À l’occasion de la tournée de conférences organisée en Europe par l’AAESA (Asociación de Amistad Euro Sudamericana), Lionel Baland a rencontré à Bruxelles Manuel Quesada et Pablo Javier Davoli, deux des dirigeants de cette structure patriotique internationale, et les a interrogés pour Breizh-info.
Breizh-info : Qui a créé cette association et dans quel but ?
Manuel Quesada: L’Asociación de Amistad Euro-Sudamericana, dont le nom signifie « Association d’amitié euro-sud américaine », a désormais deux ans. Elle a été fondée à l’initiative d’Enric Ravello (Catalogne), de Pablo Davoli (Argentine), de René Fuchslocher (Chili) et de moi-même (Espagne). Son objectif est d’organiser des relations entre les descendants d’Européens vivant en Argentine et au Chili et le continent européen.
Les ancêtres des habitants actuels de l’Argentine, arrivés au cours du dernier siècle et demi, proviennent d’Italie, d’Allemagne, des Pays-Bas, de Belgique, d’Espagne, de France, de Slovaquie, de Hongrie, de Pologne, … Les descendants de Polonais en Argentine sont désormais un million. La communauté germano-autrichienne dans ce pays regroupe quatre millions de personnes. L’Argentine est le pays qui compte le plus grand nombre d’Italiens hors d’Italie. Au Chili, la communauté la plus importante, l’allemande, rassemble plus d’un demi-million de personnes. L’association désire établir des liens entre, d’une part, les partis politiques identitaires et nationalistes d’Europe et, d’autre part, les personnes établies en Argentine et au Chili. Nous avons conclu des accords avec des universités, des syndicats et des fondations. De plus, Pablo Davoli est conseiller au Sénat argentin du mouvement nationaliste péroniste. Et nous essayons de créer des liens entre les peuples d’Europe, d’une part, et ceux d’Argentine et du Chili, d’autre part.
Breizh-info : Quelles sont les activités ?
Manuel Quesada : En ce moment, nous réalisons des activités à l’université, nous y tenons des discours. Nous avons mis en place une tournée de conférences qui nous a conduits au Parlement européen et aux Pays-Bas. Nous écrivons des articles, nous donnons des entretiens, nous réalisons des reportages. Nous rédigeons des rapports économiques pour les partis politiques. Nous établissons des contacts entre la politique en Argentine et en Europe.
Breizh-info : Et en Europe, à quels partis êtes-vous liés ?
Manuel Quesada : Aux partis nationalistes. Je n’aime pas utiliser le terme « partis conservateurs ». Je préfère celui de « partis nationalistes » : Vlaams Belang (Flandre – Belgique), AUR (Roumanie), Alternative für Deutschland (Alternative pour l’Allemagne – AfD), Konfederacja (Confédération – Pologne), Republika (République – Slovaquie), Vazrazhdane (Renaissance – Bulgarie), Lega (Ligue – Italie), Forum voor Democratie (Forum pour la Démocratie – Pays-Bas), SDS (Slovénie)… ainsi que toutes les formations politiques qui désirent prendre part à cette nouvelle entreprise.
Breizh-info : Et en Argentine et au Chili, êtes-vous en contact avec certains partis ?
Manuel Quesada : Au Chili, pas encore. Mais, en Argentine, nous avons des contacts avec des sénateurs qui sont impliqués dans le véritable mouvement nationaliste péroniste. Ils sont membres de petits partis. Nous ne sommes pas liés directement aux formations politiques, mais aux sénateurs.
Breizh-info : Que pensez-vous de l’avènement de Javier Milei ?
Pablo Javier Davoli : Javier Milei est une sorte d’ennemi des péronistes. Ses idées ne sont pas nationalistes, patriotiques ou liées à la tradition, mais ultralibérales, anarcho-capitalistes et libertaires. Elles sont proches de celles de Murray Rothbard et se situent en conséquence à l’opposé de celles du nationalisme et de la protection étatique. D’un certain point de vue, Javier Milei est un mondialiste. Nous ne sommes pas du tout sur cette ligne idéologique.
