United colors of Benetton et un pont effondré à Gênes, quel rapport ? le propriétaire, la famille Benetton. Le viaduc effondré à Gênes, un pont Morandi construit dans les années 1960 et sommairement réparé en 2016, s’est effondré en faisant 39 morts dont 4 Français. Il y a encore 10 à 20 disparus et le parquet de Paris a ouvert une enquête pour homicide involontaire.
Onze ponts se sont effondrés en Italie en cinq ans, dont celui de Gênes, deux en Sicile – dont un tout juste inauguré, un en Calabre, deux en Sardaigne – et un dans les Marches. Des dizaines de milliers des 45.000 ponts italiens ont dépassé les cinquante ans de leur durée de vie théorique et peuvent s’effondrer. Le gouvernement italien a lancé un audit sur les infrastructures qui risque de donner une réalité chiffrée pour deux problèmes déjà connus : le sous-investissement dans les infrastructures et les malversations dramatiques et constantes dans les travaux d’infrastructures et de BTP – souvent en retard et sources d’énormes profits surtout pour la Mafia.
Le viaduc supportait une autoroute concédée à Autostrade per Italia, filiale du groupe Atlantia lui-même propriété à 30% de la famille Benetton. Suite à l’effondrement du pont, plutôt que la révocation de la concession qui pourrait conduire à une indemnisation pour les propriétaires, le gouvernement italien s’apprête à infliger une lourde amende au concessionnaire, qui savait depuis 2017 les fragilités lourdes du pont.
Atlantia est aussi l’actionnaire principale d’Abertis depuis avril 2017 et de Getlink (ex-Eurotunnel), et a donc des biens en France, dont la SANEF (société d’autoroutes du nord et est de la France), mais aussi au Brésil, en Pologne, au Chili, aux USA et en Inde. Atlantia possède les aéroports Fiumicino et Ciampino à Rome, Nice, Cannes-Mandelieu et Saint-Tropez en France. Une de ses filiales, Ecomouv’, a failli mettre en place l’écotaxe en France en 2013-2014.
Cependant la famille Benetton est nettement plus connue pour le groupe textile éponyme, et son slogan « United colours of Benetton ». Et notamment pour de la propagande à grands frais en faveur de l’immigration sans contrôle et de la diversité, pour vendre des vêtements forts chers que bien des migrants ne sont pas en mesure de s’offrir.
Mais qu’ils peuvent avoir fabriqué : Benetton a été mouillée dans le scandale d’enfants turcs au travail pour fabriquer des vêtements de sa marque en 1999 : « Benetton. Ceux des affiches où petits blancs, noirs et asiatiques se donnent la main. Ceux des campagnes publicitaires-chocs qui dénoncent les misères du monde, avec une attention toute particulière envers les enfants », relève alors Le Soir. Benetton n’y a rien appris, et n’a fait seulement que changer de pays : en 2013, ses ateliers s’effondrent au Rana Plaza, en 2015 le groupe italien promet 1.1 millions de dollars aux 1138 victimes et 2000 blessés. Pas de pointure du barreau italien pour les défendre, eux.
Fidèle au photographe Oliviero Toscani, Benetton ne cesse de développer une publicité de masse qui a valeur de « message sur l’Humanité » pour porter ses ventes. « Benetton va plus loin, élimine le produit et diffuse sa vision du monde par le biais d’une publicité militante de plus en plus extrémiste » (Communication & Language, 1992, n°94). Luciano Benetton « participe complètement à l’élaboration de ces campagnes. Son objectif : faire fraterniser tous les peuples. Ce serait donc un humaniste épris de liberté, ses convictions passeraient donc au travers de ses publicités ».
Luciano Benetton s’était retiré de Benetton en 2008. Mais l’entreprise, confiée à des managers extérieurs a décliné bien qu’elle ait continué (ou parce qu’elle a continué ?) à célébrer la diversité. En 2017 il était revenu aux affaires à 82 ans, en constatant que l’entreprise était passée de 155 millions d’actifs à 81 millions de passifs. Près de 600 millions d’euros de pertes ont été accumulées par une gestion suicidaire, les pulls arrêtés, l’Amérique abandonnée, les magasins devenus « sombres et tristes comme ceux de la Pologne communiste ».
Et surtout, avait-il souligné, sa famille « avait beaucoup élargi son portefeuille d’activités ; allant dans la restauration, les autoroutes, les infrastructures, les aéroports. La mode, d’activité principale est devenue marginale ». Et pendant qu’elle ramassait le cash et célébrait la diversité, la famille Benetton en a oublié d’innover et d’investir.
Les italiens le paient maintenant cash, ainsi que la ville de Gênes, « coupée du monde » et où plusieurs immeubles situés sous le pont effondré devront être détruits , entraînant le déplacement de 634 personnes ; 55.000 emplois y sont menacés et le port serait paralysé à court terme. C’est bien plus que l’effondrement d’un viaduc : c’est aussi celui d’un système, et d’une marque.
Louis Moulin
Crédit photos : Wikimedia Commons (CC/Ricardo Ricote Rodríguez)
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