Plan de paix de Trump en Ukraine : entre réalpolitik et concessions stratégiques ?

L’annonce de la volonté d’un plan de paix entre la Russie et l’Ukraine par Donald Trump a provoqué un séisme diplomatique en Europe. Alors que le président américain affirme vouloir mettre un terme à l’un des conflits les plus meurtriers du XXIe siècle, les contours de son projet soulèvent de nombreuses questions, notamment en matière de souveraineté ukrainienne, d’influence américaine et d’équilibre des forces en Europe.

Un accord en trois volets : commerce, sécurité et concessions territoriales

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump n’a cessé de critiquer le poids financier du soutien américain à l’Ukraine. Dans sa volonté de rationaliser l’aide militaire, il a proposé un pacte d’échange où Washington assurerait une assistance à la sécurité de Kiev en contrepartie d’un accès exclusif aux terres rares et ressources stratégiques du pays. Ces métaux essentiels, notamment le lithium et le titane, sont cruciaux pour l’industrie de défense américaine, qui cherche à réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine.

Ce volet économique de l’accord constitue un virage majeur : l’Ukraine, fragilisée par la guerre, devrait accepter une forme de « mise sous tutelle économique » en échange d’une protection limitée. Cette stratégie marque une rupture avec l’approche de l’administration Biden, qui misait davantage sur un soutien militaire inconditionnel.

L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN enterrée

L’un des points les plus sensibles du plan de Trump concerne l’exclusion de l’Ukraine de l’OTAN. Le président américain a clairement signifié que cette option ne ferait pas partie d’un accord final avec Moscou. Selon Pete Hegseth, secrétaire américain à la Défense, il est « irréaliste » d’envisager une intégration de l’Ukraine à l’Alliance atlantique, une position qui satisfait pleinement les exigences du Kremlin.

En contrepartie, Trump prône la mise en place d’une force de maintien de la paix européenne, sans implication directe des États-Unis. Un tel dispositif, s’il venait à voir le jour, soulève des interrogations sur sa capacité à dissuader une nouvelle offensive russe à long terme. L’absence de l’article 5 de l’OTAN (qui garantit la défense collective) rendrait cette garantie bien plus fragile qu’un véritable engagement occidental.

Un accord qui entérine des pertes territoriales

Mais c’est surtout sur la question du territoire que le plan Trump risque de provoquer un tollé. Contrairement aux positions européennes qui réclamaient un retour aux frontières de 2014, Washington semble prêt à accepter un gel du conflit en l’état. En d’autres termes, la Russie pourrait conserver les territoires conquis depuis 2022, y compris une partie du Donbass et la Crimée.

Kiev, consciente des faiblesses de cette proposition, a cherché à introduire un échange territorial en proposant de céder une partie de la région russe de Koursk, conquise lors d’une offensive éclair en 2024, en échange d’un retour sous souveraineté ukrainienne de certaines zones du Donbass. Cependant, Moscou a immédiatement rejeté cette idée, réaffirmant son exigence d’une Ukraine amputée de ses régions stratégiques.

Une paix imposée qui inquiète l’Europe

Le projet Trump ne convainc pas les alliés européens, qui se voient écartés des négociations. Emmanuel Macron a prévenu qu’un accord qui consacrerait la soumission de l’Ukraine à la Russie aboutirait à un scénario désastreux tandis que Starmer, Premier ministre anglais dont on peut commencer à douter des facultés intellectuelles et mentales, veut envoyer des hommes se battre en Ukraine, risquant ainsi une guerre mondiale. Pourtant, les États-Unis semblent déterminés à privilégier leur propre stratégie, quitte à redéfinir l’ordre mondial.

Dans ce contexte, la position américaine laisse présager un basculement progressif vers une nouvelle dynamique multipolaire, où la Russie pourrait, avec le soutien implicite de Trump, redéfinir ses sphères d’influence en échange d’un rééquilibrage stratégique avec la Chine. L’idée d’un nouvel ordre mondial, avec des pôles d’influence distincts entre Washington, Moscou et Pékin, se dessine ainsi en filigrane.