Eu Europe, des partis patriotiques, peu nombreux, sont favorables aux idées et aux actions de Javier Milei. Ce soutien est dû au fait que ces formations ne connaissent pas la situation politique réelle en Argentine et ne prennent connaissance des faits que via des médias contrôlés par le système en place.
Breizh-info : Quelle est la véritable situation en Argentine ?
Pablo Javier Davoli : Celle-ci est très fragile et vulnérable en matière économique et la dette publique a fortement augmenté au cours de la dernière année. La nouvelle doit être ajoutée à l’ancienne. Cela constitue un très gros problème. L’inflation, bien que réduite, existe toujours.
Javier Milei négocie avec le Fonds monétaire international (FMI) pour obtenir plusieurs milliards de dollars. En contrepartie, cet organisme exige que le dollar puisse flotter librement, ce qui relancera l’inflation parce que le cours du dollar en Argentine a un impact profond sur les prix des produits car l’économie est basée en fait sur deux monnaies : le pesos et le dollar.
Le président de la République Milei et ses ministres disent que la situation économique s’améliore, mais dans les faits ce n’est pas le cas. L’objectif de ces dirigeants est de maintenir le calme jusqu’aux élections législatives d’octobre 2025. De plus, peut-être l’administration de Donald Trump aidera-t-elle Javier Milei, sait-on jamais.
L’Argentine est continuellement sous perfusion. Elle a toujours besoin de quelqu’un. Ce n’est pas de la vraie économie, de la vraie souveraineté, du vrai développement car cela ressemble à : « Je suis toujours en vie parce qu’on m’a donné à manger, on m’a offert de l’argent. » Et nous payons des intérêts. La dette augmente. Cette situation est donc la pire affaire qui puisse être. Vous payez, mais vous êtes plus endetté que par le passé. Pendant des années, l’Argentine s’est retrouvée dans le piège de la dette publique. Javier Milei aggrave ce problème.
Breizh-info : Quelle est la vie des gens ordinaires en Argentine aujourd’hui ? Est-elle plus difficile qu’auparavant ?
Pablo Javier Davoli : La consommation de produits de base comme les boissons, le pain, la viande, le lait et les fruits est en déclin. La dégradation est spectaculaire. L’activité industrielle est en chute libre. La situation n’était déjà pas bonne auparavant, sous les précédents gouvernements, mais elle est pire aujourd’hui. Peut-être s’aggravera-t-elle encore ? Selon plusieurs spécialistes, l’économie argentine est déjà en dépression.
Breizh-info : Lors des élections législatives, un parti pro-Javier Milei sera-t-il présent ?
Pablo Javier Davoli : Milei a son propre parti politique : La Libertad Avanza (La liberté avance). Cette formation politique présentera certainement ses candidats pour concourir aux élections. Quoi qu’il en soit, il reste encore plusieurs mois avant ce scrutin. En Argentine, dix mois, c’est comme l’histoire de l’humanité.
Breizh-info : Et un parti lié à la vice-présidente nationaliste Victoria Villarruel ?
Pablo Javier Davoli : Victoria Villarruel est une femme très importante. Elle est la vice-présidente de la République et est identifiée comme étant liée au nationalisme. Elle ne dispose pas de son propre parti politique – du moins, jusqu’à présent –, mais de nombreuses personnes sympathisent avec elle. D’autres dirigeants politiques désirent se rapprocher d’elle. Par exemple, il y a quelques mois, Guillermo Moreno, un leader péroniste qui a fondé un nouveau parti politique appelé Principios y Valores (Principes et valeurs), a exprimé un tel intérêt. Cela ne constitue qu’un exemple parmi d’autres, mais est le signe, sans aucun doute, de l’existence d’un capital politique important. Comme je l’ai déjà souligné, la politique argentine est très changeante. Dans un an ou deux, le scénario politique pourrait être complètement différent de celui d’aujourd’hui. Attendons de voir ce qui se passe à ce propos !
Propos recueillis par Lionel Baland