Où es tu Maman ? Olivia Maurel : « Une GPA ne peut jamais être éthique car elle est, par définition, contraire à la dignité humaine » [Interview]

La gestation pour autrui (GPA) est souvent présentée sous un prisme idéalisé : celui d’un geste altruiste, d’un progrès médical ou encore d’une solution miracle pour les couples en désir d’enfant. Pourtant, derrière cette façade lisse et rassurante, se cache une autre réalité, bien plus sombre, celle du commerce des corps et de la marchandisation des enfants. C’est cette vérité crue qu’Olivia Maurel met en lumière dans son livre Où es-tu, Maman ?, un témoignage rare et puissant qui brise l’omerta autour des conséquences de la GPA sur les premiers concernés : les enfants nés de ce procédé.

Issue d’un milieu privilégié, Olivia Maurel aurait pu grandir dans un cocon de confort et de réussite. Mais dès l’enfance, un mal-être profond la ronge : une peur de l’abandon viscérale, une impression diffuse d’être une pièce rapportée dans sa propre famille. C’est en menant l’enquête sur ses origines qu’elle découvre la vérité : elle est née d’une mère porteuse aux États-Unis, vendue à la naissance comme une simple transaction contractuelle. Ce choc existentiel la pousse à explorer un monde qu’elle ignorait, celui des cliniques de GPA où des femmes en situation précaire sont utilisées comme incubatrices pour satisfaire la demande d’enfants.

Aujourd’hui, Olivia Maurel n’est plus seulement une victime de ce système : elle est devenue une militante acharnée contre la GPA, porte-parole de la Déclaration de Casablanca, une initiative internationale visant à abolir cette pratique à l’échelle mondiale. À travers son combat, elle s’attaque aux discours lénifiants qui cherchent à normaliser cette nouvelle traite humaine, où l’enfant devient un bien de consommation et où la souffrance des mères porteuses est reléguée au second plan.

Dans cet entretien, Olivia Maurel revient sur son parcours, son combat, et sur l’urgence de dénoncer une pratique qui bafoue les principes fondamentaux de la dignité humaine. Un témoignage essentiel pour comprendre les dangers de la GPA et les dérives d’un marché où le désir d’enfant prime sur le respect des droits humains.

Breizh-info.com : Pouvez-vous nous parler de votre enfance et de la manière dont vous avez ressenti ce « manque » avant de découvrir la vérité sur vos origines ?

Olivia Maurel : Petite, je n’ai manqué de rien matériellement parlant. Je disposais de tout ce dont j’avais besoin. Mon enfance a été marqué par la peur de l’abandon lié au traumatisme de l’abandon du fait que j’ai été vendue à la naissance. Petite, j’étais une enfant très angoissée, je ne supportais pas être laissée par mes parents. En même temps, j’avais un manque de lien émotionnel avec ma mère d’intention. Je n’avais pas un “manque” mais plutôt un vide que je tentais de combler par tous les moyens: le manque de mes origines et de, ce que je comprendrais plus tard, ma mère.

Breizh-info.com : À quel moment avez-vous commencé à suspecter que vous étiez née d’une gestation pour autrui, et comment cette découverte a-t-elle transformé votre vie?

Olivia Maurel : J’ai commencé à suspecter que j’étais née d’une autre mère très tôt car je ne ressemble en rien à ma mère d’adoption: je suis grande, blonde (enfin, je l’étais petite), aux yeux bleus, j’ai des traits plutôt de l’est; ma mère est très petits, à la yeux marrons, une peau très matte. C’est une très belle femme, néanmoins je ne me retrouve pas en elle physiquement comment mentalement. C’est uniquement plus tard, autour de mes 17 ans, après maintes déboires, que je décide de faire des recherches sur ma ville de naissance aux Kentucky (USA) et que je tombe sur des agences de GPA. C’est exactement à ce moment que j’ai su que c’était ainsi que j’avais été conçu. Je le savais intrinsèquement, instinctivement. Cela n’a pas vraiment changé ma vie car je savais depuis un moment que j’étais née d’une autre mère. Néanmoins, j’avais plus de questions que de réponses à ce stade.

