Un Rom, neuf cambriolages : neuf mois ferme

21/07/2014 – 07H00 Nantes (Breizh-info.com) – Dinu est Rom. Arrivé en France en 2006, il retourne de temps à autre en Roumanie, tant et si bien qu’il a une compagne là-bas et un fils né il y a un mois qu’il veut faire venir en France. Pour l’heure, il est en comparution immédiate ce premier juillet et est en prison depuis quelques jours. Il a 18 ans, mais il en fait le double. A peine majeur il a déjà été condamné une fois pour vols.

Cet après-midi il comparaît pour neuf cambriolages commis dans Chantenay, l’ouest de Nantes et Saint-Herblain, de mars à juin 2014. Ceux qui le confondent le mieux – empreintes, ADN ou plusieurs témoignages. En toile de fond : 30 cambriolages commis dans le même secteur, pendant la même période, aux mêmes heures et avec le même mode opératoire. Regrettables coïncidences sans doute.

Sur un banc au fond de la salle, quatre femmes versent des larmes. Elles sont toutes de son camp à Couëron et sont chaperonnées par un homme plus âgé. Tous croient tellement à son innocence qu’ils ont amené avec eux un sac plastique où, à travers le plastique, on devine des cigarettes, des chaussettes, des slips et une brosse à dent. Étranges fournitures scolaires.

Dinu est dans le box, un traducteur auprès de lui. « Pour lui expliquer les mots compliqués« , selon Me Girard, son avocate. Car il parle français. Mais se réfugie dans le roumain quand il ne veut pas être compris. Sans hésiter à interrompre le juge qui lit son pedigree « y a calomnie Mme« .

Le juge justement entreprend de récapituler chacun des 10 faits – 6 tentatives et 4 vols consommés – qui lui valent sa présence dans cette salle lugubre comme une coupe de sang. Le 5 mars, 80 euros de volés dans une maison, la sueur de l’accusé est retrouvée sur une baie vitrée. Il se contredit « moi j’ai pas rentré » puis, deux secondes après, « j’ai cueilli des cerises« . Le juge le reprend : « mars, ce n’est pas la saison des cerises. C’est vous ou pas?« . L’accusé, imperturbable : « si vous avez trouvé mon ADN, pourquoi vous demandez?« . Le juge répond « c’est un procès, monsieur ». Il consent alors à reconnaître.

« S‘il y a mes empreintes, c’est moi. Il y en a tellement, je ne me souviens pas de tout » 

Suivant. Un vol, pendant l’absence des propriétaires, du 6 au 16 mars. Butin 400 euros, une montre, des bijoux et un Ipad. Des empreintes de l’accusé ont été retrouvées. Celui-ci dit seulement : « s’il y a mes empreintes, c’est moi. Il y en a tellement, je ne me souviens pas de tout« . Le 13 mars il frappe à nouveau, un PC portable et un téléphone sont dérobés après qu’il a ouvert une vitre de véranda. L’accusé déclare avoir tiré 40 euros à la revente. Le traducteur, incrédule, lui demande à mi voix « 40 €, sûr? » Grand silence. Trois jours plus tard, le 16, il escalade une clôture, force une porte, puis une vitre. Mais ne vole rien : « il y avait une alarme, alors juste j’ai rentré et sorti« . Le 9 avril, une autre alarme le fait fuir, mais il laisse ses empreintes sur une porte intérieure. Le 23 avril, il casse une vitre, laissant ses empreintes. Et vole des bijoux, une montre, 90 euros dans une sacoche. Le 7 mai, en plus des empreintes, il est filmé alors qu’il entre par une fenêtre entrouverte… pour ne rien voler encore, parce qu’il y avait une alarme.

Le 20 juin, une TV de 94 cm de large est dérobée à 1 h du matin. Il est contrôlé 3 mn plus tard par les policiers, à quelques mètres de là. Mais comme il n’a pas la télé sur lui, il peut nier tranquillement et continue au procès. Enfin, le 21 juin, à 16h30, il braque une maison. Puis à 18h30 une autre, fouillant tout le premier étage pendant que la propriétaire est au rez-de-chaussée. Elle appelle les gendarmes qui le serrent à la sortie.

De fait en fait, c’est une délinquance habituelle qui se voit décrite. De ses filières, de ses revendeurs, l’on ne saura rien. Sinon qu’ils sont de la même communauté. C’est un mode de vie fondé sur le vol et le trafic. Des forfaits au hasard, peu préparés. L’accusé est presque sûr dans les quartiers pavillonnaires de trouver les maisons vides la journée. Comme il ne risque pas grand chose, il ne prend pas de précaution, ni de gants, ni de cagoule. Et dès qu’il y a une alarme, il fuit.

Inscrit au GASPROM – une association d’aide aux migrants – l’accusé dit être rémunéré 310 euros par mois pour une formation de soudeur dispensée par un obscur centre de formation. Il ne la suit pas, « la faute aux flics« , dit-il.

Pour le prévenu, ce sont les Arabes qui sont responsables de l’insécurité

Le procureur, qui se rappelle la toile de fond des 30 cambriolages, s’appesantit sur le fait lui même : « derrière le vol d’objet, il y a le vol d’une histoire, derrière le poids du métal il y a la force, la charge des souvenirs de famille. Le viol d’une intimité, la remise en cause de ce que le domicile est un lieu protégé d’un monde extérieur violent. » Il fustige aussi la propension du prévenu à faire des Arabes les responsables de l’insécurité, « comme s’il fallait à tout prix trouver des responsables en-dehors de [sa] communauté« . Et, compte tenu de sa première peine (4 mois ferme), il demande de 18 à 24 mois ferme.

L’avocate s’appesantit sur la mère souffrante dont l’accusé serait le seul soutien, sur l’enfant né en Roumanie et qui viendra en France – illégalement on s’en doute. Les juges délibèrent : neuf mois ferme, maintien en détention et 150 euros de dédommagement pour une victime. Dinu repart entre deux gendarmes, les Roumaines assises au fond de la salle lui font leurs adieux en sanglotant. Pour neuf cambriolages, neuf mois ferme dont il fera à peine sept, les réductions automatiques de peine lui retirant 63 jours quelle que soit sa conduite en prison, et une indemnité misérable que la victime ne recevra jamais. Une peine équivalente à celle infligée  à Anne-Sophie Leclère, ex-tête de liste FN aux municipales à Rethel, pour avoir comparé la ministre de la Justice, Christiane Taubira, à un singe.

Photo : DR
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