On croyait avoir tout vu. Des cyclistes en cire fondant sous le soleil du Ventoux. Des pentes grattées à la truelle dans les Dolomites. Des Hollandais volants. Mais au royaume des Flandres, c’est un Slovène qui gouverne. Tadej Pogacar, maillot arc-en-ciel sur les épaules, cuisses d’acier sous la peau, regard de moine tibétain dans la tempête, a une nouvelle fois dynamité le vieux continent du cyclisme. Il a laissé tout le monde sur place. Littéralement.
Un cavalier seul, et l’écurie à l’arrêt
Il restait 18 bornes, un peu plus qu’un relais de facteur, quand Pogacar a décidé de passer à la vitesse supérieure – celle qu’on n’a pas sur nos vélos. Troisième passage du Vieux Quaremont : la caresse pavée devient supplice romain. Il ne s’est pas retourné. Ce n’était pas une attaque, c’était une révélation. Derrière, Van der Poel tirait sur les rênes, tentait de répondre, mais son destrier semblait soudain rouillé. Pedersen, lui, s’est contenté de faire le sprinteur des damnés, réglant le groupe des battus à une minute. Une éternité dans ce genre de rodéo.
Van der Poel dompté, Van Aert décontenancé
Mathieu Van der Poel, pourtant champion de la régularité sur les monts flamands, avait beau avoir déjà gobé trois Ronde, il n’a rien pu faire face à l’homme qui roule sans fatigue. Il avait chuté plus tôt, certes. Mais il était revenu. Et même revenu fort. Assez pour nous faire croire à un duel d’hommes. Las. Le final a ressemblé à une course entre un TGV et un tortillard des Flandres.
Quant à Wout van Aert, il a tenté d’exister dans l’ombre, comme un acteur secondaire au génie étouffé. Il termine 4e. Pedersen 2e. Van der Poel 3e. Pogacar… ailleurs.
Un mutant sur deux roues ?
On aimerait s’émerveiller sans arrière-pensée. On voudrait chanter la légende comme Blondin célébrait Anquetil. Mais une question s’invite, insistante, lancinante, comme une douleur au genou sur les pavés du Paterberg : comment peut-on placer autant de banderilles, avec autant de facilité, sans jamais sembler entamer ses réserves ? À force de tutoyer les étoiles, Pogacar finit par nous faire douter de la gravité. On l’a vu suer, mais jamais souffrir. Il monte, attaque, relance, comme s’il n’existait pas de ligne rouge dans son moteur. Est-ce du génie ? Du travail ? Ou quelque chose de plus… alchimique ? La question est posée. Et elle commence à tousser dans les rangs des suiveurs.
Paris-Roubaix : vers une revanche terrestre ?
Dans une semaine, les pavés changeront de nature. De montées meurtrières, ils deviendront tranchants et horizontaux, comme des lames mal rangées. Paris-Roubaix, c’est une autre musique. Une musique de gaillards à grands coups de rein. Les Ganna, Küng, Van Aert, Pedersen y seront plus à l’aise que sur les montagnes russes de Flandre. Pas de Quaremont. Pas de Pogacar hors-sol ? Réponse sur le vélodrome.
En attendant, Tadej Pogacar, 26 ans, 8 Monuments, 2 Ronde, 1 maillot irisé, a remis une pièce dans la machine à légende. À nous de décider si nous sommes face à un nouveau Coppi, ou à une autre chimère du peloton.
Mais une chose est sûre : le Tour des Flandres 2025 a changé de main. Le roi n’est plus un Néerlandais au regard clair. C’est un Slovène à la pédale obscure.
YV
Les CARTOUCHES : pourquoi POGACAR est la plus grosse métastase du cyclisme.
Explication 👇
En tant qu’entraineur des plus grands coureurs du monde route et VTT ( dopés ou pas) pendant des dizaines d'années, en tant que coureur moi-même des années aussi, on a toujours constaté,… pic.twitter.com/3gHn4bIW12— 🅰ntoine VAYER 📸🖋️ (@festinaboy) April 7, 2025
Crédit photo : Tour des Flandres (DR)
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