Breizh-info.com : Vous dénoncez la GPA comme une forme moderne d’esclavage. Quels sont, selon vous, les aspects les plus problématiques de cette pratique ? Vous évoquez souvent le manque de contrôle éthique et juridique dans les GPA. Que pensez-vous des arguments en faveur d’une « GPA éthique » ?

Olivia Maurel : Tous les aspects de la GPA sont problématiques: cette pratique nuit gravement à la dignité humaine. Concernant la femme, c’est la réduire à une esclave reproductive. En effet, elle doit se soumettre aux conditions très strictes de son contrat qui l’empêche de vivre comme elles le souhaitent. Ce n’est pas une question de “mon corps, mon choix” dans la GPA, mais “mon corps, le choix du client”. De plus, se sont toujours des femmes qui sont motivées par l’argent et qui ont un statut économiquement inférieur aux commanditaires. “Donnez de l’argent à ces femmes pour vivre dignement et élever leurs enfants dans la dignité, et il n’y aurait plus de ventre à louer” disant Gisèle Halimi. Si nous luttons contre la précarité incroyable de ces femmes qui deviennent mères porteuses ou si nous enlevons totalement l’argent de l’équation, c’est-à-dire de ne même plus rembourser des frais colossaux, alors il n’y aurait plus de ventres à louer.

Du côté de l’enfant, c’est également le réduire à une commodité, à une chose, que l’on achète et que l’on vend. On provoque le traumatisme de l’abandon en l’arrachant à sa mère à la naissance, à ses racines, à son identité. Comment peut-on passer une loi interdisant la séparation de chatons de leurs mères pendant un délai de 2 mois pour le sevrage mais laisser un marché mondial arracher des nourrissons à leurs mamans à la naissance? Avoir un enfant n’est pas un droit, mais les enfants eux, ont des droits notamment couverts part la Convention Internationale des droits de l’enfant de l’ONU. Par exemple, l’article 8 de la CIDE prévoit que l’enfant à le droit à son identité. Identité qui est volée dans la GPA.

Une GPA ne peut jamais être éthique car elle est, par définition, contraire à la dignité humaine. De plus, personne n’est capable de donner une seule et unique définition d’une GPA pseudo “éthique”: pour certains pro-GPA c’est le modèle américain qui devrait être suivi, pour d’autres le modèle de l’Angleterre ou pour certains le modèle du Canada.

Rappelons qu’en Août 2023 il y a eu un démantèlement d’un traffic de169 femmes en Grèce, là où la GPA est “altruist” et “éthique”. Ces pauvres femmes étaient trafiquées de pays comme l’Ukraine, la Roumanie, l’Albanie, forcée à devenir des mères porteuses en Grèce pour des couples étrangers, notamment des couples australiens. Cela montre que de “réguler” la pratique ouvre au traffic à ciel ouvert et permet simplement de faire croitre le marché de la gestation pour autrui estimé à plus de 100M de dollars en 2032.

Breizh-info.com : Comment êtes-vous passée de votre découverte personnelle à un engagement public et militant contre la GPA ? Vous avez témoigné devant plusieurs institutions internationales. Quels sont, selon vous, les obstacles majeurs à l’abolition universelle de la GPA ?

Olivia Maurel : J’ai commencé mon militantisme en racontant mon histoire sur Tiktok, pour vider mon sac mais aussi pour prévenir les gens des dangers de cette pratique. J’ai ensuite été au Parlement de la République tchèque et j’ai commencé à être la porte-parole de la Déclaration de Casablanca qui veut l’abolition universelle de la GPA par le biais d’un traité international. J’ai ainsi commencé à témoigner et argumenter devant les institutions de plusieurs pays mais j’ai aussi rencontré des ministres, des parlementaires, Le Pape, et des étudiants.

