Mateusz Morawiecki (MEGA) : « Je crois en la coopération transatlantique et je pense que l’Europe peut être encore plus grande grâce à elle » [Interview]

Mateusz Morawiecki, du parti conservateur polonais Droit et justice (PiS), a été Premier ministre de Pologne de 2017 à 2023. Il est désormais le président du parti européen des Conservateurs et réformistes européens (ECR) au sein duquel siège son parti, aux côtés de celui du Premier ministre italien Giorgia Meloni – Frères d’Italie – et de celui du Premier ministre tchèque Petr Fiala – le Parti démocratique civique (ODS) –, ainsi que de la formation politique Identité-Libertés de Marion Maréchal. Lors de l’événement MEGA 2, organisé à Bruxelles par le parti et le groupe ECR à l’initiative du parti nationaliste roumain AUR, Lionel Baland l’a interrogé pour Breizh-info, en même temps que des journalistes d’autres médias internationaux.

Breizh-info : En tant que président du parti européen des Conservateurs et réformistes européens (ECR), que pensez-vous apporter à ses membres ?

Mateusz Morawiecki : Nous désirons apporter l’expérience que mon parti, Droit et justice, et ma personne ont accumulée, lorsque j’exerçais la fonction de Premier ministre de Pologne, dans la lutte contre la bureaucratie constituant un cancer si visible au sein des institutions de l’Union européenne, ainsi que les valeurs conservatrices. Le parti ECR faisait déjà cela sous la présidence du Premier ministre italien Giorgia Meloni, mais nous sommes immergés dans le début d’une nouvelle ère avec le deuxième mandat du président Trump. Cela constitue un énorme défi pour l’Union Européenne.

Breizh-info : Êtes-vous d’accord avec la conception que Donald Trump a de l’Otan ?

Mateusz Morawiecki : Absolument. Au sein des budgets des différents pays de l’Otan, nous devons trouver plus de moyens à attribuer à la défense militaire. Nous avons réalisé cela en Pologne, tout en ayant un des plus bas déficits budgétaires. Nous avons été en mesure de consacrer 4% du produit intérieur brut à la défense et à l’équipement militaire. Nous encourageons les autres pays membres de l’Otan à faire de même.

Breizh-info : Quels sont les changements que va apporter pour l’Europe le second mandat de Donald Trump en tant que président ?

Mateusz Morawiecki : Je pense que beaucoup de choses vont changer. Très récemment, beaucoup d’entre nous ont entendu le discours d’investiture du président Trump à propos de l’arnaque du Green New Deal, sur la dangerosité de l’immigration illégale et à propos de nombreux autres sujets. La politique des États-Unis est un vrai défi pour toute l’Union Européenne et nous devons répondre à cela de manière adéquate. Nous ne pouvons pas prétendre que rien ne se passe, parce que, sinon, nous aurions perdu.

Il y a 25 ans, le produit intérieur brut de l’Union Européenne était plus grand que celui des États-Unis. Aujourd’hui, notre produit intérieur brut est 50 % plus bas que celui des États-Unis. Cela montre la difficulté qui nous entoure.

Nous devons trouver la réponse adéquate à cette situation. Un nouvel ordre mondial et de nouvelles relations commerciales entre nous et les États-Unis verront le jour. La Commission européenne doit finaliser ses plans pour répondre à cela, et très rapidement, parce que je pense que nous réagissons trop tard et que notre réaction européenne, celle de Bruxelles, n’est pas adéquate face aux défis d’aujourd’hui.

Breizh-info : Que pensez-vous de la présidence polonaise de l’Union Européenne, du 1 janvier au 1 juillet 2025, dans ce contexte ?

Mateusz Morawiecki : Je ne vois pas de recommandations importantes ni de mouvements de la présidence polonaise qui pourraient nous aider à comprendre ces défis.

