Le maire de Perpignan, Louis Aliot (Rassemblement National), a récemment fait parler de lui à deux niveaux : d’un côté, il a adressé, comme il le fait tous les ans, un message bienveillant aux musulmans de France pour le début du Ramadan, de l’autre, il a confirmé son refus que des fonctionnaires de mairie célèbrent des mariages en catalan à la mairie, mettant ainsi fin à une tradition locale enracinée. Une position qui ne manque pas de faire réagir.
#Perpignan Je souhaite un bon Ramadan à tous mes compatriotes français-musulmans et particulièrement à mes amis #harkis et enfants de harkis avec qui nous partageons l’amour de la France 🇫🇷 avec respect et dignité. Honneur & Fidélité. @RNational_off
— Louis Aliot (@louis_aliot) March 1, 2025
Un message aux Français musulmans relayé par Marine Le Pen
Le 1er mars, Louis Aliot a publié un message sur Twitter/X souhaitant un « bon Ramadan » à ses « compatriotes français-musulmans » et plus particulièrement aux harkis, avec qui il affirme partager « l’amour de la France, avec respect et dignité ». Un message qui a été immédiatement relayé par Marine Le Pen.
Un positionnement qui ne va toutefois pas sans contradictions : Marine Le Pen prône en parallèle l’interdiction du voile dans l’espace public, et son parti demeure farouchement opposé à toute visibilité des revendications culturelles ou communautaires. Si ce message a été perçu par certains comme un signe d’apaisement, d’autres y voient une simple stratégie électoraliste, notamment dans une ville où la communauté musulmane est nombreuse.
Fin des mariages en catalan : une décision qui divise
Dans le même temps, lors du conseil municipal du 13 février 2025, Chantal Gombert, élue d’opposition à Perpignan, a posé une question concernant un mariage en catalan datant d’il y a plusieurs mois : « Confirmez-vous avoir refusé la salle des mariages de l’hôtel de ville en raison du statut d’opposant politique d’un des deux époux, et le mariage était en français et en catalan ? »
Réponse du maire de Perpignan : « On ne demande pas aux agents de la mairie ou à ses agents de célébrer le mariage dans une autre langue que celle de la république française ». Tout en indiquant que les futurs mariés n’avaient qu’à se payer un interprète.
Il a justifié cette décision par le fait que les fonctionnaires municipaux doivent utiliser la langue officielle de la République, et qu’autoriser le catalan créerait un précédent ouvrant la porte à d’autres revendications linguistiques. Une justification qui a du mal à convaincre, alors que cette pratique était en vigueur depuis 1993 et qu’elle respectait le cadre légal français.
La mairie de Perpignan permettait depuis des décennies aux couples qui le souhaitaient de célébrer leur union en catalan, en complément du français. De nombreux élus locaux, parlant couramment les deux langues, assuraient la traduction sans frais supplémentaires pour la municipalité. Par ailleurs, le mariage dans une langue régionale n’a rien d’exceptionnel. En Bretagne, ils sont nombreux à s’être mariés dans la langue de leurs ancêtres, en mairie et cela depuis des années.
Cette décision suscite un véritable tollé chez les défenseurs du patrimoine linguistique catalan. Jaume Roure, militant de la gauche catalane et ancien adjoint chargé des affaires catalanes, dénonce une « discrimination linguistique » et une attaque contre l’identité locale. Il rappelle que cette pratique était conforme à la Convention européenne de 1976 sur les actes d’état civil plurilingues, ainsi qu’aux règlements européens en matière de diversité linguistique.
Une décision qui interroge
En interdisant les mariages bilingues, Louis Aliot semble vouloir rompre avec une certaine tradition locale, lui qui avait déjà supprimé l’expression « Perpignan la Catalane » des documents officiels et remplacé le logo de la ville. Pour ses opposants, cette politique traduit une volonté de gommer la culture catalane de l’espace public.
Mais ce choix pose aussi une contradiction politique. En effet, si Aliot prône la défense de l’identité française contre l’uniformisation mondialiste, pourquoi ne pas défendre une identité régionale forte comme celle du Pays catalan ? Pourquoi souhaiter un « bon Ramadan » aux musulmans de France et, dans le même temps, refuser qu’une langue régionale enracinée dans l’histoire du territoire soit utilisée dans des cérémonies publiques ?
A noter que l’article 75-1 de la Constitution reconnaît les langues régionales comme faisant partie du patrimoine national et que le catalan est intégré au code du patrimoine sous le statut de Trésor National par la loi du 23 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et leur promotion.
Finalement, le maire de Perpignan n’est-il pas en total conformité avec les valeurs d’un parti qui milite ardemment pour que Mayotte et les Mahorais soient des Français comme les autres, tout en rejettant tout ce qui relève des autonomies et revendications régionalistes dans des patries charnelles pourtant bien plus vieilles que la « République française » ? Si ce raisonnement pour un parti dit patriote peut sembler curieux, il n’est par ailleurs pas certains qu’il soit très efficace électoralement parlant, surtout dans des territoires enracinés et attachés à leurs identités locales, et à leurs libertés.
Illustration : DR
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Une réponse à “Perpignan. Louis Aliot (RN) souhaite « un bon Ramadan » aux Français musulmans…mais refuse de marier en Catalan”
Souhaiter un saint Carême c’est au dessus de leurs forces ?