Nous combattons géant et nous le savons. Un marché mondial de la femme et de l’enfant qui pèse des milliards de dollars ne se combat pas facilement. Ils ont de l’argent, de l’influence et sont partout: dans nos médias, sur les réseaux sociaux, au parlement européen et à l’ONU par le biais de lobbies. Cependant nous avons quelque chose qu’ils n’ont pas: la morale, le juste, le bon sens et la science qui sont de notre côté. Nous arriverons à abolir la pratique, cela j’en suis certaine.

Breizh-info.com : Pensez-vous que les médias jouent un rôle dans la « normalisation » de la GPA ? Si oui, comment cela pourrait-il être corrigé ?

Olivia Maurel : Evidemment que les médias jouent un rôle dans la “normalisation” de la GPA mais je dirais que c’est plutôt les chaines de télévision. Il y a maintenant 1 an et demi que je travaille avec la Déclaration de Casablanca et au début, aucun journal mainstream ne voulait m’écouter. Il a fallut du temps et beaucoup d’énergie pour arriver à nous faire écouter mais cela a porté ses fruits car j’ai pu être écouté par The Economist par exemple. Les médias papiers commencent vraiment à comprendre l’horreur qui se cache derrière les fleurs bleus que les plateaux de télé nous servent.

Concernant les médias télévisuels, là nous avons un souci. Pour accueillir des stars ou des couples qui ont eu recours à la GPA pour glorifier la pratique, là les portes sont grandes ouvertes. Par contre, pour me laisser parler, là, il n’y a plus personne et cela freine des 4 fers. Ce qui est totalement hypocrite dans un pays dans lequel la GPA est interdite: ces chaines font de la promotion d’une pratique totalement illégale.

Breizh-info.com : Avez-vous constaté une évolution dans la perception de la GPA depuis que vous avez commencé à vous exprimer publiquement sur le sujet ?

Olivia Maurel : J’ai vu une grande évolution dans la perception de la GPA depuis que j’ai commencé il y a un an et demi, oui. Nous travaillions très dur à la Déclaration de Casablanca pour que l’opinion publique change en montrant les réalités sombres de la gestation pour autrui. Nous avons vu aussi l’Italie passer une loi qui punie les italiens pénalement s’ils partent et reviennent avec un bébé acheté ailleurs. Le Chili actuellement est entrain de travailler sur un projet de loi pour interdire la GPA suite à un entretien que j’avais donné dans un des journaux du pays et des actions de mon collègue de la Déclaration de Casablanca, Bernard Garcia, Directeur exécutif. C’est un travail d’équipe qui fonctionne vraiment bien: nous avons plus de 150 signataires qui agissent dans 80 pays différents.
J’ajouterais qu’en 2022 un sondage annonçait que 71% des français étaient pour la GPA. Un autre sondage de 2024 a annoncé que 59% des français seraient pour la GPA. Une belle dégringolade! Si nous allons à ce rythme d’ici peu le nombre de français en faveur de la GPA passera sous la barre des 50%.

Breizh-info.com : Avez-vous déjà essayé de renouer avec votre mère biologique ? Si oui, comment s’est passée cette expérience ?

Olivia Maurel : Dans mon livre “Où es-tu maman?” j’explique bien comment j’ai pu renouer avec ma mère biologique et je vous partage nos échanges chargés d’émotions. Cette expérience fut un moment très intense pour moi. J’étais soulagée d’avoir les réponses à mes questions existentielles et je savais enfin d’où je venais mais en même temps j’étais peinée de savoir que ma mère porteuse fut un jour la proie idéale d’un marché infâme qu’est le marché de la GPA.

Breizh-info.com Quel message souhaitez-vous adresser aux femmes tentées par l’idée de devenir mères porteuses ou aux couples envisageant de recourir à la GPA ?

