Quimper. Un festival de théâtre subventionné fait polémique

17/12/2014 – 07H00 Quimper (Breizh-info.com) – Depuis le 6 décembre dernier et jusqu’au 21 décembre se tient à Quimper mais aussi dans plusieurs autres communes du Finistère le festival «Théatre à tout âge» dirigé par l’association «très tôt théâtre» dont l »objet déclaré en préfecture est de « développer le secteur spectacle vivant en direction du jeune public et de leur famille, en particulier dans les domaines de la création, de la diffusion, de la formation et la sensibilisation des publics et des acteurs concernés ; développer les partenariats ouvrant à des formes artistiques diverses : arts plastique, visuel, numérique, etc. en lien avec le spectacle vivant ; assurer la gestion d’équipements accueillant ses activités ou celles de tiers dans le cadre des missions définies par convention avec la Ville de Quimper ; cette convention pourra inclure des actions hors les murs.».

Très Tôt Théâtre est subventionné par de nombreux partenaires, dont la Ville de Quimper, Le Conseil général du Finistère, le Conseil régional de Bretagne et la DRAC Bretagne dans le cadre d’une convention d’objectifs fixés annuellement, ce qui signifie que l’association est collaboratrice de politiques publiques au service de tous.  Le festival et ses nombreuses représentations attirent chaque année environ 25 000 spectateurs et touche des subventions annuelles – en baisse – de plusieurs centaines de milliers d’euros.

A y regarder de plus près, le contenu est loin de faire l’unanimité et surtout d’attirer le public désireux d’accéder à une culture populaire – comme le stipule pourtant l’objet de la convention permettant le déblocage d’une manne financière non négligeable financée par le contribuable.

C’est d’ailleurs ce qu’a tenu à rappeler Ludovic Jolivet, maire de Quimper, lors d’une intervention en marge du festival devant les organisateurs et responsables associatifs, qui a d’une part donné un avis personnel et négatif sur la pièce intitulée « la maison » avant d’émettre un souhait : «Je veux qu’on ait un spectacle populaire, accessible, compréhensible par tous. (…) C’est les consignes que je donne. » . S’en est suivi un début de polémique provenant d’un milieu culturel habitué des subventions massives – mais peu enclin à la remise en question et à la critique, pourtant fondement même de l’expression artistique.

Pourtant, les propos du maire de Quimper n’ont rien de surprenant : «en quoi est-ce choquant qu’un représentant d’une collectivité avec laquelle l’association est partenaire – et qui reçoit un montant important de subvention publique donne un avis sur le contenu des productions proposées au public ?» s’exclame Ludovic Jolivet.

Un programme pas vraiment «populaire»

La pièce «la maison», jouée par « la compagnie Pernette » du Doubs, se propose d’être accessible dès 6 ans. Pourtant,  à lire la «note d’intention» rédigée par la troupe à propos de cette pièce, on s’interroge forcément sur des visées plus «bobos» que populaires de l’oeuvre : « La Maison est un projet de construction… chorégraphique.  L’organisation d’une longue série d’actions et réactions en chaîne qui font alterner le corps et l’objet, ou les entremêlent.
De diverses natures et de durées variées, ces séquences juxtaposées créeront la dynamique de l’ensemble. Temps d’effervescence, de suspension, avalanche d’actes brefs ; il s’agira de se laisser porter par la nature des ingrédients et de passer d’un monde à un autre en toute logique… Celle induite par les actions ou par les matières elles-mêmes. Qui sont les deux personnages présents sur scène ? Sont-ils seulement parfois des humains ? Nous éviterons toute « image figée »; pas de notion de couple, ni d’âge ni de sexe. Juste des êtres humains, des êtres actifs et parfois même des « corps matières ». Nous tenterons en effet, au travers d’une recherche sur les « états du corps », d’incorporer ceux-ci au dispositif scénique comme un seul et même organisme.
États mousseux, liquide, gazeux ; corps de bois, d’acier, de gomme, qui gonflent et dégonflent, coulent, mijotent et s’enflamment… En un mot se transforment.

Tout un programme, qui semble assez éloigné de la mission de service public en faveur d’un théâtre populaire comme pourraient l’incarner, par exemple, les «Fourberies de Scapin» ou «Ubu Roi» …

Que dire également de « Beauté Monstre», qui se présente ainsi : «Au départ, un défilé de mode, temple du glamour, de la jeunesse et de la perfection. Quand soudain, la belle mécanique déraille pour basculer dans une parade monstrueuse, peuplée de silhouettes déglinguées, loufoques, burlesques. Parfois étranges. Évoquer la lumière pour découvrir l’ombre. Effleurer la beauté, pour toucher la laideur. Montrer la norme, pour parler du hors-norme. Partir du costume pour raconter une histoire. « Beauté Monstre » fait tout à l’envers pour bousculer notre imaginaire.»

