecteur n’est plus exactement le même, arrivé à la dernière page du livre. Ce pouvoir de la lecture se manifeste d’autant plus avec ces livres historiques car c’est justement parce qu’ils ont été vecteurs de transformation qu’ils ont fini par marquer l’humanité à jamais.
Breizh-info.com : Après l’Iliade, l’Odyssée, les Eddas, les éditions Kontre Kulture travaillent-elles à d’autres publications remontant au plus profond de notre mémoire ?
David (Kontre Kulture): Il y aura bien sûr d’autres livres qui viendront compléter cette collection mais les choix ne sont pas encore tout à fait arrêtés. Néanmoins je ne peux que vous conseiller de rester à l’affût des prochaines parutions des éditions Kontre Kulture qui risquent de se révéler explosives !
Propos recueillis par YV
Crédit photo : DR
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2 réponses à “Kontre Kulture : « Les Eddas sont bien plus qu’un simple recueil de textes relatant les histoires de dieux ou de héros » [Interview]”
Nombreux sont les jeunes de Normandie à employer les runes. Moi-même je les employais à 7 ans et les ai enseignées à ma fille au même âge. J’ai donné quelques cours à l’école de ma fille. Ancien facteur j’ai constaté dans diverses villes de ma région que des écrits runiques étaient gravés sur les boites aux lettres, et me renseignant je rencontrais des jeunes qui connaissaient divers futhark, via Jules Verne, Tolkien & des BD comme Thorgal ou Conan le Barbare…! Comme ça ne s’apprend pas à l’école (idem pour notre mythologie), il faut bien que les jeunes s’investissent eux-même…
Bof, ily connait rien.