Vers une nouvelle guerre froide ?

Le plan de Trump, loin d’être une solution définitive, s’apparente davantage à un pari risqué : en cherchant à mettre un terme au conflit rapidement, il pourrait renforcer la position de la Russie et donner des signaux préoccupants à d’autres puissances expansionnistes.

L’Ukraine, quant à elle, devra choisir entre une paix fragile imposée par ses alliés et la poursuite d’un combat qui pourrait s’avérer de plus en plus solitaire. L’avenir de l’Europe, lui, se joue peut-être à Munich, mais sans garantie que l’ordre issu de la Seconde Guerre mondiale puisse encore tenir face aux ambitions des grandes puissances.

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2025, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

Cet article vous a plu, intrigué, ou révolté ?

PARTAGEZ L'ARTICLE POUR SOUTENIR BREIZH INFO

9 réponses à “Plan de paix de Trump en Ukraine : entre réalpolitik et concessions stratégiques ?”

  1. Bran ruz dit :

    Pour qui sonne le glas ? Il semble bien que ce soit à la fois pour l’Europe qui se voulait un pivot majeur dans le soutien aux Ukrainiens, mais surtout pour les Ukrainiens eux-mêmes qui risquent de voir leur territoire mit à la découpe de la realpolitik. Une certitude, notre Jupiter de pacotille est lui ridiculisé devant son impuissance ainsi révélée , malgré toutes ses redomontades il ne pèse de rien dans ce dossier , comme dans ceui du Moyen-Orient.

  2. Pschitt dit :

    Trump se comporte en businessman : il compte que les USA feront des bénéfices grâce au conflit. Hormis ce comportement de « profiteur de guerre » même pas dissimulé, son plan ne comporte aucune originalité. Il réinvente l’OSCE, qui n’a jamais fonctionné. Ne pas intégrer l’Ukraine dans l’OTAN n’a rien de nouveau, c’est une position constante de l’OTAN depuis trente ans ; seule la Russie envisageait cette intégration, pour justifier ses propres empiètements. Quant aux abandons territoriaux, issue classique des guerres, Trump n’a manifestement pas pigé le but de Poutine, pourtant exposé dans plusieurs discours : faire disparaître l’Ukraine, qui doit être un territoire russe, car il l’a été dans le passé, quel que soit l’avis de ses habitants actuels. Laisser subsister en l’état les quatre cinquièmes de l’Ukraine serait pour lui 1/5e victoire, 4/5e défaite : inacceptable, surtout en considération des dommages considérables infligés à la Russie par cette guerre en termes de vies humaines et d’influence internationale. Peut-être la Russie pourrait-elle faire mine d’accepter, mais pour préparer la suite : sous Poutine, elle n’a jamais respecté les traités internationaux qu’elle a signés (exemple emblématique : les accords de Minsk, par lesquels elle s’est engagée à respecter les frontières de l’Ukraine mais qu’elle a violés dès qu’elle a jugé que la situation ne lui convenait pas). Il est vrai que quatre ans d’apparence de paix pourraient suffire à contenter Trump, qui ne sera plus là en 2029.

  3. g dit :

    Je ne sais pas ce qu’il en sortira, mais que cela s’arrête pour tous ces pauvres types qui se font massacrer, Ukrainiens et Russes confondu, par contre ce Zelensky et Boris Johnson qui on fait durer cette guerre, devraient passer en cour martiale et fusillés!

  4. Gaï de Ropraz dit :

    Sans la bêtise fondamentale du vieux Briden, cette guerre entre la Russie et l’Ukraine, n’aurait jamais eue lieu. De ce fait aujourd’hui, indéniablement suite aux dernières élections US et le départ sans fanfare ni cotillons du père Biden, la paix (Grace a qui ?…) étant pratiquement signée, les deux pays reviendront aux frontières qui étaient les leurs par le passé.