La culture monopolisée par la gauche

«Le scandale là dedans, ce sont les milliers d’euros versés à ces associations qui produisent un contenu élitiste, réservé à une petite cour où règne l’entre-soi» nous signale Thierry, comédien dans une petite troupe de théâtre antique qui a assisté à plusieurs représentations «afin de savoir de quoi je parle quand je critique» . « Je n’ai pas vu vu les familles des quartiers défavorisés de Quimper se précipiter au théâtre, et cela malgré des tarifs à bas prix proposés, c’est bien le signe que le contenu n’est pas approprié» poursuit-il avant de conclure : « le milieu de la culture est aujourd’hui totalement monopolisé par les gens de gauche qui empêchent toute autre expression que l’art et le théâtre contemporain. Il ne faut pas s’étonner ensuite que les salles de théâtre se vident et que les jeunes soient de moins en moins cultivés, puisque ce n’est absolument plus de la culture qui leur est proposé. Si un élu ou un politique dit cela, il se met tout ce milieu à dos. Si un artiste le fait, il est bon pour pointer au chômage. C’est normal, toutes ces associations et leurs salariés contrôlent le système dont ils vivent allègrement.». Détonnant !

Quoi qu’il en soit, à la mairie de Quimper, Ludovic Jolivet ne se laisse pas démonter par la polémique qui est née autour de ses propos : « en tant que municipalité, nous sommes amenés chaque année à revoir les conventions passées avec les associations qui se voient attribuer ce genre de missions. Nous étudierons donc le programme du festival l’année prochaine – n’ayant pas voulu modifier ce qui avait été décidé par l’ancienne municipalité cette année.»

Photo : DR
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15 réponses à “Quimper. Un festival de théâtre subventionné fait polémique”

  1. Richard dit :

    Monsieur Jolivet replonge Quimper au temps de la monarchie absolue. Car ne nous cachons pas derrière un soi-disant avis que donnerait le maire de la ville, les mots, qu’il emploie, sont très clairs, il exige de la part de l’association Très Tôt Théâtre qu’elle recadre ses spectacles. Il les menace sous des termes déguisés: « changer de ligne sinon je vous coupe les vivres ». Le temps de la monarchie absolue est revenu à Quimper: Quimper a un roi et c’est M.Jolivet!

    De surcroît, qu’il n’aime pas, très bien. Qu’il pense que ce n’était pas adapté aux enfants, très bien. Mais a-t-il demandé aux enfants présents leur avis. En effet, certains enfants n’ont pas apprécié. Mais mon frère, qui y était avec son fils de 6 ans et deux amis de son fils, m’a dit que les trois garçons avaient adoré la représentation, et mon frère ne provient pas du milieu dépeint dans votre article, il est simple ouvrier du bâtiment, et les familles des deux autres enfants viennent aussi du même milieu.
    Vous dépeignez une image caricaturale du bobo qui se rend au théâtre et des gens de milieu beaucoup plus modeste, grossiers, incapable de s’ouvrir à la culture. Durant toute ma scolarité, j’ai souffert de l’image du fils d’ouvrier du bâtiment et de la mère au foyer, ce qui m’inquiète, c’est de voir que les choses n’ont pas changé pour mes neveux et nièces. Bien entendu, les plus modestes se rendent moins à des évènements culturels que le public que vous dépeignez, mais c’est à cause d’articles comme celui-ci et du classement systématique qui est fait de la société qui le causent. Le jour où l’on ne parlera plus des moins aisés comme étant des gens rustres, incapable d’ouvrir un seul livre, la société pourra commencer à évoluer vers le bon chemin.
    Donc je pense que tout est question de point de vue, comme c’est toujours le cas quand il s’agit d’un évènement culturel. Seulement, le maire au lieu de seulement donner son avis, impose son point de vue, recadre une association qui trime depuis belle lurette et a proposé un grand nombre de spectacles, dont il n’a vu peut-être bien qu’un seul exemple, et ordonne qu’on suive sa recommandation, avec menace à la clé…
    Quand un homme dit: « …je vous demande de faire attention […] le ton DOIT être donné dans cette direction là […] C’est les consignes que je donne. »; nous sommes dans le domaine de l’ingérence et de la menace! Monsieur Jolivet utilise le verbe devoir, pas le verbe pouvoir (le ton peut être donné = conseil, le ton doit être donné = ordre).
    L’homme ne voit pas l’ingérence. Alors monsieur le maire, je crois qu’il est temps que vous preniez des cours de sémantique, cela pourrait vous réapprendre le sens qu’ont les mots.

