Bernard Rio, décidément inépuisable, gratifie les amoureux de la Bretagne d’un ouvrage de référence (un pavé de 600 pages) qui fait office d’encyclopédie et de dictionnaire : 1 200 lieux de légende en Bretagne.
Un répertoire de tous les lieux légendaires, insolites ou mystérieux de Bretagne
Il a répertorié, de manière presque exhaustive, tous les lieux légendaires, insolites ou mystérieux des cinq départements bretons. Le solide appareil critique qui référencie les meilleurs auteurs – Cadic, Guiyonvarc’h, Le Braz, Dom Lobineau, Sébillot, Luzel… – est là pour attester du sérieux de son travail.
Il a fait appel à Anne Courtine, une artiste qui travaille au pastel sec (un medium ô combien délicat) pour illustrer son propos. Ce qui donne une suite d’illustrations « plein pot » à la fois fortes et raffinées.
Tout est à dévorer. Rio pratique la mémoire longue, qui puise aux racines néolithiques et celtiques pour remonter jusqu’à nous et nous parler.
J’en prendrai ici un seul exemple, Indre sur la rive gauche de la Loire, à l’entrée de l’estuaire, à dix km. en aval de Nantes. Hermeland (645-720), venu de Noyon, a échoué là. Il y a fondé un ermitage. On lui attribue une foule de miracles et l’Église l’a canonisé.
La grotte du coucou, à Indre
A Indre encore, ou plutôt à Haute-Indre, on voit encore la grotte du coucou : « Jusqu’à la Révolution, les nouveaux mariés de l’année devaient jouer à la quintaine pour respecter un droit seigneurial. Ce jeu d’adresse consistait à abattre avec une lance un mannequin accroché à un mât. S’ils échouaient, ils étaient recouverts de glue et de plumes et devaient passer sous la roche en battant des ailes et en criant coucou. »
Toujours à Indre, le lieu-dit « Bon Ami » intrigue. Il s’agit en fait d’un paroissien catholique invétéré, raflé en 1793 et envoyé par le fond, dans la « baignoire nationale », chère à Carrier, la Loire. Son corps échoua à Indre et on l’enterra, sa tombe devint l’objet d’une dévotion populaire. L’Eglise concordataire (1801) interdit ce « culte superstitieux ». On a mis du temps à découvrir que « Bon Ami » était le surnom du curé réfractaire Joseph-Dominique de Maynac ». Un drame qui anticipe celui de Steve (2019) disparu quai Wilson à Nantes. Mais sous la Terreur, on ne risquait pas de remonter la rue Crébillon avec une pancarte : « Où est passé Joseph-Dominique ? »
Tout bien compris, le livre de Rio est formidable.
Jean HEURTIN
* Bernard RIO, 1 200 Lieux de légende en Bretagne, Coop breizh, 29,90 euros.
Crédit photo : DR
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