L’orgie des dépenses militaires US : l’exemple accablant du programme F-35

Il est des spectacles si confondants qu’ils ne laissent place qu’à la stupéfaction. L’orgie des dépenses militaires outre-Atlantique, dénoncée par plusieurs voix indépendantes, en est un. Tandis que l’Amérique s’enorgueillit de sa puissance industrielle, ses errements budgétaires dans l’armement atteignent une démesure inquiétante. La récente tribune de Laura Loomer sur X, la pasionaria qui a l’oreille du président Trump, relayée par de nombreux médias conservateurs, sonne comme une sonnerie d’avertissement pour ce que fut jadis la discipline rigoureuse du complexe militaro-industriel.

Dans son post sur X, Laura Loomer traduit un amer constat : « Nos soldats risquent leur vie avec des équipements défectueux, pendant que Lockheed Martin engrange des milliards sans jamais rendre de comptes ». À travers une analyse serrée, elle accuse Lockheed Martin d’avoir transformé le programme F-35, jadis promis aux gloires célestes, en un gouffre financier abyssal, sans fin ni fond. Selon elle, « chaque dollar investi semble nourrir davantage l’inefficacité que la défense nationale ». Elle traduit ainsi l’exaspération d’une partie de l’opinion américaine, lasse d’entretenir une caste d’industriels repus.

Le rapport du Pentagone daté de février 2025 confirme ces sombres diagnostics. Le F-35, au lieu d’atteindre sa maturité opérationnelle, multiplie retards et déficiences. Ainsi, la mise au point du système TR-3, indispensable au prochain saut technologique de l’appareil, demeure à ce jour retardée de plusieurs années. Pis encore, la fiabilité du F-35 reste inférieure aux standards requis : à peine 55 % de disponibilité pour l’aviation de l’US Air Force, et une moyenne de vol entre pannes critique de moins de deux heures. Un record d’indignité pour un programme ayant englouti plus de 2 000 milliards de dollars sur son cycle de vie projeté.

À ces errances techniques s’ajoutent des dérives idéologiques dont Laura Loomer se fait également l’écho. Elle stigmatise l’emprise du « wokisme » dans les rangs dirigeants de Lockheed Martin, incarnée par Shelly O’Neill Stoneman, responsable des affaires gouvernementales, farouche adversaire de Donald Trump et chantre de la diversité obligatoire. « Comment confier la sécurité nationale à une entreprise plus soucieuse de quotas ethniques que de victoire militaire ? », interroge Loomer. Une inquiétude d’autant plus vive que, sous couvert de modernité, Lockheed a institutionnalisé des programmes de «rééducation» idéologique de ses cadres, où l’homme blanc est décrit comme une relique honteuse d’une société raciste et patriarcale.

Un autre document, publié récemment, dresse un tableau accablant des failles systémiques du programme F-35. Outre son coût exorbitant à l’achat — bien supérieur aux publicités officielles —, l’appareil révèle une insoutenabilité logistique criante. Ainsi, pour chaque heure de vol, il nécessite jusqu’à neuf heures de maintenance, une proportion propre à paralyser tout déploiement prolongé. Les pièces détachées, souvent monopolistiques, se font rares, retardant réparations et mettant en péril la disponibilité opérationnelle des escadrilles.

Sur le plan naval, le constat est encore plus alarmant : les porte-avions et navires amphibies censés accueillir le F-35 sont surchargés, incapables de soutenir les exigences logistiques de cet aéronef capricieux. À titre d’exemple, l’USS Boxer, en 2024, n’a pu embarquer que six F-35B sur les dix prévus, faute d’espace pour les pièces et équipements indispensables. Cette situation, bien loin des plans initiaux de projection de puissance, affaiblit la flexibilité stratégique de la marine américaine en zone indo-pacifique, face notamment à l’expansionnisme chinois.

Ainsi, c’est à un triple échec que nous assistons : technique, financier et doctrinal. Le programme F-35 illustre une faillite plus profonde, celle de la gouvernance militaire américaine incapable de maîtriser l’ogre qu’elle a enfanté. Il révèle aussi, sous-jacent, le triomphe d’une mentalité de court terme, d’opportunisme commercial, et d’idéologie destructrice pour la puissance publique.

À l’heure où plusieurs pays européens — parmi lesquels la Belgique, la Pologne ou les Pays-Bas — ont succombé à l’attrait du F-35, malgré ses failles connues, il convient de rappeler que d’autres alternatives existaient. Le choix du Rafale, chasseur éprouvé, produit par Dassault Aviation, eût été non seulement plus rationnel économiquement, mais eût aussi permis de préserver une certaine indépendance stratégique du Vieux Continent. En sacrifiant leur souveraineté sur l’autel d’un mirage américain, nombre de gouvernements européens ont fait un pari dont le coût réel ne cesse, déjà, de leur apparaître.