    C’est pour cela que je l’ai toujours dit, et toujours soutenu au sein de Breizh Info (Que je remercie au passage pour m’avoir accordé cette liberté) que mes parents Russes, autant que les Russes de la grande Russie, ont toujours considéré l’Ukraine comme étant partie prenante de la Grande Russie.
    Et en cas de conflit face à un pays tiers, ils defendront, ensemble, la Russie et l’Ukraine.

  5. Pschitt dit :

    @g …sans parler bien sûr de ce Poutine qui a déclenché la guerre et la poursuit depuis trois ans !

  6. Gaï de Ropraz dit :

    @ Pschitt
    Decidement, vous en voulez aux USA…. et à Trump !
    Et une remarque de taille : L’Ukraine, au temps des Tsars était DEJA un territoire Russe. J’ai encore en mains des documents de ma Grand-mère née à Kiev en Ukraine en 1800 et des poussieres, et donc citoyenne Russe à part entière !
    Quant à votre assertion comme quoi Poutine cherche à faire disparaitre l’Ukraine c’est… c’est inexact pour être poli. Et vous verez tout autant que sous peu, vous aurez certains pays qui se rapprocheront, d’eux-memes, sans etre obligés, de l’URSS actuelle.

  7. Pschitt dit :

    @ Gaï de Ropraz
    Vous faites erreur : je n’ai rien contre les Etats-Unis, où j’ai souvent séjourné. Simplement, les Américains ne sont pas des Européens, point. Quant à Trump, je ne lui en veux pas d’être Trump, mais je sais qu’il fera passer ses intérêts avant les nôtres. Il est comme le scorpion qui pique la grenouille dans une fable bien connu : « Je n’y peux rien, telle est ma nature ». Le danger de son comportement est qu’il réagit en businessman américain, habitué à négocier avec d’autres businessmen américains, alors qu’il doit négocier avec des politiques européens, russes, israéliens et arabes.
    Sur l’Ukraine, vous raisonnez comme Poutine : sous prétexte qu’elle a eu été un territoire russe, elle devrait l’être encore. Au temps des Tsars, elle était ENCORE un territoire russe (ou vice-versa, la Russie était une extension de l’Ukraine), et non pas « DEJA » comme vous l’écrivez. Plus exactement, vous savez bien que les configurations historiques ont varié : a différents moments de son histoire, différentes parties de l’Ukraine ont été russes, lituaniennes, polonaises, austro-hongroises, ottomanes… ou indépendantes. Choisir comme référence le moment (du 18e siècle, a priori) ou l’Ukraine a été le plus intégrée à l’empire russe relève du tour de passe-passe. Surtout, plus d’un siècle a passé devant le temps des tsars, trois ou quatre générations, de nombreux bouleversements et un statut de république à partir de 1922 qui lui a permis de développer sa propre culture — ce que d’ailleurs Poutine reproche amèrement à Staline ! Au référendum 1991, les Ukrainiens ont massivement voté pour l’indépendance de leur pays (92% de oui, avec un taux de participation de 84%). Et le courage que montrent aujourd’hui les Ukrainiens montrent que ce sentiment demeure intact. Pour moi qui crois au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, ce qui compte est la volonté des Ukrainiens aujourd’hui, pas le bulletin de naissance de votre grand-mère au 19e siècle.
    Poutine cherche bien à faire disparaître l’Ukraine quand il affirme que l’Ukraine n’existe pas ou qu’elle est en réalité un territoire russe, parce que le drapeau impérial a un jour flotté sur Kiev. Il est vrai que les arguments de Poutine ont beaucoup varié depuis 2014, notamment en fonction du public auquel il s’adressait, mais la « justification » de son impérialisme par des notions historiques approximatives est une constante chez lui, et pas seulement à propos de l’Ukraine. Par exemple, il justifie les campagnes de Pierre le Grand contre les Suédois et les Estoniens par la présence, dans un passé reculé, de tribus slaves aux côtés des finno-ougriens. « Pourquoi s’est-il rendu là-bas ? », demande Poutine. « Il y allait pour les récupérer et les renforcer. C’est ce qu’il faisait. Apparemment, c’est aussi à nous maintenant de récupérer ce qui appartient à la Russie Ces lignes sont extraites du recueil « Poutine dans le texte », établi par Élisabeth Sieca-Kozlowski et paru chez CNRS Editions, dont je vous conseille la lecture.

