L’attaque survenue ce jeudi 24 avril 2025 dans le lycée privé Notre-Dame-de-Toutes-Aides à Nantes, qui a coûté la vie à une lycéenne et fait trois blessés, prend un relief particulier avec la découverte d’un manifeste de treize pages envoyé par l’assaillant présumé, Justin P., 15 ans, peu avant son passage à l’acte.
Ce document, intitulé « L’action immunitaire », a été diffusé par le biais de l’espace numérique de travail (ENT) de l’établissement, dans ce qui apparaît comme une tentative de justification idéologique. Si l’enquête judiciaire et l’expertise psychologique du jeune homme sont en cours, les premiers éléments du texte, partagés par le média Frontières, jettent une lumière crue sur un mélange toxique de désespoir, d’idéologie radicale et de rupture totale avec la société.
🚨 Attaque au couteau à Nantes faisant un mort : voici le manifeste de l’assaillant Justin P. pic.twitter.com/XT0BkMbPra
— Frontières (@Frontieresmedia) April 24, 2025
Un manifeste structuré et formel
Rédigé dans un style académique parfois abscons, le texte développe une vision du monde profondément pessimiste. Structuré en plusieurs parties, il aborde successivement des thèmes environnementaux, sociaux et philosophiques dans un langage inspiré des écrits écologistes radicaux, teinté de références biologiques et sociologiques.
1. L’écocide globalisé : Justin P. dénonce la destruction de la planète, comparant l’humanité à une tumeur destructrice. Disparition des espèces, pollution chimique, réchauffement climatique sont vus comme autant de symptômes d’un système condamné.
2. Violence systémique et aliénation sociale : Le capitalisme, l’école, la technologie moderne y sont accusés d’être les instruments d’un esclavage mental. L’être humain est décrit comme un rouage broyé, déshumanisé.
3. Le conditionnement social : La critique se radicalise encore dans une troisième partie dénonçant un « totalitarisme culturel » où les normes imposées interdisent toute forme de liberté véritable. L’auteur fustige les médias et l’école comme outils d’endoctrinement.
Une fascination pour la biologie et le stress
Dans une partie surprenante, le manifeste se veut aussi physiologique : il aborde la résilience humaine à travers des notions issues de la biologie du stress (axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, cortisol), établissant un lien entre mal-être psychique et environnement social.
Cette tentative de scientificité, parfois incohérente, sert à légitimer son acte comme une réponse biologique extrême — une « action immune », un sursaut de défense contre un environnement perçu comme toxique.
Le document évoque également la situation française, dénonçant la désertification rurale, l’échec de l’État à répondre aux besoins fondamentaux, et la désillusion face aux promesses technologiques. Ce passage, plus ancré, reflète un sentiment de marginalisation, voire d’abandon.
Un cocktail d’éco-anxiété, de nihilisme et de fantasmes de pureté
Le manifeste est empreint de colère froide, de mélancolie et d’un sentiment de supériorité intellectuelle. Justin P. se présente comme un esprit lucide dans un monde corrompu, justifiant la violence comme une nécessité biologique et morale. L’action criminelle est décrite comme un acte « d’immunité », une métaphore biologique inquiétante qui fait de la victime un « corps étranger » à éliminer.
Plusieurs internautes ont mis en doute l’authenticité du texte, certains soupçonnant qu’il ait été rédigé avec l’aide d’une intelligence artificielle. La complexité du langage, les tournures philosophiques, et la structure rigide ont alimenté ces spéculations.
Sur les réseaux sociaux, les réactions ont été explosives. Si certains pointent le danger d’un discours écologiste anxiogène martelé dès l’enfance, d’autres appellent à ne pas instrumentaliser le drame. Le terme « d’éco-terrorisme » a été avancé par certains commentateurs conservateurs, évoquant une radicalisation silencieuse de la jeunesse sous l’influence de discours catastrophistes.
Au-delà du drame individuel, cet acte soulève une problématique collective : celle d’une jeunesse en détresse, nourrie de récits de fin du monde, dans un climat rendu totalement anxiogène, parfois sans réponses adultes, ni cadres solides
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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