    Quant à monsieur Gonidec, il rêve. Il n’a apparemment pas entendu les propos exacts du maire. Monsieur Gonidec parle de « quelques lignes directrices » qui seraient un simple « fléchage »… Où voit-il le fléchage quand un homme ordonne la seule et unique direction qui serait à suivre…

    Le roi Jolivet devrait penser à dégonfler ses chevilles. Ce n’est pas parce qu’il est maire qu’il dispose de tous les droits. D’autant plus que sa ligne directrice et ses décisions depuis son arrivée sont plus que critiquables.

    • Marquette dit :

      « Ce que l’on consoit bien s’exprime clairement et les mots pour le dire arrivent aisément »

      Quel selmigondo! Greg

    • Denis dit :

      Richard,
      Je rejoins votre avis sur l’accès à la culture qu’il faut développer.
      C’est d’ailleurs le but que s’est donné l’association Très Tôt Théâtre et c’est aussi pourquoi elle est subventionnée.
      Subventionnée par le peuple et pour le peuple, en un mot : populaire.
      Et comment inciter voire initier un public réticent aux arts vivants autrement que par des spectacles accessibles et financièrement abordables ?
      Si on souhaite de plus inciter le jeune public il faut être extrêmement attentif à la programmation et éviter tout spectacle nécessitant d’être déjà initié, sinon le festival ne sert plus sa cause mais une autre, celle de son public déjà acquis.
      « La Maison » n’entre tout simplement pas dans le cadre de ce festival et je crois sincèrement qu’il n’y a rien d’autre à interpréter dans les propos du Maire. Je pense que beaucoup y ont vu ce qu’ils voulaient voir par seule volonté d’opposition.
      Au sujet de « La Maison », un père de famille à du répondre à son fils qui s’interrogeait sur ce spectacle que lui même n’y avait rien compris, croyez-vous qu’ils remettront les pieds dans un Théâtre ? Croyez-vous au succès de la « mission » de ce festival dans ces conditions ?
      A lire de nombreux commentaires contestataires sur cette « affaire », il est malheureux de constater que trop nombreux sont les membres d’élites auto-proclamées qui confondent « populaire » et « ringard ».

  2. Katell dit :

    Richard
    Merci de ne pas prendre ce qui est votre opinion pour vérité absolue. Je respecte votre opinion, mais elle n’est rien de plus qu’une opinion. C’est vous le monarque intolérant ici.
    Le maire de Quimper a été élu parce que sa sensibilité politique, sa vision de la cité quimperoise est celle qui a convaincue le plus grand nombre.
    Remettre en cause chaque année qui se verra attribuer une mission artistique est le meilleur moyen d’assurer la diversité de l’offre. Et aussi contrôler le budget. C’est donc une bonne chose.
    Pour ma part je pense qu’aucune association à but non lucratif ne devrait toucher de subvention car cela revient à obliger l’ensemble de la population à adhérer à la cause d’une association ( donc par nature un groupuscule d’individus) à leur issus. Rien de démocratique là dedans.

    • Richard dit :

      Vous m’avez mal lu, car je ne conteste pas une seule fois l’élection de monsieur Jolivet (je conteste ses méthodes et ses propos, je ne dis pas qu’il ne devrait pas être maire, je suis conscient qu’il a été élu avec plus de 50% des voix et en cela, jamais je ne dirai le contraire, cela dit, une élection n’autorise pas tout et ne doit pas empêcher les citoyens d’avoir un avis sur ce qu’il fait et dit), et je ne dis pas une seule fois que mon opinion est la seule et unique possible, je la donne, point. A moins bien entendu, que je n’en ai pas le droit, mais par la suite, vous me dîtes le contraire, puisque vous dîtes la respecter et en cela je respecte votre point de vue, également.

      Relisez-moi et vous verrez que je ne fait que donner mon point de vue, je ne dis pas qu’il faut adhérer à ce que je dis. De plus, je dis même respecter l’avis de monsieur Jolivet sur le spectacle, car il a le droit de donner son avis. Le problème vient du fait qu’il veut imposer son avis à ceux des autres, et là aussi, on sort de la démocratie. Enfin par une analyse sémantique des propos du maire, on est en dehors du domaine du conseil, on est dans le domaine de l’ordre.

      Monsieur Jolivet est le maire de Quimper, mais la ville ne lui appartient pas, elle est aux quimpérois…

      Quant à votre phrase sur le contrôle du budget, vous m’excuserez mais j’ai un autre avis que vous sur la question (vous pensez que la mairie ne devrait pas subventionner ce genre d’associations, c’est votre opinion, et vous en avez le droit; j’ai le droit pour ma part, de penser le contraire). Quand on sait que le maire de la ville a versé des indemnités (indemnités qui n’étaient pas obligatoires) au nouveau directeur général des services, en des temps difficiles pour tous les français, les quimpérois compris, je ne pense pas qu’il soit avisé de soulever la question du budget, ces temps-ci. Mais bien entendu, vous êtes toute aussi libre de penser que ces indemnités sont justifiées, mais peut-être pas (je préfère bien préciser que là n’est peut-être pas votre opinion, afin d’éviter tout nouveau malentendu), plutôt que de verser cet argent aux associations à but non-lucratif (là, je reprends juste ce que vous avez dit plus haut).

