Le 26 février 2025, lors d’un comité interministériel sur l’immigration, François Bayrou, le Premier ministre français, a fait part de sa volonté de ne pas laisser la situation avec l’Algérie « dans une impasse ». Il a annoncé que la France demanderait à Alger de réexaminer la totalité des accords de 1968 entre les deux pays, sous peine de les dénoncer. Cette annonce survient après l’attaque tragique de Mulhouse, où un ressortissant algérien, sous le coup d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF), a tué une personne et blessé plusieurs autres. Le suspect, qui avait été présenté à 14 reprises aux autorités algériennes sans que celles-ci n’acceptent de le reprendre, est au cœur des tensions actuelles.
François Bayrou a souligné que ces accords, qui octroient des avantages aux ressortissants algériens, n’étaient plus respectés, notamment concernant la réadmission des individus en situation irrégulière. Il a insisté sur le fait que la France ne pouvait accepter que de telles situations perdurent. Toutefois, il a précisé que la France ne cherchait pas à « faire de l’escalade » mais que la situation devenait « intenable » et qu’il était de la responsabilité du gouvernement de « dire stop ».
Un ultimatum à Alger
Le Premier ministre a donné un délai de « un à six semaines » pour que la question des accords soit réexaminée par le gouvernement algérien. Ce délai sera accompagné d’une « liste d’urgence » de personnes à rapatrier de manière prioritaire, bien que le nombre exact de ceux concernés reste flou. François Bayrou a également mis en garde contre la « dénonciation » des accords si aucune solution n’était trouvée dans ce délai, précisant que ce n’était toutefois pas la voie privilégiée par la France.
L’attaque de Mulhouse a exacerbé les tensions entre les deux pays. Le suspect, un Algérien de 37 ans, avait été interpellé à plusieurs reprises par les autorités françaises et avait fait l’objet de décisions administratives pour quitter le territoire français. Ces faits ont renforcé les critiques à l’égard de l’Algérie, accusée de ne pas respecter ses engagements envers la France. Le Premier ministre a rappelé que les victimes de l’attaque étaient « les victimes directes du refus de mise en œuvre de ces accords » par l’Algérie.
Un audit sur la délivrance des visas
En parallèle de ces discussions sur les accords, François Bayrou a annoncé un audit interministériel sur la politique de délivrance des visas en France. Cette initiative vise à adapter la politique migratoire aux pratiques de coopération des pays d’origine. L’idée est d’examiner plus en détail les pays dont les ressortissants sollicitent des visas, afin d’évaluer leur engagement dans les questions de réadmission et de coopération migratoire.
Ces événements viennent ajouter de l’huile sur le feu dans une relation déjà tendue entre la France et l’Algérie. Les autorités françaises ont récemment imposé des « mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire national » pour certains dignitaires algériens, en réponse aux refus répétés d’Alger de réadmettre ses ressortissants expulsés. Ce renforcement des mesures a été perçu par Alger comme une provocation. La France, de son côté, souligne que ces actions sont en réponse à l’incapacité d’Alger à respecter ses engagements diplomatiques.
La situation trouve également un écho au sein du débat politique français. L’opposition, notamment à droite et à l’extrême droite, pousse pour un durcissement des relations avec l’Algérie, réclamant des sanctions plus fermes, telles que la suspension des visas. Ce climat de pression a pesé sur la décision de François Bayrou de prendre des mesures qui, tout en restant diplomatiques pour l’instant, visent à montrer une détermination claire face aux manquements d’Alger.
Les conséquences possibles sur la coopération franco-algérienne
Cette intensification des tensions pourrait avoir des répercussions sur plusieurs domaines de coopération entre la France et l’Algérie, en particulier en matière de lutte contre le terrorisme et de relations économiques. Les autorités algériennes ont d’ailleurs fait part de leur volonté de continuer à dialoguer, tout en rejetant fermement toute forme de pression. L’avenir de cette relation complexe pourrait dépendre de l’issue des négociations à venir et du respect des engagements mutuels.
Alors que la France semble prête à acter un durcissement de sa politique migratoire, les autorités algériennes restent prudentes, mettant en avant leur droit à un dialogue constructif sans être contraintes par des mesures unilatérales. Le rôle du président français, Emmanuel Macron, reste incertain dans cette crise diplomatique, avec certains observateurs appelant à une intervention plus directe pour apaiser les tensions.
Mais pourquoi donc la France prend-elle autant de pincettes avec l’Algérie ?