Après les élections européennes, si le Rassemblement national pavoise, le reste de la droite – souverainiste ou non – a la gueule de bois. Si tout au moins on ne considère pas LREM comme un parti de droite – une partie notable des bourgeoisies de droite et de gauche ont en effet voté Loiseau, faisant du vote LREM un vote de classe, comme l’expliquait Jérôme Fourquet dans L’Humanité ce mardi 28. Dans ce contexte, Robert Ménard, maire de Béziers, a répondu à nos questions sur les européennes… et sur son nouveau livre, publié fin avril aux Editions Mordicus, Un maire ne devrait pas faire ça.
Breizh-info.com : Robert Ménard, vous annoncez que vous vous représentez en 2020 ?
Robert Ménard : Bien sûr. On va finir ce qu’on a commencé et étendre les travaux à toute la ville.
Breizh-info.com : Que pensez-vous du verdict des européennes, et de la victoire du RN ?
Robert Ménard : Je n’étais pas partie prenante. J’avais appelé à voter RN car c’est le vote le plus utile. Qu’ils soient en tête c’est une bonne nouvelle, puis le RN a aussi changé beaucoup sur l’Europe, il ne demande plus d’en sortir, de quitter l’euro. Je m’étais élevé contre ces sorties qui n’ont pas de sens. Par ailleurs sur leur liste il y a des gens qui ne sont pas RN, si bien qu’ils réalisent au moins en partie cette union des droites que je demande depuis longtemps.
Breizh-info.com : Vous avez essayé l’union des droites au sein des Amoureux de la France, en vain ?
Robert Ménard : Et je considère que c’est en effet un échec. Chacun veut réunir autour de soi, de sa chapelle, c’est la guerre des chefs – alors que l’union des droites passera sur le terrain, au niveau des gens.
Breizh-info.com : Quel score fait le RN sur votre ville ?
Robert Ménard : 37.6 % [contre 35 en 2014 avec 6 points d’abstention de plus], ce qui est bon signe pour les municipales. LREM est second loin derrière avec 17%.
Breizh-info.com : Et Hamon, qui était venu vous narguer en mangeant un kebab à Béziers ?
Robert Ménard : Il a fait 3% et a démissionné de son parti [en réalité il a annoncé « prendre du recul »], il aura bien le temps d’en manger maintenant.
Breizh-info.com : Que pensez-vous du score de la droite, en pleine déroute ?
Robert Ménard : Je ne me réjouis pas de leur mauvais score, pas plus que de celui de Nicolas Dupont-Aignan. Il faut des partis de droite forts pour réaliser l’union des droites, et je connais tant Bellamy que Dupont-Aignan, c’est d’une grande tristesse.
Breizh-info.com : Avez-vous tout au moins une explication quant au score de la droite ?
Robert Ménard : La stratégie de la droite de s’allier avec le centre, ce n’est pas bon. L’alliance naturelle de la droite, c’est le RN.
Breizh-info.com : Que pensez-vous du score d’Europe Ecologie les Verts, et dans une moindre mesure, du Parti animaliste (2.1%), auteur d’une performance surprenante au vu de sa campagne minimaliste ?
Robert Ménard : Il y a une réelle sensibilité écologiste à prendre en compte, ce que je ne fais peut être pas assez. Cependant à titre personnel depuis plusieurs années je ne mange ni viande ni poisson, et deux de mes enfants, pareil.
Breizh-info.com : Vous venez d’écrire un livre, quel en est l’objectif ?
Robert Ménard : Faire le point sur notre expérience et en tirer des leçons. Pour moi et les autres.
Breizh-info.com : Quelle est-elle ?
Robert Ménard : Il faut 1 – du boulot, 2 – l’union des droites, 3 – du pragmatisme, 4 – du bon sens et 5 – de l’enracinement.
Breizh-info.com : Vous parlez aussi de vos démêlés avec la presse et l’Église
Robert Ménard : Je fais face à des journalistes qui ont des engagements politiques. Dès le lendemain de notre victoire, Midi Libre disait qu’ils allaient nous surveiller, qu’ils allaient nous avoir à l’oeil. Ils ne l’ont jamais fait pour aucun maire de Béziers. Ce sont des militants, pas des journalistes. Ils ont d’ailleurs fait cinq procès en diffamation contre les propos affirmés dans le journal municipal – le seul de France qui est bien lu et ne finit pas à la poubelle aussitôt qu’il est mis dans les boîtes aux lettres – et ils les ont tous perdus.
Breizh-info.com : Et l’Église ?
Robert Ménard : Une partie de l’Église est une association humanitaire pro-migrants, normalement ça devrait être tout autre chose.
Breizh-info.com : Vous allez faire plus qu’un second mandat ?
Robert Ménard : Non, je serai trop vieux.
Breizh-info.com : Vous prendrez votre retraite alors ?
Robert Ménard : J’ignore ce que c’est. Non, je vais continuer mon métier, écrire. Je travaille d’ailleurs à un nouveau livre sur le populisme.
Breizh-info.com : A propos de populisme, nous avons interviewé Andréa Kotarac, le transfuge de LFI qui a rejoint le RN, qui explique qu’alors que les Gilets jaunes soulèvent des urgences sociales, LFI répond par des réunions en non-mixité et de l’écriture inclusive. C’est cet abandon du populisme de gauche qui l’aurait fait changer de camp. Qu’en pensez-vous ?
Robert Ménard : Il a absolument raison. Voilà pourquoi plein d’électeurs de LFI ont voté RN et referont pareil aux municipales. Quant au PCF, il pèse 2%, à peu près le même score que le chien du Parti animaliste.
Breizh-info.com : Rencontrez-vous toujours la même hostilité des décideurs et journalistes parisiens ?
Robert Ménard : Ils n’ont pas changé d’avis. Mais se sont fait une raison. Ils pensaient que notre phénomène serait balayé par les années, alors qu’on s’enracine. Ils n’ont pas fini d’entendre parler de Béziers.
Propos recueillis par Louis-Benoît Greffe
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