On raconte qu’en privé, Emmanuel Macron traite François Hollande de « zigoto » (Le Canard enchaîné, 2 mai 2018). Il est vrai que la fameuse sortie de ce dernier sur le plateau du Quotidien (TMC), le 25 avril, le fait entrer dans cette catégorie. Yann Barthès l’interrogeait à propos de Macron : « Le ‘président des riches’, c’est ce qu’on entend beaucoup, c’est ce que vous pensez ? » Hollande répond vivement : « Non, ce n’est pas vrai ! » Il marque une pause : « Il est le président des très riches… ».
Hollande a la mémoire courte. Sinon il se serait souvenu qu’il était l’invité de François Pinault à Dinard – où le milliardaire possède une magnifique villa – quelques mois plus tôt (Ouest-France, Ille-et-Vilaine, 30-31 décembre 2017 -1er janvier 2018). Or Pinault n’est pas « riche », mais « très riche ». Dans le classement des 100 Français les plus riches établi par Capital (juillet 2018), François Pinault figure en cinquième position ; sa fortune y est évaluée à 21,44 milliards d’euros, soit une progression de 73,6% par rapport à 2017 ! Si bien que Hollande a logé à Dinard chez un « militant socialiste » d’un genre très particulier. Ce sont donc des gens simples (François Pinault, François Hollande et Julie Gayet) qui se sont baladés sur les bords de mer, n’hésitant pas à prendre la pause pour la plus grande joie des promeneurs.
François Pinault et Julie Gayet : en relation d’affaire depuis longtemps
Car Pinault et Gayet sont en relation d’affaire depuis longtemps. D’abord, un souvenir de famille les unit. « Le patron breton a autrefois racheté l’affaire d’un grand-oncle de la comédienne, importateur et marchand de bois à Landerneau, dans le Finistère ». Ensuite la productrice sait où s’adresser pour trouver des fonds « lorsqu’elle décide de produire 8 fois debout de Xabi Molia, c’est à sa porte qu’elle frappe pour solliciter son aide pour le développement du projet de sa petite société, Rouge international. François Pinault lui accorde un prêt de 500 000 euros. En juillet 2013, ce dernier devient l’associé de Julie Gayet dans Cinémaphore. Une souscription modeste (à hauteur de 60 parts dans la société nouvellement créée), mais un parrainage éclatant de la part de l’ami de Jacques Chirac qui se rapproche de François Hollande » (L’Obs, 15 octobre 2015).
Hollande et Pinault : deux vieux copains
François Hollande avait donc raison de déclarer : « Je sais ce que je dois à la Bretagne » (Le Monde, vendredi 6 décembre 2013) ; il faisait évidemment référence à ses bons scores obtenus dans la région à la présidentielle de 2012 (55,78% au second tour). Aujourd’hui, cette phrase pourrait être tournée ainsi : « Je sais ce que je dois à la Bretagne et à François Pinault ». Au fond, ce sont deux vieux copains. Pinault a tout de suite joué la carte Hollande. Le premier n’hésite pas à déclarer qu’il a voté pour le second et il assume son vote dès le début du quinquennat : « Si vous voulez me faire dire que je regrette d’avoir voté François Hollande, vous n’y parviendrez pas. Non, je ne regrette pas. (…) On est dans une situation très difficile. Il faut un peu de compréhension. Moi, je trouve que François Hollande est pondéré, à l’écoute. Il est très réactif. Je lui envoie des SMS, il répond. Il essaye d’écouter les points de vue des uns et des autres. Entend-il ? On verra. Je suis serein. Il y a déjà des évolutions dans les paroles. » (Le Figaro, 1-2 septembre 2012).
Mais Hollande n’est pas un ingrat ; il a su renvoyer l’ascenseur à son ami Pinault. Un exemple : « Alors qu’il officiait à l’Élysée au côté de François Hollande, Macron adorait faire rire ses petits camarades en raillant le « milliardaire favori du Président », qui n’hésitait pas à mobiliser clandestinement sa ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, pour l’aider à implanter en Chine sa maison de ventes, Christie’s. » (Le Canard enchaîné, 27 juin 2018). Il ne reste plus à Pinault qu’à organiser dans sa villa de Dinard (Greystones) une signature de livres : avec François Hollande, bien entendu, pour dédicacer Les leçons du pouvoir (Stock). Un excellent endroit pour expliquer à ses lecteurs : « La finance a été mon adversaire, nous lui avons porté des coups. » (Le Monde, jeudi 7 juin 2018).
Bernard Morvan
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