Comme l’a dit Christine Lagarde, la présidente de la Banque Centrale Européenne, nous ne sommes pas seulement en retard dans le domaine des technologies, nous ne sommes même pas dans la course. Cela en dit long sur la façon dont l’Europe est trop régulée. Cela montre à quel point la bureaucratie empêche le développement des entreprises européennes, et, non seulement des startups, mais aussi des entreprises traditionnelles. Le secteur automobile en Allemagne doit maintenant faire face au plus grand défi depuis sa création. Les voitures Volkswagen et Fiat annoncent des suppressions d’emplois massives. C’est la première fois que Volkswagen réduit d’une telle manière le nombre de personnes qu’elle utilise. En même temps, avec l’argent européen, nous avons pu financer de grandes industries chinoises. Si ce n’est pas une stupidité, je ne sais pas ce que cela est.

Le secteur des éoliennes, celui des véhicules électriques, la production de panneaux solaires et la fabrication de batteries, ce sont quatre secteurs qui ont été soutenus par l’apport de fonds européens, grâce à l’argent des contribuables européens, mais pas en Europe. Ils se sont développés en Chine, sur le sol chinois. Cela constitue un grand problème pour la Commission européenne et pour l’Europe.

Breizh-info : Vous êtes un des premiers à assumer le slogan « Make Europe Great Again ». Quelle est, pour vous, sa signification et comment rendre l’Europe à nouveau grande ?

Mateusz Morawiecki : Je crois en la coopération transatlantique et je pense que l’Europe peut être encore plus grande grâce à elle. Pour mes amis Roumains, je crois aussi au concept de l’Intermarium, entre les mers, entre la mer Baltique et la mer Noire, entre des pays, en particulier la Roumanie et la Pologne. Nous pouvons nous unir, nous pouvons former une alliance très forte.

La Roumanie est très consciente des risques qui existent autour de nous et nos amis au sein du parti des Conservateurs et réformistes européens aussi. C’est tout ce que je veux dire par « Make Europe Great Again ». Nous devons faire une diagnostic approprié, présenter des instruments et des outils adéquats, permettant d’établir la façon dont nous devons réagir aux situations difficiles et aux défis actuels. Et nous devons être en mesure de mettre en œuvre les réponses appropriées. Donc, quel genre d’action ? Qui va les réaliser ? Comment ? Quand vont-elles être mises en œuvre ?

Cela résulte de la méthodologie du changement, mais je ne crois pas que la Commission européenne soit au courant de ce genre de défi, ni de la manière d’y répondre, ni des actions devant être menées. Je pense que l’appel au réveil que nous entendons lors de cet événement MEGA 2 à Bruxelles rend possible pour l’Europe d’être à nouveau grande, mais probablement pas avec le genre de dirigeants actuels de l’Union européenne.

Breizh-info : En Roumanie, les élections présidentielles ont été annulées. Quelle est votre opinion à ce propos ?

Mateusz Morawiecki : Tout d’abord, je pense que cela fait partie, parmi la série d’actions différentes orientées contre la liberté d’expression, d’une des plus graves d’entre elles et j’estime que ce phénomène est très dangereux. Nous devons nous battre contre la censure, pour la liberté d’expression. L’annulation des élections présidentielles en Roumanie est un acte qui est très dommageable. Toutes les personnes qui aiment la liberté d’expression devraient s’opposer à ces attaques bureaucratiques et à ces changements qui se produisent en Europe et partout. Je crois que les élections présidentielles et les élections parlementaires devraient être sacrosaintes.

Breizh-info : Que pensez-vous de l’évolution de la guerre en Ukraine ? Est-il possible pour l’ensemble des territoires de l’Ukraine, y compris le Donbass, de retourner sous l’autorité ukrainienne ? Vous étiez, en tant que Premier ministre, un grand soutien du gouvernement ukrainien !

Mateusz Morawiecki : Je pense que, éventuellement, cela se passera, mais ne spéculons pas à propos de la situation actuelle. Cela relève de la volonté des Américains, de la volonté de la nation ukrainienne et de l’accord entre l’élite russe et, en particulier, Poutine pour trouver le moyen approprié de geler la guerre et d’arriver à la paix. La nation ukrainienne est torturée par l’attaque barbare de la Russie. J’estime que, le plus important, est de trouver maintenant le moyen d’arrêter la guerre. Je crois que les territoires occupés seront, à la fin de la route, à nouveau en Ukraine.

Breizh-info : Est-il possible pour l’Ukraine de gagner cette guerre sans abandonner beaucoup de territoires ?