      Nous avons des opinions différentes, et tant mieux, c’est ce qui fait la richesse de la nature humaine.

  3. Marquette dit :

    Il y a une solution: supprimer totalement les subventions à ces guignols! Greg

    • Boissin dit :

      Entièrement d’accord. Qu’ils aillent au fond de la mine pour savoir ce que travailler veut dire eet qu’ils arrêtent de vivre sur le dos des autres ! Balayez-moi tous ces intermittents du spectacle…

    • Lienne56 dit :

      Pourquoi guignols? Vous n’êtes pas sensibles aux propositions de cette association (connue, reconnue comme précurseuse dans le domaine du théâtre jeune public), ça vous donne le droit de les insulter?

  4. jacques dit :

    supprimer les subventions purement et simplement . si le festival fait un bide , ce n’est pas aux contribuables de trinquer . ces guignols sont ok pour privatiser les bénéfices et pour mutualiser les pertes . raz le bol .sans compter qu’en plus nous nourrissons ces intermittants ad vitam éternam

    • Lienne56 dit :

      De quel bide parlez-vous? Vous devriez prendre la peine de regarder les chiffres de fréquentation du festival. Le festival attire de nombreux quimpérois et finistériens de toutes origines sociales. Mais votre vision toute étriquée des choses vous empêchent de le voir…

    • Lienne56 dit :

      Commentaire à classer parmi les éternelles rengaines du « mes impôts », « on nourrit une bande d’inutiles » etc. Connaissez-vous les retombées économiques (puisque seule cette donnée semble avoir grâce à vos yeux) d’un projet culturel dynamique pour un territoire? c’est loin d’être anodin. De plus, intermittents et salariés permanents du spectacle sont des citoyens au même titre que vous, qui paient des impôts, consomment, travaillent bien souvent sans compter (bien loin des clichés véhiculés de fainéants). Alors la création artistique, vecteur d’émotions, réflexions, n’est pas votre tasse de thé, ça vous regarde, mais dépassons les discussions de niveau comptoir de PMU, s’il vous plaît!

  5. gillic dit :

    A l’époque où faire des économies devient obligatoire pour sauver le pays, il est temps de supprimer toutes ces subventions ! Et par la même occasion, toutes ces associations d’ inutiles ……….Ras le bol !

    • … … …
      Tellement d’accord avec tous ces commentaires.

      « Ras le Bol » de « ces associations d’inutiles………. » qui roulent sur l’or publique pour nous présenter quoi ?
      De la diversité ? Mais nom de dieu (excusez-moi je m’emballe) avec la TNT y en a pas de la diversité ?
      Et en plus tout le monde a la télé. De plus, sur notre canapé on n’est pas obligé de sortir de chez nous. Franchement de nos jours qui se souci de voir le monde différemment, de laisser la possibilités à nos enfants de voir des choses abordées sous l’angle des problématiques que se posent les artistes d’aujourd’hui ? Personne ! Qu’on arrête de nous voler notre temps pour essayer de nous faire voir le monde différemment.
      Le monde est déjà assez compliqué comme ça, qu’on nous laisse tranquille !

      Quand à ceux que ça intéressent, qu’ils le fassent par leur propre moyen, qu’ils se débrouillent (je respecte leur choix) et on verra si ils peuvent rivaliser avec la Société du Spectacle* qui détruit peu à peu le vivre ensemble et, depuis plus de cinquante ans, abêtit à vitesse grand V les honnêtes citoyens.

      Dans tous les cas merci à l’amateurisme politique de Ludovic Jolivet qu’il ballade sans langue de bois dans ses gros sabots tâchés d’inculture, pour nous offrir l’occasion de débattre de vraies questions de choix de société.
      Et joyeux noël sous les (sublimes) décorations de Quimper (le plus grand centre commercial de Cormouaille !).

      Monde de m****…

      * Guy Debord, La Société du spectacle, Paris, Gallimard, 1967.

    • Lienne56 dit :

      Commentaire qui fait froid dans le dos… L’art serait donc inutile? Tout ceci ne sent pas très bon…

  6. Yves Lorella dit :

    Il serait judicieux pour Quimper ainsi que pour son Maire de faire un parcours complet sur le financement de toutes ces Associations sans oublier les agences de communication qui sont elles aussi une charge non negligeable pour Quimper ainsi que pour d’autres villes….

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