L’enquête avance rapidement sur les motifs de la fusillade qui a coûté la vie à Esteban Le Costevec, âgé de 18 ans, rue Théophile Guillou à Saint-Herblain. Il apparaît, d’une, qu’il n’a pas été visé par hasard. Et qu’ensuite cette fusillade s’inscrit dans une guerre entre barons de la drogue, et une stratégie de terreur pour faire fermer les points de deal concurrents.
Une mort qui ne doit rien au hasard
L’endroit où Esteban est mort n’a rien du hasard : c’est un hall d’immeuble qui abritait un point de deal de drogue assez actif. Autre élément troublant : à l’arrivée de la police, son téléphone n’était plus dans sa sacoche, restée avec ses amis – elle a été découpée et le téléphone, récupéré par un inconnu.
Le point de deal de la rue Théophile Guillou dépendrait de dealers déjà épinglés récemment, aux Dervallières, pour avoir tiré au domicile d’un père de famille du quartier qui refusait que son fils devienne rabatteur pour eux. « Vu que les chefs sont en fuite ou en prison, la place chaude attirait du monde », commente un policier nantais.
Montée en puissance de la guerre entre barons de la drogue
De plus, les policiers nantais observent depuis plusieurs années la montée en puissance de la guerre entre barons de la drogue. « Deux familles sont en concurrence avec des trafiquants en fuite à l’étranger qui ne peuvent plus gérer, mais déléguent à des jeunes d’une vingtaine d’années, en soif de thunes. Ces derniers n’hésitent pas à sortir la kalach dès qu’il y a un problème. Et à faire règner la terreur ».
Par le passé, plusieurs trafiquants nantais avaient déjà pris la fuite à l’étranger. Citons par exemple Salah Ahmed Yousfi, connu pour vols aggravés, séquestration et infractions liées aux stupéfiants. Evadé de la maison d’arrêt de Ploemeur en 2002 avec l’aide de Franck Couchoullou, autre trafiquant notoire, il avait été condamné par la cour d’appel de Rennes à 15 ans de prison par contumace pour vols agravés.
Depuis son évasion, « Saïd l’émigré » avait rejoint l’Algérie sous une fausse identité où il a fini par tomber – vingt ans ferme cette fois – pour avoir commandité l’enlèvement d’un enfant de 7 ans, Amine Yarichène, car l’associé de son père avait contracté une dette de 4 millions d’euros envers lui. En Algérie, il était d’ailleurs devenu un baron de la drogue – 5 tonnes de résine de cannabis lui appartenant avaient été saisies en 2009, mais il avait fui au Maroc voisin. Il a depuis été condamné, début 2019, à la prison à perpétuité pour le trafic de 11 tonnes de résine de cannabis, et s’est aussi impliqué dans un trafic transnational jugé en 2018 à Rennes qui fournissait plusieurs pays européens dont la France.
Dix fusillades en deux ans à peine
La fusillade de Saint-Herblain qui a coûté la vie à Esteban peut être rapprochée d’une autre affaire récente. Au 5 rue de Charente, près du domicile d’un dealer, le même point de deal très actif a été la cible de trois fusillades, le 28 et 29 juin derniers. Depuis, il a fermé. « Un point de deal en moins, les clients vont ailleurs, comme pour un tabac ». Autant de gagné pour les autres points de deal, notamment sur la place centrale de Bellevue – où ont eu lieu au moins dix fusillades en deux ans à peine.
Louis Moulin
Photo d’illustration : DR
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine
Une réponse à “Nantes. Esteban, victime de la guerre des gangs de la drogue ?”
[…] http://www.Breizh-info.com […]