La régulation permanente des urgences à l’hôpital de Carhaix continue de susciter une vive colère au sein de la population du Centre-Bretagne. Plus d’un an et demi après sa mise en place, le comité de défense de l’établissement publie les premiers résultats d’une consultation citoyenne sans appel : la majorité des habitants rejette ce dispositif jugé inefficace et dangereux.
Depuis l’été 2023, les patients qui se présentent spontanément aux urgences de Carhaix sont refoulés. Désormais, toute urgence doit passer par un appel au 15, où un médecin régulateur décide de l’orientation vers un autre hôpital — souvent à Quimper, Brest ou Morlaix. Une organisation qui, pour beaucoup, ne tient pas compte de la réalité géographique ni des fragilités du tissu médical local.
92 % des habitants dénoncent une situation « inacceptable »
Lancée début mars par le comité de défense et de développement de l’hôpital, une grande consultation a permis de recueillir à ce jour près de 1 500 témoignages de patients et d’usagers, via des questionnaires papier ou en ligne. L’analyse des 1 000 premières réponses est sans appel : 92 % des sondés estiment que la régulation permanente est inacceptable. Et surtout, 57 % d’entre eux reconnaissent avoir renoncé à se faire soigner à cause de ce dispositif.
Des chiffres qui résonnent douloureusement sur le terrain. Au final, les usagers ont peur d’appeler, ne savent pas où ils seront envoyés à l’hôpital.
Au-delà de l’aspect logistique, c’est un sentiment d’insécurité qui domine. 93 % des personnes interrogées affirment ne plus se sentir en sécurité en cas d’urgence médicale. Un chiffre particulièrement inquiétant dans un territoire rural où l’éloignement des grands centres hospitaliers rend le moindre retard potentiellement dramatique.
Les retours des usagers pointent aussi la qualité de la prise en charge via le 15 : 73 % en ont une perception négative, et 90 patients rapportent avoir dû payer de leur poche le trajet retour après une hospitalisation en dehors de Carhaix.
Une mobilisation en vue de la visite ministérielle
Les résultats de cette consultation citoyenne ne resteront pas lettre morte. Le comité entend les remettre au ministre de la Santé Yannick Neuder, attendu dans les prochaines semaines à Carhaix.
Sur le terrain, la mobilisation continue. Chaque mardi, les militants du comité tiennent une permanence devant l’hôpital de Carhaix, et multiplient les actions de sensibilisation sur les marchés du Centre-Bretagne. L’objectif reste inchangé : le retour d’un service d’urgences ouvert 24h/24, 7j/7, conforme aux engagements pris par l’État dans le protocole de sortie de crise.
L’affaire de Carhaix illustre, une fois encore, les limites de la politique de santé dans les territoires ruraux. Tandis que le gouvernement vante la « rationalisation » des soins, les habitants du Centre-Bretagne se voient imposer des kilomètres de route et une attente toujours plus longue pour un accès aux soins qui devrait être immédiat.
Dans une région déjà confrontée à la pénurie de médecins généralistes et de spécialistes, la régulation des urgences apparaît pour beaucoup comme une nouvelle couche d’abandon. A l’heure de remplir sa déclaration d’impôts, il y a comme un arrière goût de vomi dans la bouche.
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine