Dans un entretien au Belfast Telegraph, le nouveau président de Conradh na Gaeilge (la Ligue gaélique), Ciarán Mac Giolla Bhéin, a affirmé que les unionistes d’Irlande du Nord « n’ont plus rien à gagner » à s’opposer à la langue irlandaise. Selon lui, la bataille culturelle est d’ores et déjà tranchée : le gaélique irlandais progresse, et rien ne semble pouvoir enrayer ce mouvement.
Alors que la controverse enfle sur les panneaux bilingues à la nouvelle gare de Belfast, le nouveau président de l’organisation de promotion de la langue irlandaise Conradh na Gaeilge, Ciarán Mac Giolla Bhéin, estime que les opposants unionistes à la reconnaissance publique du gaélique n’ont plus rien à y gagner politiquement.
Originaire de l’ouest de Belfast, Ciarán Mac Giolla Bhéin est à la tête de Conradh na Gaeilge depuis février dernier. Il est le premier Belfastois à occuper ce poste depuis près de trente ans. Issu de cette génération de militants qui ont dû bâtir eux-mêmes les infrastructures linguistiques pour le gaélique dans une société parfois hostile, il revendique un héritage fondé sur l’action concrète et l’initiative communautaire, loin de la dépendance à l’État.
Cette nomination intervient dans un climat tendu. Un nouveau bras de fer s’est engagé au sein de l’exécutif nord-irlandais autour du projet de panneaux bilingues anglais/irlandais dans la Grand Central Station de Belfast. La ministre Sinn Féin en charge de l’Infrastructure, Liz Kimmins, avait annoncé l’installation de ces panneaux, mais le chantier a été suspendu en raison d’un potentiel recours juridique. Du côté unioniste, la vice-Première ministre DUP Emma Little-Pengelly a dénoncé une décision unilatérale.
Pour Mac Giolla Bhéin, ce type de polémique semble appartenir au passé. Il rappelle que les gares de Newry, à la frontière sud, disposent de signalétiques bilingues depuis des années sans provoquer d’émoi. Selon lui, persister dans ce type d’opposition symbolique reviendrait à nier la réalité d’une société nord-irlandaise en mutation, où les droits des locuteurs de l’irlandais sont progressivement reconnus, notamment depuis l’accord « New Decade, New Approach » signé en 2020.
Conradh na Gaeilge souligne que ces évolutions impliquent des changements concrets : signalétiques, services publics bilingues, reconnaissance institutionnelle. La mise en place récente d’un poste de commissaire à la langue irlandaise, en parallèle de son équivalent pour la tradition britanno-ulstérienne, en est une illustration. Pour l’organisation, il est temps pour les dirigeants unionistes de préparer leur base à ces transformations inévitables.
Le président de Conradh na Gaeilge voit dans le renouveau du gaélique en Irlande du Nord un succès populaire, porté par les communautés elles-mêmes. Selon lui, l’énergie déployée par la société civile a permis un essor notable de la langue, en particulier à Belfast, où les écoles et initiatives culturelles en irlandais se sont multipliées ces dernières années.
Dans cette perspective, il juge que la défense obstinée d’un monolinguisme anglais relève désormais d’un réflexe identitaire dépassé. Il appelle à dépasser les querelles symboliques pour reconnaître que le bilinguisme ne menace en rien la coexistence, bien au contraire.
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