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M. Castaner, voyez ce qui arriverait si l’émotion dépassait les règles juridiques…

« Les manifestations ne sont pas (autorisées) dans les faits car il y a un décret du Premier ministre dans le cadre de la deuxième phase du déconfinement qui interdit les rassemblements de plus de dix personnes. Mais je crois que l’émotion mondiale, qui est une émotion saine sur ce sujet, dépasse au fond les règles juridiques qui s’appliquent ».

Cette phrase folle – qui invite clairement à s’affranchir de la loi – ne vient pas d’un militant d’extrême gauche, ou d’un associatif voulant influencer notre société. Non, cette phrase vient du ministre de l’Intérieur de la République française, Christophe Castaner.

Elle est d’autant plus irresponsable que prononcée dans un contexte où une minorité bénéficie de l’oreille attentive et émotive du gouvernement, là où ce dernier demande au peuple de se confiner, de la fermer, de ne pas se rassembler, et surtout, de combattre le racisme, cause bien plus importante que celle des hôpitaux qui déraillent, de ces entreprises et usines qui vont fermer, de ce pays qui ressemble à une poudrière identitaire et sociale…

Alors Monsieur Castaner, je vous écris cette lettre pour vous faire voir ce qui arriverait si l’émotion venait à dépasser les règles juridiques…

Mettrez-vous, là aussi, le genou à terre pour soutenir ceux qui, comme vous, se seraient laissés submerger ?

Je pense à ce buraliste, cambriolé déjà dix fois par des individus que vos services n’osent plus poursuivre sous peine de voir l’équivalent de la famille Traoré menacer de mettre le pays à feu et à sang. Un jour, submergé par l’émotion et par la peur, et par la colère, il pourrait bien dépasser les règles juridiques instaurées dans notre contrat social. Et régler ce que vos services, terrifiés par la bavure, dépités par une magistrature rouge, sont incapables de régler pour assurer son droit fondamental à la sécurité et à la liberté d’entreprendre sereinement.

Je pense à ce père de famille, arrachant à sa fille au bord du gouffre et du suicide, les aveux d’un harcèlement scolaire quotidien et ignoble mais aussi de violences sexuelles inimaginables pour une enfant de 12 ans, simplement parce que cette famille n’aura pas eu les moyens financiers et professionnels de quitter une banlieue où les autochtones servent désormais de chair à canon pour les expériences de nouveaux barbares protégés à la fois par une minorité qui ne reflète ni leur corpulence, ni leur attitude, ni leur comportement, mais également par leur statut de victimes immigrées et d’enfants rois. Lui aussi, lorsqu’il songerait à aller rendre la justice, au nom de sa fille, parce que vos policiers auront reçu l’ordre de ne pas interpeller dans la cité désignée par la victime, il faudra comprendre l’émotion qui dépasserait forcément les règles juridiques.

Je pense à cette maman trouvant son fils décédé d’une overdose de crack parce que vous avez laissé des individus rentrer et dealer cette saloperie à quelques encablures de votre ministère. Peut-être l’émotion dépasserait-t-elle les règles juridiques la concernant, le jour où elle irait demander des comptes au dealer remis en liberté pour cause d’un vice de procédure ou parce qu’un procureur aurait compatit… avec le « lourd passé » du dealer en question ?

Je pense à ces parents, ces frères, ces sœurs, ces amis, qui voient chaque jour les leurs tomber, dans l’anonymat relatif d’une certaine presse quotidienne régionale qui n’a pas encore totalement perdu le sens de son travail… Dans l’indifférence du show-business et de la grande presse mainstream. Dans le mépris de l’oligarchie. Là aussi, l’émotion pourrait dépasser les règles juridiques à force d’injustice…

Je pense à ces milliers de jeunes autochtones, humiliés au quotidien dans leur propre pays, niés dans leur identité, abandonné dans leur sécurité, méprisé dans leur quotidien, et qui eux aussi, submergés par l’émotion, pourraient descendre sans doute un jour dans la rue en dépassant les règles juridiques, pour reprendre le contrôle de leurs vies et de leur avenir en commun.

Je pense à ces millions de Français, qui vous ont vu, M. Castaner, courber l’échine face à une minorité agissante et tirer une balle dans le dos d’une police qui sait déjà que beaucoup dans ce pays peuvent avoir des griefs (légitimes parfois) contre elle.

Des griefs qui n’empêchent pas que des millions de Français silencieux soutiennent leurs policiers ou leurs gendarmes, à qui ils délèguent le droit (qu’on le regrette ou pas, c’est un fait) de faire usage de la force contre les délinquants et contre la racaille qui mène déjà la guerre civile sur notre sol.

Et cela quoi qu’en disent quelques célébrités qui devraient être évincées du débat public car ne payant pas leurs impôts en France et dont les niveaux de revenu les placent hors de notre monde.

Vous voyez Monsieur Castaner, sur cette poudrière qu’est la France aujourd’hui, il y a des millions d’individus qui pourraient, eux aussi, avec leur propre légitimité, faire primer l’émotion sur les règles juridiques…

Des millions d’autochtones (ou pas) qui ne sont pas Noirs, donc qui ne vous intéressent pas.

Ils ne sont pas Noirs. Mais rouges de colère…

Julien Dir

Précision : les points de vue exposés n’engagent que l’auteur de ce texte et nullement notre rédaction. Média alternatif, Breizh-info.com est avant tout attaché à la liberté d’expression. Ce qui implique tout naturellement que des opinions diverses, voire opposées, puissent y trouver leur place.

Illustration : DR
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