À cela s’ajoute une comparaison saisissante, que seule l’impudence de notre époque semble vouloir ignorer. Tandis que le F-35 engloutit plus de 110 millions de dollars par exemplaire — sans compter ses frais de maintenance faramineux —, un simple scanner médical de routine, destiné à détecter un cancer chez un patient américain ordinaire, peut être facturé jusqu’à 7 000 dollars dans un hôpital privé. Ainsi, la vie d’un citoyen américain, l’espérance d’un enfant atteint de leucémie, pèse-t-elle moins lourd que l’achat d’un seul viseur électronique défectueux pour un appareil militaire ?

Un exemple récemment rapporté sur X montre qu’une clé à molette spécialisée pour le F-35 est vendue au prix de 6 000 dollars, quand un outil similaire pour un usage civil coûte moins de 50 dollars. La disproportion est vertigineuse. Plus tragique encore, cette gabegie militaire se double d’un système de santé où l’ordinaire des soins devient luxe, et où la souffrance, faute d’argent, se monnaie comme une marchandise.

Ainsi s’illustre, une fois de plus, la dérive d’une grande puissance qui, oublieuse du bien commun, préfère dilapider ses trésors dans des armes dysfonctionnelles plutôt que de guérir ses enfants.

Mais, comme il est de coutume dans les sociétés décadentes, il semble plus facile d’accuser les agents du réel que de reconnaître ses propres fautes. Le F-35 est désormais un monument élevé à la gloire funeste du complexe militaro-industriel moderne : hypertrophié, inefficace, arrogant — et pour tout dire, condamné à ruiner ce qu’il prétend protéger.

par Balbino Katz

Illustration : wikipedia (cc)
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3 réponses à “L’orgie des dépenses militaires US : l’exemple accablant du programme F-35”

  1. Poulbot dit :

    Eisenhower les avait prévenu qu’il fallait ce méfier du complexe militaro-industriel dans sont discourt de fin de mandat ;personnes ne la écouter.
    Cette avion est un fer a repasser , dés le début du projet le pentagon avait émis de grosse réserve dessus , mais les politiques alors en place en ont décider autrement ; l’avion coute une fortune , pratiquement impilotable sans tout l’assistance informatique de bords, incapable d’utiliser au mieux ses armements , et les pilotes n’en veulent pas; de plus en version export certaines fonction sont bloqués et seul le gouvernement américain peux autorisé leurs utilisation a distance, ne parlons pas des pièces détachés qui sont au compte goutte ; les nations Européenne qui ont acheter l’avion (les politiques, car les militaires n’en voulaient pas ) ce sont fait rouler dans la farine par le gouvernement et les fabricants US.

    En face il existe des avions comme le rafale , petit ,efficace et a l’entretient rapide , moins d’une heure pour changer un moteur qui est modulaire , au rencontre entre les aviation alliées, il bat pratiquement toujours les avions américains; il y a le Saab JAS 39 Gripen, Eurofighter Typhoon.
    De même On peux comparer également le char l’Abraham US, lourd peux maniable , gourmand en carburant avec sa turbine a gaz , d’un entretien lourd ; au Leclerc rapide , tir précis en roulant et a l’entretient rapide même sur le terrain; le Léopard Allemand dans la même tranche que le Lecler.
    Les industriels Européens cherche avant tout l’efficacité sur le terrain , la mise en oeuvre facile ainsi qu’une fabrication rapide.

    Les industriels américains ne cherche que le rendement financier pour les actionnaires, pas l’efficacité a tout les niveaux sur le terrain.
    Trump doit mettre fin a cette gabegie définitivement et écouter les militaires qui savent mieux que les politiques ce qu’il leur faut comme matériel.

  2. Pschitt dit :

    Laura Loomer, auteur d’une « une analyse serrée » sur un programme d’avion de chasse multimilliardaire ? Faut être sérieux ! Cette jeune activiste, simplement titulaire d’un petit diplôme de journalisme, traite d’une multitude de sujets avec toujours la même assurance alors qu’elle ne connaît rien à rien. Ce qu’elle dit sur le F-35 est peut-être vrai, elle ne tombe pas toujours à côté, mais il n’est sûrement pas raisonnable de se référer à elle comme à une source fiable.

  3. Franck dit :

    C’est la chute de l’empire romain d’occident.

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