  8. mouchet dit :

    L’occident a bafoué les accords de Minsk pourtant acceptés par l’Ukraine et le conseil de sécurité, mais qui a sacrifié 54’000 pros russes interdisant la langue russe les écoles et enfants russes pour se vanter d’éliminer 200’000 pros russes devant les TV internationales. L’Ukraine a donc donné à la Russie un prétexte et on a menti à la Russie 6 fois comme le cite Mr Lavrov. Les discours de Mr Poutine à Kazan et Saint Pétersbourg expliquent cela clairement sans ambiguïté. L’Europe de dictature voulant faire le gendarme des élections s’est fait remonter les bretelles. Elle qui croyait, comme un IIIème Reich, mais déconcertée par l’élection de Mr Trump. Celui-ci ne laisse pas l’incertitude économique et financière prendre un rôle en temps de dédollarisation surtout avec les alliés de la Russie et la fin des petrodollars, les USA n’ont pas les moyens ni le choix vu leurs dettes, leurs déficits et la rivalité avec la Chine et les BRICS. Donc les USA ont 1000 fois plus les intérêt et les alliances économiques des ressources avec la Russie plutôt que l’Europe qui pèse zéro en ressources. Elle est plus considérée comme une grenouille qui ne sait pas de quel côté elle va sauter qu’un avenir international, malgré ses 450 millions d’habitants absolument pas soudés. Cela à cause justement de la dictature type III ème Reich si bien analysée par JD Vance vice président des USA.La France et l’Allemagne sont donc les fossoyeurs de la gabegie de l’Europe et ont donc ce qu’ils méritent.

  9. Gaï de Ropraz dit :

    @ Mouchet : Bien dit. Je suis heureux de l’avoir lu. Mais il se fait tard : 16h30 ici (Canada), pratiquement minuit en Europe. On reverra tt cela « à l’ouverture de Bz/Info », cette nuit pour moi. Dormez tranquille, et sachez que j’ai 1M40 de neige à ma porte ….
    Heureusement qu’au Canada on sait chauffer et les maisons, et le pieu …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

ARTICLES EN LIEN OU SIMILAIRES

International

Israël/Hamas : et si le plan Trump était le bon ?

Découvrir l'article

International

Allemagne : un ministre vert s’en prend à Musk et Trump, plaidant pour plus de censure

Découvrir l'article

International

La guerre de Trump contre l’État profond a franchi l’Atlantique

Découvrir l'article

International

Donald Trump s’engage pour la paix en Europe : des négociations en vue entre la Russie et l’Ukraine ?

Découvrir l'article

International

Afrique du Sud : Orania demande à Donald Trump d’être reconnu en tant qu’Etat afrikaner

Découvrir l'article

Economie

Droits de douane : entre levier économique et arme politique dans un monde sous tension

Découvrir l'article

International

L’administration Trump face aux juges idéologues : une bataille judiciaire permanente contre la volonté populaire

Découvrir l'article

A La Une, International

Alessandro Nardone : « Trump a fait plus en deux semaines que Biden en quatre ans » [Interview]

Découvrir l'article

International

Afrique du Sud : plus de 20 000 afrikaners « étudient la possibilité » de demander l’asile politique aux USA

Découvrir l'article

International, Sociétal

Terreur woke. Au tour de Google d’abandonner les politiques de diversité forcée

Découvrir l'article

PARTICIPEZ AU COMBAT POUR LA RÉINFORMATION !

Faites un don et soutenez la diversité journalistique.

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur Breizh Info. Si vous continuez à utiliser le site, nous supposerons que vous êtes d'accord.

Clicky