Mateusz Morawiecki : Je ne suis pas Ukrainien. Je ne représente pas un point de vue ukrainien, quel qu’il soit. Tout ce que je peux dire, c’est que la Pologne a perdu ses territoires à la toute fin du XVIIIe siècle, en 1795 qui a vu sa disparition. Si nous avions pu maintenir notre pays durant des décennies, nous n’aurions probablement pas été dans le type de situation dure que nous avons connu au cours du XIXe siècle. Donc, avoir un pays souverain, comme c’est le cas de l’Ukraine actuelle, est une vraie victoire. Le Finlande constitue un autre exemple. En 1939-1940, elle a perdu la guerre mais les Finlandais ont maintenu la souveraineté de leur pays.

Propos recueillis par Lionel Baland

Crédit photo : DR (photo d’illustration)
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6 réponses à “Mateusz Morawiecki (MEGA) : « Je crois en la coopération transatlantique et je pense que l’Europe peut être encore plus grande grâce à elle » [Interview]”

  1. gautier dit :

    Il faut penser qu’il y aura un après Trump,les autres tout comme lui voudrons prendre une revanche ! je ne veut pas pour mon pays être dépendant de l’Amérique, nous devons être assez fort pour des échanges libres avec les autres pays, plutôt la Russie en premier qui fait parti et phare de l’Europe! la Pologne se fait et sera mangé par les US !

  2. marco dit :

    Ce brave garcon a la tete caricaturale du technocrate .Les yeux !!.Tres mondialocompatible ,Alchimiste ,,il peut rendre plus grand un cadavre ,,tué par le siens ,,

  3. COCHISE dit :

    Vous résumez l’essentiel;
    C’est le moment,s’il n’est jamais trop tard pour bien faire, selon les thèses développées par François ASSELINEAU, pour un Frexit pur et dur et pour une sortie de l’OTAN, conditions incontournables pour des « échanges libres avec les autres pays ». Quand on pense que cela pouvait être fait depuis des années, et que l’ironie veut que ce soit le geôlier lui-même qui rompt nos chaînes et même botte les fesses des captifs pour qu’ils dégagent et prennent le large. Dindons farcis jusqu’à l’os !
    Et « plutôt la Russie en premier », oui, bien sûr, qui est par nature « phare de l’Europe », d’abord par son étendue sur le CONTINENT EUROPE et par son ancrage civilisationnel aussi ancien que l’est celui de la France, depuis Clovis….
    Français, ânes bâtés que nous sommes, allons-nous enfin COMPRENDRE et cesser d’écouter ces arrogants journaleux fonctionnaires des media de masse et porte-voix d’une Agence de Presse (AFP) trompeuse, gavée d’une idéologie tenace pourtant moribonde? L’embarcation fait eau, les passagers ne le savent pas ou l’ignorent encore, sauf quelques privilégiés qui se saisissent en premier des quelques canots de sauvetage.

  4. Prétet Yvette dit :

    Je crois que nous avons besoin des Etats-Unis pour lutter contre la Russie!…Poutine se croit tout permis: récemment il a envoyé un drone sur une usine de radioactivité de Tchernobyl!. .L’Europe ne peut lutter, toute seule, contre lui!  »On » ne lui fait pas peur!…

  5. creoff dit :

    Je crois que nous avons besoin des ressources des BRICS, et en particulier de la Russie. Nous avons – pour le moment – une éducation qui fait de nos travailleurs des personnes embauchables et fiables (peut etre pas la nouvelle génération), nous partageons leurs valeurs chrétiennes, et leur culture nous sommes des « caucasiens » disent les anthropologues, chose qui va bientôt se raréfier et devenir la cible des autres humains. Il est temps de resserrer les rangs. Les américains ne sont que des voyoux prédateurs et meurtriers depuis le début de leur histoire. Que de mots français en Russe témoignent de nos liens à travers les siècles. Que de Français parmi les architectes et les batisseurs Russes. Que de Slaves parmi nos musiciens et nos poètes!

  6. Bub dit :

    Ça, c’est Kiev qui l’affirme. Propagande contre propagande, s’il vous plait, ne relayons pas n’importe quoi inutilement, merci !

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