Olivia Maurel : Les femmes qui sont tentées par la GPA sont souvent celles qui sont motivées par l’argent. Je dirais qu’il est temps de trouver des solutions pour offrir à ces femmes de quoi vivre dignement sans avoir à louer leur corps pour survivre. J’ai énormément d’amour et de compassion pour ces femmes qui font le choix difficile d’avoir à vendre leurs petits pour manger ou offrir une vie meilleure à leurs enfants. Si j’ai un message pour elles: attentions aux doses d’hormones insupportables que vous allez vous injecter qui n’ont fait l’objet d’aucune études sur votre santé sur le court, moyen et long terme; faites attention car ce petit enfant que vous allez devoir rendre à leurs propriétaires à la fin du contrat sera en manque de vous toute leur vie.
Pour les couples qui envisagent de recourir à la GPA: je comprends votre souffrance, votre désir profond d’avoir un enfant. Néanmoins on ne peut pas trépigner sur les droits des femmes et des enfants pour l’unique raison d’avoir un enfant à tout prix.

Propos recueillis par YV

Crédit photo : DR
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6 réponses à “Où es tu Maman ? Olivia Maurel : « Une GPA ne peut jamais être éthique car elle est, par définition, contraire à la dignité humaine » [Interview]”

  1. Raymond Neveu dit :

    Quelle horreur les tatouages…!!! On m’a toujours dit et répété que les jeunes filles bien nées et tout simplement honnêtes ne portaient aucun tatouage. C’étaient uniquement chez les gueuses que l’on trouvait des tatouages.

  2. nicole dit :

    GPA avec DEUX femmes

    Christophe Beaugrand et Ghislain Gerin, ont eu recours à la gestation pour autrui (GPA), pour accueillir leur premier enfant.

    https://www.closermag.fr/people/info-closer-christophe-beaugrand-bientot-papa-l-animateur-et-son-mari-attendent-1005153

    Ils n’ont pas fait appel à une mère porteuse, mais à DEUX femmes :
    « selon la législation américaine, la donneuse d’ovocytes doit être différente de la mère porteuse ».

  3. Melly Hayet dit :

    OH la la , la revoilà !- on l’a connue petite , puis ado, sur les plateaux TV de feu le présentateur dcd , avec sa mère – lui menant une vie infernale, refusant l’idée d’avoir été conçue par GPA –
    elle souffre de sérieux troubles BORDERLINE … et donc … là, adulte et mère de famille à son tour, (je plains les pauvres petits…) elle n’a toujours pas réussi à trouver un équilibre mental … malgré toutes ces années et des  » suivis psy  » … et mène un faux combat contre la GPA qui par ailleurs rend heureux des milliers d’enfants et familles à travers le monde ( sauf … « le monde malade borderline  » de la jolie Olivia – dommage et triste pour elle, et ses enfants à qui elle fait subir ses combats perso si stupides et inutiles –

  4. Melly Hayet dit :

    …ps… elle a un sens tout à fait personnel de la  » dignité  » , elle bafoue depuis sa pré-adolescence et encore aujourd’hui les seuls parents qui l »ont aimée, élevée et choyée malgré sa personalité limite :  » Borderline  » qui est très difficile pour ses parents et sa vraie famille : celle qui l’a élevée, choyée depuis toujours – elle se rend , par son attitude et ses faux combats, elle-même indigne de l’amour qu’ils lui portent !

  5. Matt dit :

    C’est vraiment un entretien ? Certains mots n’ont aucun sens dans les phrases…
    Cela donne une impression de texte générée par IA ou de mauvaise traduction
    Dommage

  6. Renan dit :

    la G P A EST UNE HONTE POUR L HUMANITÉ puisqu’elle transforme la femme en machine à reproduire et brise le rève du merveilleux de la vie ….. les nazis auraient adoré ces possibilités

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